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Du glyphosate dans les urines : tous contaminés par le pesticide ?

 

Dominique Masset, Faucheur volontaire ariégeois, a annoncé mercredi 6 juin, lors du procès pour dégradation de biens à Béziers de 12 membres de l’association, le lancement prochain de tests urinaires massifs pour détecter la présence de glyphosate. Viendront ensuite des dépôts de plaintes contre tous les responsables économiques et politiques de la mise sur le marché du perturbateur endocrinien et probable cancérigène humain.

 

La meilleure défense c’est l’attaque ! C’est en quelque sorte la stratégie des Faucheurs volontaires contre le glyphosate, dont l’interdiction, malgré la promesse d’Emmanuel Macron d’en sortir, n’a pas été inscrite dans la loi Alimentation fin mai. Adeptes du principe de précaution et de l’intervention directe des citoyens face à l’impuissance ou la non-volonté des pouvoirs publics, ils lancent une nouvelle campagne contre le pesticide décrié. Il y a deux ans, une opération nationale visant à enduire de peinture des bidons de Roundup pour les rendre impropres à la vente, les ont conduits devant les tribunaux de plusieurs villes françaises.

Cette fois-ci, il s’agit de déposer des plaintes en masse contre les fabricants et les responsables de la mise sur le marché du glyphosate. Pour ce faire, ils entendent s’appuyer sur des tests urinaires prouvant la présence en grande quantité de la molécule dans le corps de chacun. « J’ai 33 fois la dose autorisée dans l’eau potable, je suis végétarien, je mange bio depuis des années, je vis dans une petite ville en Ariège », raconte Dominique Masset, animateur de la campagne, pour souligner la présence, partout, des pesticides.

 

La campagne de tests urinaires commence le 15 juin

 

L’initiative trouve son origine en Ariège, où des militants Faucheurs volontaires sont convoqués devant le tribunal de Foix pour leur action contre le Roundup en 2016. Ils procèdent à un test de leurs urines pour démontrer lors du procès qu’ils sont concernés pour eux-mêmes. Les résultats des analyses qu’ils présentent sont édifiants : entre 3 et 35 fois la dose autorisée dans l’eau du robinet. L’idée et l’envie d’entamer une campagne nationale surgissent naturellement. C’est décidé. Ils démarreront en Ariège, même si des contacts sont déjà pris ailleurs. Dans le Tarn, la Gironde ou en Bretagne, les Faucheurs volontaires et d’autres associations sont dans les starting-blocks. Avant un déploiement européen espéré.

Le coup d’envoi sera donné le 15 juin, avec le dépôt au commissariat de Foix de six premières plaintes de Faucheurs volontaires ayant déjà leurs analyses. Une façon de tester la validité de leurs plaintes avant un passage en grand. Dans le viseur, les PDG et membres des conseils d’administration des fabricants. Mais aussi les membres de la Commission européenne, ceux des organismes de contrôle et de validation ainsi que les laboratoires ayant participé à la mise sur le marché du glyphosate. Les griefs porteront sur la mise en danger de la vie d’autrui, l’atteinte à l’environnement et la tromperie aggravée.

Pour la phase suivante, 250 personnes se sont déjà déclarées volontaires pour effectuer un test urinaire dans l’Ariège, dont 200 prêtes à porter plainte. « C’est une campagne pour que les citoyens se lèvent. Il faut passer du défaitisme à l’action. Nous sommes empoisonnés, nous réagissons, nous portons plainte », propose Dominique Masset. L’étape suivante est l’extension à l’ensemble des départements. Des milliers de tests et de plaintes en perspective qui devraient faire grand bruit et mettre la pression sur des décideurs politiques peu enclins à une sortie immédiate du glyphosate.

 

Procès des Faucheurs volontaires ou du glyphosate

 

En attendant, les Faucheurs volontaires enchaînent les procès pour leurs actions d’opposition à la propagation des pesticides. En cause, une action nationale en 2016 visant à mettre de la peinture sur des bidons de Roundup, composé du glyphosate, pour les rendre impropres à la vente. Environ 800 000 tonnes de ce pesticide sont utilisées pour le seul épandage chaque année dans le monde. « Il y avait un flottement dans le gouvernement sur cette question », explique à la barre Jean-Claude, un des 12 inculpés du procès de Béziers du 6 juin, jugeant son action légitime. « Cela fait 50 ans que l’alerte a été donnée sur ces produits », renchérit Anne, également poursuivie. « J’ai voté pour des gens à qui j’ai eu la faiblesse de faire confiance, et rien n’a changé », justifie devant la juge, Claire, pour qui agir directement est devenu une évidence afin de modifier la situation face aux pouvoirs publics et à la puissance des lobbys.

Procès de 12 Faucheurs volontaires. Rassemblement devant le tribunal de Béziers le 6 juin

Le procès de Béziers n’est pas le premier, mais le cinquième après Privas en Ardèche, Foix, Guingamp et Lorient. À chaque fois, la stratégie des faucheurs est la même. Tenter d’inverser l’accusation. Poursuivis pour dégradation du bien d’autrui, ils posent en préalable avec leur avocat une question préjudicielle à la Cour de justice européenne. Il essaie ainsi de faire reconnaître que les procédures d’homologation du glyphosate sont entachées d’irrégularités. Une façon de contre-attaquer pour remettre en cause la mise sur le marché du pesticide et lever par la même occasion les poursuites envers les militants.

Pour le moment, deux tribunaux sur cinq ont prononcé un jugement favorable aux Faucheurs volontaires en renvoyant la question devant la Cour européenne. Mais à Privas et Lorient, les militants ont été condamnés à des peines légères avec sursis et des amendes. À Béziers, la juge a décidé de joindre les dégradations et la question préjudicielle. Le jugement sera rendu le 4 juillet, alors que la campagne des tests urinaires sera sur la place publique.