L’information du jour de notre première AG de la semaine est la présentation en Conseil des ministres par le gouvernement, ce 23 janvier, du projet de réforme des retraites. Avec deux confirmations : celle du contenu présenté par Élisabeth Borne le 10 janvier et celle d’un projet de loi de finances de la Sécurité sociale comme véhicule parlementaire. Et en prime, l’utilisation quasi certaine de l’article 47-1 de la Constitution pour hâter l’adoption du texte et contourner les oppositions.
Le gouvernement change de ton, mais pas de fond
Les mobilisations monstres du 19 janvier ont contraint le gouvernement à se dire à l’écoute en multipliant les déclarations dans ce sens. Mais ce lundi matin, les annonces faites à la sortie du Conseil des ministres confirment celles de la Première ministre au soir du 10 janvier. Rien ne bouge sur le report de l’âge de départ ou sur les régimes spéciaux. Et quasiment rien sur le reste. Tout au plus une vague annonce, sans détails, sur une meilleure prise en compte des facteurs de multipénibilité et une contrainte sur l’obligation d’éditer un index sur l’emploi des seniors pour les entreprises de plus de 300 salariés. Mais sans aucune contrainte sur le fait que les entreprises se débarrassent de leurs employés les plus âgés.
Pour les carrières longues, Olivier Dussopt n’est même pas revenu sur le fait que nombre des personnes ayant commencé à cotiser avant l’âge de vingt ans devront cumuler 44 annuités pour partir à la retraite. Cette partie est par ailleurs sortie du projet de loi et fera l’objet de mesures réglementaires. Enfin, ce n’est pas une nouveauté, mais le gouvernement confirme les déclarations de la Première ministre du 10 janvier : les retraités actuels seront concernés par l’augmentation des petites pensions. Mais au lieu des 2 millions de retraités (selon les annonces du 10 janvier) devant en bénéficier sur les 5,7 millions de pensions inférieures à 1000 € aujourd’hui, ils seront 1,8 million selon Olivier Dussopt à voir une augmentation pouvant aller jusqu’à 100 euros pour une carrière complète. Donc vraiment pas pour l’ensemble des retraités pauvres. Et pas forcément 100 euros, puisque l’augmentation sera proratisée en fonction du nombre d’années cotisées.
Quand le gouvernement contredit le gouvernement
La réforme est « plus juste, notamment pour les femmes », affirmait Élisabeth Borne lors de sa conférence de presse dévoilant le contenu de sa réforme des retraites le 10 janvier. Ce matin, en accompagnement du projet de loi réformant les retraites, une étude d’impact présentée par le gouvernement explique exactement l’inverse sur ce point : les femmes seront plus affectées que les hommes par le report de l’âge de départ. Le document, que le journal Les Échos a pu consulter, sera transmis aux députés qui débattront du projet de loi en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale à partir du 30 janvier.
Menace sur les énergéticiens
À l’occasion du Conseil des ministres, Olivier Dussopt a posé les bases de poursuites judiciaires à venir pour les énergéticiens qui n’avaient pas exclu de procéder à des coupures d’alimentation sur les permanences des députés de la majorité ou des milliardaires. Le ministre du Travail a affirmé ce matin que les coupures étaient un délit. Au même moment, la CGT énergie des Bouches-du-Rhône annonçait sur RMC vouloir « faire une manipulation sur le compteur pour que les boulangers puissent avoir un tarif soit de 50 %, soit de 60 % gratuit ». Et assumait le caractère illégal, mais moral de l’action.
Les Français moins opposés au blocage qu’à la réforme
Selon un sondage Odoxa pour Le Figaro réalisé le jour et le lendemain des manifestations monstres du 19 janvier, 66 % des Français soutiennent la mobilisation contre la réforme des retraites. Ils étaient 56 % quelques jours plus tôt dans un sondage réalisé par l’institut Elabe. Autre enseignement, les déclarations des ministres contre les blocages ne prennent pas vraiment pour le moment : 59 % des Français déclarent continuer à soutenir la mobilisation en cas de blocages dans les semaines à venir. En légère progression par rapport au sondage Elabe de début de semaine dernière (+4 points). Autre évolution, le pourcentage de personnes qui pensent que le gouvernement pourrait faire des concessions et modifier sa réforme grimpe à 47 %. Par contre, pour l’heure, ils ne sont que 12 % à imaginer que la réforme pourrait être abandonnée.
Des rassemblements ce soir et des marches aux flambeaux
En attendant le 31 janvier – date de la prochaine journée de grèves et de manifestations interprofessionnelles – et les 48 h de grève dans les secteurs du pétrole et de l’énergie, des rassemblements sont organisés devant les préfectures de nombreux département ce lundi, jour de présentation du texte de loi en Conseil des ministres. Plus tard dans la semaine, des marches aux flambeaux auront également lieu dans plusieurs villes. Le syndicat Solidaires a commencé un recensement de ces actions et manifestations du 31 janvier sur son site.
Un préavis de grève reconductible dans les hôpitaux parisiens (APHP)
Après la forte journée du 19 janvier, pas moins de sept syndicats de l’Assistance publique Hôpitaux de Paris (CGT, SUD, FO, CFDT, CFTC, UNSA, CFE-CGC) ont déposé un préavis de grève couvrant 37 hôpitaux parisiens. Dans ce secteur soumis à la réquisition de personnels, le mouvement de grève reconductible commencera mardi 24 janvier à 7 h et mêlera des revendications autour de la réforme des retraites avec d’autres plus spécifiques, telle l’embauche de 1000 titulaires à l’APHP. Les syndicats appellent également à des actions dans les établissements.
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