Montpellier

Plus d’arrestations à Montpellier qu’à Nantes pour la mobilisation nationale contre la « casse sociale »

 

Manifestation bloquée, tentative d’interdire le centre-ville, dégradations de devantures de magasins et 51 personnes arrêtées. C’est le bilan de la manifestation nationale du 14 avril à Montpellier, haut lieu depuis quelques semaines de la contestation étudiante.

 

La manifestation n’a pas pu démarrer, sans pour autant qu’un arrêté interdisant le défilé n’ait été pris par la préfecture de l’Hérault. Samedi 14 avril, une douzaine de véhicules de police sont étrangement positionnés au début du parcours de la « manifestation nationale contre la casse de nos droits sociaux et politiques » appelée par la Coordination nationale des luttes et les comités de mobilisation des universités de Montpellier. Une trentaine de membres des forces de l’ordre est déployée, harnachée, boucliers et armes aux poings. Le cortège de tête s’avance encapuchonné, ouvrant le défilé, et fait face à une douzaine de policiers barrant le boulevard.

Les manifestants sont bloqués par une poignée de policiers particulièrement nerveux. Une quinquagénaire filmant la scène de trop près, autocollants de la France insoumise collés sur la veste, est projetée au sol par un policier. Le cortège avance. De rares projectiles sont lancés, auxquels répondent une pluie de grenades lacrymogènes. Un épais brouillard enveloppe le boulevard et la plupart des manifestants refluent. Parmi les quelque 2000 personnes présentes, difficiles à comptabiliser compte tenu du non-démarrage du défilé, des étudiants, des syndicalistes, des personnels enseignants des universités. Mais aussi quelques cheminots, des migrants et un cortège de la France insoumise réunis dans une convergence des luttes souhaitée pour cette manifestation.

 

Manifestation quand même !

 

Malgré le barrage policier sur le boulevard Ledru Rollin, la manifestation finit par repartir à contre-courant. Direction la Place de la Comédie en passant sans encombre devant la préfecture, puis en empruntant l’artère commerçante du centre-ville. Par contre, la place de la Comédie est bloquée par un important dispositif policier comprenant des canons à eaux. Le défilé oblique pour rejoindre le boulevard du Jeu de Paume et le point de départ de la manifestation. Là, des devantures de banques, d’agences immobilières et d’opérateurs téléphoniques sont cassées ou repeintes sur le parcours. Après avoir déambulé pendant plus d’une heure dans le cœur de ville, les manifestants sont pris en tenaille, puis arrosés de lacrymogène de toute part. Fin de la manifestation.

Une heure plus tard, une cinquantaine de manifestants sont pris dans une nasse policière, gazés à deux pas de l’université Paul-Valéry. Plusieurs d’entre eux sont blessés et emmenés à l’hôpital en ambulance. La police procède à 51 interpellations, selon le ministère de l’Intérieur, et réquisitionne des bus de ville pour les conduire au commissariat. Des arrestations dénoncées par la Ligue des droits de l’Homme. « Ces interpellations ont eu lieu alors que les manifestants étaient calmes et sans dégradations visibles aux alentours », énonce-t-elle dans un communiqué publié samedi soir, avant de considérer que la mise en place de cette nasse « constitue une atteinte au libre droit de manifester ». A l’issue de 24h de garde à vue, les 51 devraient être relâchés dimanche après-midi sans poursuites, les arrestations non ciblées ayant eu lieu presque deux heures après les dégradations.

 

Une intervention policière qui pose bien des questions

 

Le choix de disposer des véhicules et des policiers, armes pointées, au contact du début de la manifestation a créé une tension immédiate et prévisible. La suite de la stratégie de maintien de l’ordre est encore plus étonnante. Une douzaine de policiers pour barrer la route à quelque 2000 manifestants ! À coup sûr, l’assurance qu’ils soient débordés, fassent usage de leur équipement antiémeute et que la manifestation se transforme immédiatement en affrontement. L’officier en charge des forces de police a affirmé devant les caméras de France 3 avoir eu pour consigne d’interdire l’accès au centre-ville pour éviter des dégradations. Pourtant, malgré la tension provoquée par cette première confrontation, aucun dispositif complémentaire n’était en place pour empêcher la manifestation de prendre l’autre entrée vers les rues commerçantes située à quelques dizaines de mètres.

Le défilé est reparti par la rue Foch et la rue de la Loge sans aucune pression policière jusqu’à la Place de la Comédie bloquée. Aucune vitrine de ses rues commerçantes et riches n’a souffert du passage de la manifestation. Ce n’est qu’en bifurquant en direction du lieu des premiers affrontements que les dégradations ont eu lieu. Au total, les manifestants ont parcouru le centre-ville sans voir l’ombre d’un policier aux abords du cortège. L’intervention finale de la police pour les disperser s’est déroulée plus d’une heure plus tard, plongeant cette partie du centre-ville sous un nuage de gaz lacrymogènes. Si le maire de Montpellier a rapidement communiqué sur sa volonté de porter plainte contre X pour les dégradations, la préfecture a, elle, été injoignable samedi.

 

Photo de une : Le Poing info