Le comité de suivi et d’évaluation du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a rendu son cinquième rapport le 3 octobre 2017. Il laisse apparaître des effets très limités sur l’emploi, malgré un coût de 62 milliards d’euros depuis sa création.
C’est un jugement sans appel : « extrêmement coûteux pour la nation […] pas efficaces dans la lutte contre le chômage ». Le point de vue de Muriel Pénicaud, la ministre du Travail porte ici sur les contrats aidés, et non sur le CICE.
Pourtant, le cinquième rapport de France stratégie, daté du 3 octobre, ne souffre d’aucune ambiguïté sur l’échec du CICE pour lutter contre le chômage. Il révèle un impact plus que limité sur l’emploi. Pour les trois années de la période allant de 2013 à 2015, le nombre total d’emplois créés ou sauvegardés est évalué à 108 000. Pour l’organisme chargé d’analyser les politiques publiques pour le compte du gouvernement, il s’agit d’une estimation. En s’appuyant sur plusieurs études, il énonce une réalité bien moins précise : une fourchette comprise entre 10 000 à 200 000 emplois en trois ans. Un écart de 1 à 20.
Mesure phare du Pacte de responsabilité, le CICE est entré en vigueur le 1er janvier 2013. Destiné à baisser le coût du travail, pour permettre aux entreprises de retrouver de la compétitivité et embaucher, il a consisté à offrir une ristourne fiscale calculée sur la masse salariale. Depuis sa création, 62 milliards d’euros lui ont été consacrés sur les finances publiques. Pour la période concernée par le rapport de France stratégie : 11,59 milliards en 2013, 17,5 en 2014 et 17,9 en 2015. Soit 47 milliards.
Un coût exorbitant
En 2013, Pierre Gattaz fixait un objectif de création d’un million d’emplois avec le Pacte de responsabilité et le CICE. Quatre ans plus tard, le compte n’y est pas. Depuis, le patron du Medef s’est ravisé, mais n’a pas hésité en 2016 à affirmer la possibilité de créer deux millions d’emplois lors du prochain quinquennat avec une politique favorable aux entreprises. Une promesse qui ne semble convaincre que des dirigeants politiques ayant envie d’y croire et d’y croire encore.
En attendant, le coût du CICE est exorbitant. Même en tablant sur le chiffre optimiste de 200 000 emplois créés ou sauvegardés entre 2013 et 2015, le prix de l’emploi sauvé à l’unité est délirant. Le résultat est de 235 000 euros par emploi. En retenant le chiffre le moins flatteur de 10 000 emplois sauvés, le coût à l’unité s’envole à 4,7 millions d’euros. Cependant, le CICE a ruisselé sur toute l’économie selon le rapport, et a permis de réduire les prix de certains biens et services.
France stratégie souligne tout de même un effet positif sur l’emploi pour les entreprises de 10 à 100 salariés. Celles-ci, grâce à un gain de trésorerie, ont été moins exposées aux faillites. Un risque concernant peu les grands groupes ayant bénéficié eux aussi du crédit d’impôt. Le groupe Vivarte, propriétaire de la Halle aux chaussures, a empoché 14 millions de réductions fiscales en 2016. Pourtant en 2015, il a supprimé 1250 emplois. En 2017, 451 suppressions de poste se sont ajoutées au premier plan social. De son côté, La Poste touchait 297 millions tout en réduisant sa masse salariale en 2014.
Enfin, l’étude ne montre pas d’impact positif quantifiable du crédit d’impôt sur l’investissement ou les dépenses des entreprises en recherche et développement. Le CICE est cependant reconduit pour 2018, avant d’être transformé en 2019 en suppression de cotisations patronales. Une mesure réclamée depuis longtemps par le Medef. De leur côté, les contrats aidés jugés inefficaces et trop coûteux par le gouvernement ont coûté 4,2 milliards d’euros à l’État en 2016 pour 456 723 emplois, justifiant leur gel décidé par l’exécutif.
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