Au 38ème jour de leur grève de la faim à Calais, Anaïs et Ludovic ont annoncé, lors d’une conférence de presse ce 17 novembre, y mettre un terme. Initiée le 11 octobre aux côtés du prêtre Philippe Demeestère, cette grève de la faim visait à mettre en lumière les atteintes aux droits des personnes exilées dans le nord de la France.
Elle portait trois revendications principales : la suspension des expulsions quotidiennes durant la trêve hivernale ; l’arrêt de la confiscation des tentes et des effets personnels ; l’ouverture du dialogue entre autorités et associations. L’envoi par le ministère de l’Intérieur d’un médiateur, Didier Leschi, directeur général de l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration), n’a abouti à aucune satisfaction de ces demandes. « Jamais je n’aurais pensé que des revendications si basses ne puissent pas être écoutées » lâche, amer, Ludovic.
Le 13 novembre, les grévistes ont reçu un courrier du directeur du cabinet du ministère de l’Intérieur, Pierre de Bousquet de Florian, « à la demande du président de la République ». Dans ce courrier, celui-ci refuse de mettre fin aux expulsions des lieux de vie – qui ont lieu toutes les 48 à 72 heures -. Il formule en revanche trois engagements : laisser un délai avant chaque évacuation pour que les personnes puissent récupérer leurs affaires ; ouvrir une instance de dialogue avec toutes les associations et des représentants des personnes exilées ; et faire fonctionner le sas de mise à l’abri ouvert le 3 novembre à Calais.
Or, après avoir été suspendu deux jours pour raisons techniques, ce sas vient d’être définitivement fermé, a annoncé la préfecture du Pas-de-Calais ce mercredi. « On se moque vraiment de nous », réagit Ludovic en l’apprenant en cours de conférence de presse.
Malgré ce constat d’échec par rapport aux revendications soutenues, les grévistes soulignent une victoire : celle de la mobilisation citoyenne. Rassemblements, grèves de la faim de 24 à 48 heures, pétition en ligne (plus de 53 000 signatures), dizaines de messages quotidiens venant du monde entier, médiatisation importante, interpellations des responsables politiques… Visiblement très émue, Anaïs insiste : « on nous a donné du temps, de la solidarité, des mots. Ces 38 jours, c’était un raz-de-marée émotionnel incroyable ».
Dès aujourd’hui, les deux grévistes seront à Paris, pour la soirée en soutien à Mimmo Lucano, ex-maire de Riace, à la Bourse du Travail. Ils y resteront au moins jusqu’à dimanche 21 novembre : une manifestation de soutien aux personnes exilées partira ce jour-là de la place Stalingrad, à Paris, à 15 heures. Enfin, le 28 novembre ou le 5 décembre, une « raclette géante » sera organisée entre citoyens solidaires et exilés, à Calais. « Ça fait 37 jours que j’y pense », parvient encore à lancer en souriant Anaïs. Son dernier message à Emmanuel Macron sera le suivant : « Pendant ces 37 jours sans nourriture, on a eu l’énergie de se battre… Alors imaginez ce que ça va être quand on aura mangé. »
Crédits photo : Human Rights Observers
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