grève choc des savoirs

« Choc des savoirs » :  une grève qui faiblit mais des territoires toujours très mobilisés


 

Ce 2 avril, l’intersyndicale de l’éducation appelait à une deuxième journée de grève contre l’arrêté dit du « choc des savoirs ». Si la mobilisation était en baisse à l’échelle nationale, certaines académies ou départements restent particulièrement mobilisés et tentent de construire une grève reconductible.

 

Environ 14% de grévistes en collège selon le ministère de l’Éducation nationale, 36% selon l’intersyndicale (SNES-FSU, SNEP-FSU, SUD-Éducation, la CGT Éduc’action et FNEC-FP FO). Les chiffres sont en baisse pour cette seconde journée d’appel national à la grève contre l’arrêté dit du « choc des savoirs ». Le 1er février, le taux de gréviste en collège était de 29% selon le ministère et 47% selon les syndicats. « Mais ça ne signe pas la fin du mouvement », prévient Claire Guéville, secrétaire nationale du SNES-FSU.

 

Éducation nationale : énormément de colère et beaucoup d’enseignants en grève ce 1er février

 

Voulu par Gabriel Attal et publié au journal officiel le 17 mars, cet arrêté détaillant la mise en place de groupes de niveau au collège entrera en vigueur à la rentrée prochaine pour les classes de 6e et de 5e et en 2025 pour 4e et 3e. Si la formule de « groupe de niveau », tant décriée par les enseignants, ne figure pas noir sur blanc dans le texte, la mesure préconise la création de « groupes », « constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs ». Un glissement sémantique de « niveau » vers « besoin », qui ne dupe personne.

 

Une forte disparité de mobilisation

 

Malgré des chiffres en léger recul depuis le début du mouvement, les mobilisations ont été très variables d’un collège à l’autre. « Il y a eu plus de 80 manifestations partout en France, avec des taux très variables. En Normandie, on a des collèges avec 75% de grévistes », pointe la syndicaliste. Selon le rectorat de l’académie de Normandie, 12,58%  des enseignants en collège étaient en grève ce mardi, avec d’importantes variations en fonction des collèges, allant de 21% de grévistes à 100% dans certains établissements, selon le SNES.

À Niort, ils étaient une centaine à se mobiliser devant la Direction des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN), tout comme à Poitiers, ville de la même académie, où 15% des profs étaient en grève. À Caen, ils étaient 300, contre 2000 le 2 février dernier, avec un taux de grévistes à 12,58% mardi, contre 24% le 1er février et 10% le 19 mars, selon les chiffres du ministère de l’Éducation.

À Paris, où plusieurs milliers d’enseignants ont manifesté, le cortège de tête a été gagné par les enseignants du 93. Il était composé de « 2000 et 4000 profs », glisse Tristan, professeur de lettres à Noisy-le-Grand, et membre du comité exécutif de la CGT Éduc’action 93. S’il souligne l’importance de cette grève nationale, il constate aussi que la mobilisation du 93, à sa sixième semaine, atteint un palier qui ne pourrait être dépassé qu’avec le renforcement de la mobilisation partout en France. « Il y a vraiment besoin que l’intersyndicale nationale se donne les moyens de diriger un combat réel. Une grève solide et de combat ça se construit, ça prend du temps et pour entraîner des collègues dans la lutte, ça demande une vraie organisation », pointe-t-il.

Claire Guéville note enfin que la mobilisation varie en fonction des dotations attribuées aux établissements : «  Quand un établissement voit sa dotation horaire baisser de façon brutale et qu’on dit aux enseignants qu’ils devront, en plus, ajouter des heures pour des groupes de classes par niveau (ndlr: tel que préconisé par le choc des savoirs), ils se demandent avec quels moyens ils vont fonctionner », s’interroge Claire Guéville.

 

« Choc des savoirs » une grève à suivre 

 

La ministre de l’Éducation, Nicole Belloubet, doit recevoir en fin de semaine les intersyndicales nationales, et du 93.  Si les réponses du gouvernement ne sont pas satisfaisantes, les enseignants de Seine-Saint-Denis menacent déjà de faire grève au retour des vacances de printemps, le 22 avril. Quoiqu’il en soit, la mobilisation se poursuivra dans les prochains jours.

« Certains établissements seront en grève reconductible trois jours à partir de demain, sur toute l’académie de Normandie », souligne Claire Guéville, tout en rappelant que des mobilisations locales ont lieu quotidiennement à l’échelle du pays.

La date d’une prochaine journée de mobilisation nationale devrait se dessiner dans la semaine. Quoiqu’il en soit, la colère est toujours aussi forte chez les enseignants, contre une réforme qui vient appuyer sur des problèmes de sous dotation et de sous-effectifs préexistants partout en France. D’autant que « les groupes de niveau ne sont que le premier étage de la fusée », remarque la syndicaliste du SNES : « Derrière le choc des savoirs, on affiche l’idée qu’il ne faut plus que les élèves soient autant formés et qu’il faut mettre au pas tous ces jeunes, en uniforme ou à l’usine. Je caricature à peine ».

 

Vers une grève du zèle à la rentrée de septembre ?

 

« Il n’y a rien qui nous contraint à organiser les groupes par niveau. Si on décide que le meilleur moyen pour pallier les difficultés scolaires, ce sont des groupes hétérogènes, on gardera ces groupes », affirme Claire Guéville du SNES-FSU. Une position répétée sur France-Info mardi soir par la secrétaire générale du syndicat, Sophie Vénétitay : « On désobéira s’il le faut, mais on ne triera pas nos élèves à la prochaine rentrée ».