Le procès du policier qui a éborgné le syndicaliste Laurent Théron s’ouvre aux assises

Ce lundi s’ouvre un procès rare à la cour d’assises de Paris : celui d’un brigadier-chef, Alexandre M., jugé pour avoir éborgné le syndicaliste Laurent Théron en 2016. Trois jours d’audience sont prévus. Le policier comparaît pour « violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique, ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ».

Rappel des faits : le 15 septembre 2016, alors que les forces de l’ordre dispersent une manifestation contre la loi travail, Alexandre M. jette une grenade de désencerclement, place de la République à Paris. L’explosion atteint l’oeil droit de Laurent Théron, secrétaire médical au sein de l’AP-HP et syndicaliste chez Sud Santé Sociaux. Malgré plusieurs opérations chirurgicales successives, ce dernier en perd définitivement l’usage.

« Il n’y a pas d’esprit de vengeance. Je ne veux pas de prison (…) Envoyer un policier aux assises, c’est déjà une victoire (…) Ce n’est pas une affaire policière mais des affaires », a commenté le premier concerné auprès de nos confrères de Streetpress, avec la volonté de dépasser son cas individuel. Pour son avocate Lucie Simon, ce procès pourrait ainsi être : « l’occasion de s’interroger sur la dangerosité des armes utilisées en maintien de l’ordre, des armes qui peuvent mutiler, voire tuer. »

Armes non létales : un projet de société mutilante

 

Très peu de policiers sont jugés aux Assises. Dans ce dossier, plusieurs manquements sont bien connus, rappelle Libération : Alexandre M. était sur le terrain alors qu’il venait tout juste d’arriver au sein de la la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) et n’avait été pas encore formé au maintien de l’ordre. En outre, le brigadier-chef a fait usage d’une grenade de désencerclement sans en avoir l’habilitation. Il l’a également jetée en cloche, et non au ras du sol.

N’attendant « rien de l’institution judiciaire », le collectif Désarmons-les, qui soutient Laurent Théron, a organisé un contre-procès. Des tribunaux populaires se sont tenus le 11 novembre et le 11 décembre. Plusieurs victimes de violences policières et leurs proches y ont pris la parole. « Plus de 66 personnes ont perdu l’usage d’un œil en 25 ans, dont près de 40 au cours du premier mandat de Macron », rappelle le collectif Désarmons-les, qui en a dressé la liste, avec des portraits individuels.