Gagnant du duel l’opposant à l’extrême droite, Emmanuel Macron a été élu président de la République avec 66,1 % des suffrages exprimés. Malgré une avance de 30 points sur sa rivale, sa légitimité est affaiblie par une forte abstention et un nombre record de votes blancs et nuls.
Plus de 16 millions d’inscrits sur les listes électorales n’ont pas participé à l’exercice de légitimation du nouveau chef de l’État. Au second tour des élections présidentielles, l’abstention monte à 12,1 millions de personnes, soit 25,38 % du corps électoral. Un niveau jamais atteint depuis 1969. Les votes blancs et nuls atteignent le nombre de 4 millions, un record sous la Ve République. Ainsi, le refus de voter pour l’un des deux candidats dépasse le total des voix pour Marine Le Pen. Cette dernière totalise pourtant 10,6 millions de suffrages sur son nom, le plus haut score du Front national, toutes élections confondues.
Emmanuel Macron gagne largement le second tour, avec 66,1 % des suffrages exprimés, contre 33,9 % pour sa rivale. Ces chiffres ne rendent pourtant que partiellement compte de la réalité du scrutin. Une victoire en trompe l’œil pour le nouveau locataire de l’Élysée. Une légitimité atténuée par un nombre de votes en sa faveur moins écrasant qu’il n’y paraît. Cela, malgré l’enjeu de faire barrage au Front national.
Avec 20,7 millions de voix, Emmanuel Macron est loin des 25,5 millions de suffrages enregistrés par Jacques Chirac en 2002. Il affrontait pourtant une configuration identique, face au Front national. La faiblesse du résultat devient plus évidente en comptabilisant les 6 millions d’inscrits supplémentaires de l’élection 2017 par rapport à celle de 2002. Emmanuel Macron se situe juste au-dessus du nombre de voix enregistrées par Nicolas Sarkozy en 2007 et François Hollande en 2012, proportionnellement à la taille du corps électoral. Ils avaient remporté respectivement le match du second tour avec 19 et 18 millions de voix.
Ramené au nombre d’inscrits, le score du candidat d’En Marche tombe à 43,63 %, contre 61,99 % pour Jacques Chirac en 2002. Il se situe là encore à des niveaux proches de Nicolas Sarkozy (42,68 %) en 2007, et de François Hollande (39,07 %) en 2012. Des chiffres relativisant l’apparence de victoire facile. Les sondages d’opinion enfoncent le clou. Selon une étude réalisée par Ipsos, 43 % des électeurs d’Emmanuel Macron motivent leur choix par la volonté de battre Marine Le Pen. Le vote d’adhésion pour le nouveau président chute à 8,9 millions de ses voix du second tour. Guère au-dessus des 8,6 millions du premier tour. Enfin, un autre sondage au soir de l’élection indique que 61 % des Français ne souhaitent pas qu’Emmanuel Macron ait une majorité à l’Assemblée nationale.
Avec un faible niveau d’adhésion et une image écornée dans une partie non-négligeable de la population, le nouveau chef de l’état pourra difficilement bénéficier d’un état de grâce pour appliquer son programme libéral. Il n’a même pas la garantie d’obtenir une majorité aux législatives du mois de juin. Contrairement à Jacques Chirac en 2002.
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