Environ 11 dollars la journée. C’est la rémunération des travailleurs du secteur agro-industriel au Pérou. La plus basse du continent. Ceux-ci réclament une augmentation à 19 dollars par jour, dans un pays où le salaire minimum ne dépasse pas 262 dollars par mois.
La mobilisation s’est répandue dès le 30 novembre de l’année passée, d’abord dans le nord avant de s’étendre au reste du pays. Il aura fallut cinq jours de grèves des travailleurs agro-industriels, des blocages de route et la mort par balle de Jorge Muñoz Jiménez, jeune journalier le 3 décembre, pour que le gouvernement s’attelle à désamorcer le conflit. Le Parlement a donc fini par abroger la « loi de promotion de l’agriculture d’exportation », synonyme d’ « exploitation » selon les travailleurs agricoles péruviens.
Ce texte, pensé pour créer une main d’œuvre bon marché, dépourvu de droits, profite à l’exportation (myrtilles, asperges ou artichauts) et à l’élite entrepreneuriale d’un secteur qui pèse 5 milliards de dollars par an. Il fut promulgué sous la dictature d’Alberto Fujimori en 2000 par l’actuel directeur de la Banque centrale et ancien ministre de l’agriculture José Chlimper, lui-même propriétaire de la société agricole Drokasa. La loi en vigueur depuis 20 ans, a été prolongée en début d’année jusqu’en… 2031 !
Devant l’incapacité de l’exécutif à trouver une solution au-delà de l’abrogation, la mobilisation s’est réactivée. Sous pression, le Parlement a finalement approuvé le 29 décembre une nouvelle loi sans toutefois pleinement satisfaire les demandes pour de meilleurs salaires. Celle-ci accorde une prime et non un salaire, qui porte le revenu à 13,5 dollars par jour, loin des 19 dollars réclamés par les paysans.
Cette nouvelle mouture législative n’a donc pas mis fin à la mobilisation des agriculteurs qui s’est soldée par de nouveaux affrontements et de nouveaux morts. Le 30 décembre, Reynaldo Reyes Ulloa âgé de 28 ans et un jeune de 16 ans sont tombés sous les balles des forces de police durant le blocage de la route panaméricaine, la plus importante du pays.
Dans un contexte social agité, les discussions se poursuivent quant à la poursuite du mouvement. Mais déjà, Walter Campos Palacios, le dirigeant du Comité de lutte des travailleurs du secteur agro-industriel de la province de Virú, dénonce le licenciement ou le non renouvellement de contrat de travailleurs agricoles ayant participé au mouvement.
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