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Après le 49-3, la mobilisation se durcit [L’AG]


 

Des dizaines de milliers de manifestants hier soir et aujourd’hui

 

A l’annonce de l’utilisation de l’article 49-3 de la Constitution, des centaines d’opposants à la réforme ont convergé vers l’Assemblée nationale avant de se rassembler sur la place de la Concorde voisine. Les centaines sont finalement devenues des milliers, puisqu’au moins 10 000 personnes ont manifesté à Paris, selon le ministère de l’Intérieur. Dispersés après 20 h, une partie des manifestants ont allumés des feux de poubelles et formés des barricades sur leur parcours.

Des rassemblements ou manifestations, parfois spontanés, parfois à l’appel des syndicats, ont également eu lieu dans de nombreuses villes. Au moins 25, selon les chiffres donnés par ministère de l’Intérieur. Hier soir, la place du Capitole était remplie à Toulouse, près de 2000 personnes manifestaient à Montpellier, 3000 à Lyon. Des défilés ont également eu lieu à Strasbourg, Clermont-Ferrand, Grenoble, et donné lieu à des heurts à Rennes ou Lyon.

Certaines villes ont reconduit les rassemblements dès aujourd’hui. Les syndicats ont annoncé 5000 manifestants à Rennes, 2600 selon la préfecture. Pour ce soir, des appels à se rassembler tournent dans plusieurs villes, dont un à 18h place de la Concorde à Paris.

 

49-3 jeudi, blocage vendredi

 

Comme depuis le début de la semaine, des blocages ont eu lieu en différents lieux du territoire au lendemain de l’utilisation de l’article 49-3. Si le plus visible reste celui, coordonné en plusieurs points, du périphérique parisien, les cibles industrielles n’ont pas manqué ce matin. Par exemple : les dépôts pétrolier de Saint-Nazaire, Port-la-Nouvelle et de Vern-sur-Seiche près de Rennes, les plateformes de tri du courrier à Bourges et Nantes, le port de Brest, un incinérateur à Fos-sur-Mer ou encore deux dépôts de bus à Clermont-Ferrand.

Dans le même temps, la contestation grossit chez les étudiants. Le syndicat étudiant l’Alternative comptabilisait 55 université ou écoles bloquée, occupées, ou dans lesquels les cours sont annulés ou remplacés par des temps collectifs de formation en lien avec la mobilisation.

 

Deux raffineries bientôt à l’arrêt ?

 

C’est une montée d’un cran à laquelle rechignait les grévistes jusque-là. Mais 49-3 leur a fait passer le pas. En reconductible depuis le 7 mars, les salariés de la raffinerie Total de Normandie, première raffinerie de France, ont décidé hier soir la mise à l’arrêt des activités de raffinage. Une opération longue et complexe. Elle devrait être suivie par la raffinerie Petroineos de Lavéra (Bouches-du-Rhône), d’après Olivier Mateu, secrétaire générale de l’union départementale CGT 13.

 

Réquisitionner les éboueurs, ça prend du temps

 

Gérald Darmanin, que l’on retrouve au devant de la scène depuis que la mobilisation se durcit, tient à rassurer : les réquisitions sont en cours. Mais alors que le cap des 10 000 tonnes d’ordures non ramassées vient d’être franchi à Paris, cette réquisition pourrait prendre plus de temps que prévu.« La préfecture doit être plus occupée à gérer les manifestations spontanées qui ont lieu à Paris depuis l’annonce du 49-3 que la réquisition des éboueurs », sourit François Livartowski, secrétaire général de la CGT services publics. Le syndicaliste sait surtout combien cette réquisition s’annonce complexe à mettre en œuvre. « La maire de Paris a transmis une liste de 4000 noms à la préfecture. Cela fait beaucoup de monde. En plus de ça, les salariés des incinérateurs ne sont pas réquisitionnés et on ne peut toujours pas brûler les déchets », continue-t-il.

 

Sondage : rejet du 49-3 et du gouvernement

 

Selon un sondage Harris Interactive pour RTL, 82% des Français estiment que le recours au 49.3 hier est une mauvaise chose. La conséquence : 71% des sondés souhaitent l’adoption d’une motion de censure et la démission du gouvernement. Dans le même temps, le soutien au mouvement social perdure : 65 % des Français souhaitent que la mobilisation se poursuive.

 

Grève du Bac ?

 

L’idée trotte dans la tête des enseignants grévistes depuis plusieurs semaines. Quatre organisations syndicales enseignantes, le Snes-FSU, SUD Education, FO et CGT Education, appellent à durcir le mouvement contre la réforme des retraites « sous toutes ses formes, y compris par la grève des surveillants ». Ce n’est donc pas un appel franc à la grève reconductible dès lundi, mais un encouragement. Et cela pourrait prendre : déjà, des listes d’enseignants grévistes se composent en interne et les opposants à la réforme comptent leurs troupes.

 

Les syndicats de la SNCF appellent à poursuivre la grève reconductible

 

Les quatre syndicats représentatifs de la SNCF ont appelé ce vendredi à « maintenir la grève » entamée le 7 mars et « à agir massivement le 23 mars » pour s’opposer à la réforme des retraites. La CGT-Cheminots, l’Unsa-Ferroviaire, SUD-Rail et la CFDT-Cheminots invitent également les salariés du rail à « multiplier les actions et initiatives unitaires dès ce week-end dans tous les territoires » après le déclenchement du 49.3 décidé jeudi par le gouvernement.

 

Darmanin met en scène la répression

 

Au total, 310 personnes ont été interpellées jeudi en France dont 258 à Paris à l’issue de manifestations spontanées. Les force de l’ordre ont délogé deux piquets de grève parisiens liés à la grève des éboueurs, expulsé de nombreux barrages routiers et nassé des étudiants qui comptaient manifester.

Mais ce que retient Gérald Darmanin, ce sont les violences des manifestants. « Il y a eu dans plusieurs grandes villes de province une pression extrêmement forte exercée contre les symboles de l’État et des permanences parlementaires », a déclaré le ministre de l’Intérieur. Une victimisation dont la ficelle : justifier la répression, est bien grosse.

 

Motion de censure déposée

 

Peu après 14h, le groupe centriste LIOT a déposé une motion de censure transpartisane, co-signée par des élus de la Nupes, en riposte au déclenchement du 49.3 pour faire adopter sans vote la réforme des retraites. Si elle était votée par plus de la moitié des députés, elle provoquerait la chute du gouvernement.