Depuis plus de vingt ans, Lyon vit sous la menace récurrente des groupuscules d’extrême droite. Attaques de lieux associatifs, agressions racistes, violences contre des militants, dégradations… la liste de leurs exactions est particulièrement longue. Au moins une centaine répertoriées depuis 2010 par le média indépendant Rue89Lyon.
Une persistance des violences à mettre en parallèle avec l’impunité dont semblent jouir les militants d’extrême droite dans la ville. Dans une enquête publiée ce lundi, Rue89Lyon assure que 70 % de leurs exactions sont restées sans aucune réponse pénale ou policière.
Sur 101 affaires identifiées, 19 ont mené à une condamnation, trois à une relaxe ou à un non-lieu, tandis que six procédures sont encore en cours. «Le reste a été classé sans suite ou n’a pas fait l’objet d’une plainte », écrit le média indépendant à l’issue de son recensement. Parmi celles-ci, Rue89Lyon relate plusieurs affaires troublantes, comme ces trois militants de la CNT roués de coups en 2010 dans le quartier du vieux Lyon. Malgré l’identification par la police de plusieurs suspects, que les trois victimes affirment formellement avoir reconnus, les plaintes ont finalement été classées sans suite.
Même chose pour l’agression d’un adolescent de 16 ans habillé en qamis, place Bellecour en 2015. Le jeune homme, dont la fuite a été filmée par une caméra de France 3, en ressort pourtant avec 30 jours d’ITT, une vertèbre fracturée, une entorse et des contusions. Deux personnes avaient été immédiatement interpellées. Mais les investigations n’ont pas dépassé le stade d’une mise en garde à vue de cinq minutes et d’une audition libre le lendemain, relate le journal. L’affaire est classée au bout de quatre jours. L’un des deux interpellés sera cependant condamné pour l’attaque d’un local du PCF dans les Pentes de la Croix-Rousse quatre ans plus tard.
Même impunité après l’attaque de la librairie libertaire La Plume Noire, en 2021, en plein après-midi, par près de 50 militants d’extrême droite. Et ce, alors que la scène a été filmée par plusieurs voisins, que les victimes ont identifié certains agresseurs et que plusieurs personnes – dont un leader du groupuscule Lyon Populaire – ont été contrôlées par la police en possession d’une cagoule et de gants coqués à proximité de l’attaque. L’affaire est classée sans suite sans que les images de vidéosurveillance ne soient exploitées.
En guise d’explication de la récurrence des classements sans suite, l’enquête de Rue89Lyon pointe un élément central : l’absence de directives claires des pouvoirs publics pour une réponse judiciaire coordonnée. En contre-exemple, le média cite l’attaque de la maison des Passages en novembre 2023, dont l’écho a été national. Ici, l’enquête est confiée à la Sous-direction anti-terroriste (SDAT) et aboutira « à un coup de filet d’une ampleur inédite dans toutes les mouvances d’extrême droite lyonnaise », explique le média. Et finalement à une relative discrétion des groupuscules d’extrême droite à Lyon depuis.
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