Encore une semaine difficile. Consternation, morosité et angoisse sont de nouveau au programme d’une actu toujours dominée par le coronavirus et le terrorisme. Les rares motifs de satisfaction sont à aller chercher au-delà de nos frontières : au Chili, où la Constitution Pinochet est renvoyée aux poubelles de l’histoire, ou en Pologne, où la puissante mobilisation des femmes contre la quasi-interdiction de l’IVG fragilise le gouvernement.
Crise sanitaire
Confinement bis
Emmanuel Macron a annoncé au cours d’une allocution télévisée un nouveau confinement pour au moins quatre semaines (lire notre article). Contrairement à celui du printemps dernier, les établissements scolaires, les entreprises et les services publics resteront ouverts. Le lendemain, Jean Castex a présenté la mesure à l’Assemblée nationale avant de détailler son contenu lors d’une conférence de presse à 18 h 30.
L’état d’urgence sanitaire prolongé
Rétabli par décret le 17 octobre pour une durée limitée avant un vote nécessaire du Parlement, l’état d’urgence sanitaire a été prolongé. D’abord par l’Assemblée nationale samedi dernier jusqu’au 16 février après des débats houleux, puis par le Sénat, cette fois jusqu’au 31 janvier, mais assorti de quelques limitations, notamment pour une prolongation du confinement au-delà du 8 décembre. Cet état d’exception donne des pouvoirs considérables à l’exécutif.
Nouveau protocole pour les entreprises
Avec l’annonce d’un confinement allégé, Élisabeth Borne a fait savoir jeudi soir que s’appliquerait une nouvelle version du protocole sanitaire en entreprise. Principal enjeu de ces changements : le télétravail. Et enjeu additionnel : le caractère contraignant ou non de cette recommandation d’un travail à distance généralisé. La ministre du Travail a dû s’y reprendre à deux fois jeudi soir. Pas une option, mais une obligation a affirmé Élisabeth Borne : « quand on inscrit une règle dans le protocole, elle devient la traduction concrète de l’obligation de l’employeur d’assurer la santé des salariés, c’est donc une règle qui s’impose à tous ».
Simulacre de protocole sanitaire dans les écoles
Pas de confinement pour les établissements scolaires, mais un passage au niveau 2 du protocole sanitaire. Hormis le port du masque, désormais obligatoire dès 6 ans, les mesures qu’il prévoit restent floues et bien souvent impossibles à faire appliquer : limitation du brassage des élèves, arrivées et départs étalés dans le temps, récréations « par groupes » ou encore aération et ventilation des classes renforcées. La colère gronde chez les enseignants et les principaux syndicats ont déjà posé des préavis de grève pour la période du 2 au 7 novembre.
Pénurie de vaccins de la grippe
Après les masques, les gants et les surblouses : le vaccin de la grippe. Particulièrement recommandé cette année, pour éviter un surengorgement des services hospitaliers au moment de la deuxième vague de covid, la pénurie pointe son nez moins de deux semaines après le lancement de la campagne de vaccination. Selon l’Union syndicale des pharmaciens d’officine, 70 à 90 % des pharmacies n’ont déjà plus de stocks. Des chiffres contestés par le ministère de la Santé qui admet cependant des difficultés.
Attentats
Attentat islamiste à Nice
Trois personnes ont été tuées lors d’une attaque au couteau dans la basilique Notre-Dame-de-l’Assomption à Nice jeudi matin : une femme de 60 ans, un sacristain âgé de 55 ans, ainsi qu’une mère de famille brésilienne de 44 ans. Une équipe de la police municipale est intervenue et a fait feu plusieurs fois sur l’assaillant sans le tuer. Il « s’était avancé vers eux de manière menaçante en criant “Allah Akbar” », a rapporté le procureur antiterroriste lors d’un point presse jeudi soir. Le suspect, un Tunisien de 21 ans, Brahim A. était arrivé en France courant octobre depuis l’Italie. Un homme de 47 ans, soupçonné d’avoir été en contact avec lui a été placé en garde à vue jeudi soir.
Christian Estrosi, maire de Nice, a dénoncé l’attentat et a opportunément rappelé vouloir changer la constitution pour développer la reconnaissance faciale, améliorer son système de vidéosurveillance déjà constitué de 3 800 caméras. Le jeune Tunisien, auteur présumé de l’attaque de jeudi n’était pas fiché en France, selon le ministère de l’Intérieur, ni connu des services de renseignements. Une source du ministère de l’Intérieur italien a indiqué à l’Agence France-Presse (AFP) que l’homme n’avait pas non plus été fiché par le renseignement italien.
Police et armée dans les rues
Le plan Vigipirate est passé au stade urgence attentat. La mesure a été annoncée par Jean Castex, jeudi, quelques heures après l’attentat de Nice. Ce dispositif peut mener à la fermeture des routes, du métro, ou encore à la suspension des sorties scolaires et au confinement des écoles. Gérald Darmanin a également annoncé vendredi le déploiement de 3 500 gendarmes réservistes. Il a ajouté que 3 500 policiers supplémentaires étaient également mobilisés dont 120 envoyés à Nice.
Tensions avec le monde musulman
La déclaration d’Emmanuel Macron affirmant que la France ne renoncerait pas aux caricatures après l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine a provoqué des réactions dans plusieurs pays musulmans. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a jugé que les musulmans européens étaient victimes d’une « campagne de lynchage » et au Bangladesh, 40 000 personnes ont manifesté mardi à Dacca en appelant au boycott des produits français. Un ancien premier ministre malaisien a également déclaré que « les musulmans avaient le droit de tuer des millions de Français ». Mais sa position, surexposée dans les médias français en cette fin de semaine est extrêmement marginale dans le pays.
Les suites de Conflans
Malgré le retour du confinement, l’hommage à Samuel Paty sera maintenu dans les établissements scolaires a confirmé Jean-Michel Blanquer jeudi 29 octobre. La rentrée des élèves sera décalée à 10 h, pour « permettre aux enseignants de se préparer ». Une « séquence pédagogique » sera organisée dans les classes, suivie d’une lecture de « la lettre aux instituteurs et institutrices » de Jean Jaurès et enfin d’une minute de silence.
À la suite de l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine, l’association BarakaCity a été dissoute mercredi 28 octobre en conseil des ministres. Le décret prononçant la dissolution de BarakaCity lui reproche de propager « des idées prônant l’islamisme radical ».
Générations identitaires à Nice. Et à Avignon ?
Un homme de 33 ans suivi pour des problèmes psychiatriques a été tué, jeudi 29 octobre, à Avignon (Vaucluse) par la police alors qu’il menaçait des gens dans la rue avec une arme de poing il portait une parka floquée Générations identitaires. « Nous avons plus affaire à un déséquilibré, qui semble proche de l’extrême droite et a fait des séjours en psychiatrie qu’à un terroriste. Il n’y a pas de revendication », a expliqué M. Guemas, procureur de la République d’Avignon à Mediapart. Comme dans le cas de l’attentat de la mosquée de Bayonne perpétré par un ancien candidat FN en octobre 2019, le parquet national antiterroriste n’a pas voulu se saisir de l’affaire. Plusieurs centaines de personnes participaient en outre à une manifestation organisée par le groupuscule d’extrême droite le même soir à Nice, en réaction à l’attentat du matin.
Crise économique
Hécatombe chez Sodexo
Le géant numéro deux mondial du secteur, a annoncé mardi un projet de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) qui impliquerait la suppression nette de 2 083 postes, soit près de 7 % de ses effectifs. L’entreprise se dit fortement touchée par la crise du Covid-19.
Celio veut fermer plus de 100 boutiques
Ce mercredi 28 octobre 2020, le groupe de prêt-à-porter a annoncé qu’il allait fermer 102 boutiques en France, entraînant la suppression de 383 postes. L’entreprise déclare chercher à « rationaliser » ses effectifs dans une optique de rentabilité financière.
Le plan pauvreté « pansement » de Castex
Pas de revalorisation des minimas sociaux, mais des mesures ciblées. Tel est le choix du gouvernement en matière de lutte contre la pauvreté annoncé samedi 24 octobre par Jean Castex. Matignon chiffre le coût de ces nouvelles mesures à 700 millions d’euros. Parmi elles : la création de 30 000 nouveaux postes d’ici à 2022 dans les structures d’insertion par l’activité économique (IAE) qui accompagnent les personnes les plus éloignées de l’emploi, mais aussi la prolongation de l’aide de 150 euros aux impayés de loyers, mise en place en juin par Action Logement.
Mobilisation sociale
Comment lutter contre le PSE à General Electric
Plus d’un millier de salariés de General Electrics ont défilé dans les rues de Belfort samedi 24 octobre, à l’appel de la CFDT, FO, SUD et la CFE-CGC, pour refuser le démantèlement de certains des sites belfortains ainsi que le PSE annoncé fin 2019 qui supprimait 792 postes de travail. Mais aussi travailler à un nouveau projet industriel de concert avec les acteurs économiques locaux, relate un article paru dans Le Monde. La raison qui a conduit la CGT à ne pas s’associer à cette mobilisation. Mercredi, ce sont des salariés d’un site lyonnais qui débrayaient contre leur PSE. General Electric supprime 1600 emplois en France.
Une grève unitaire le 19 novembre à la RATP
Cinq syndicats de la régie appellent l’ensemble des agents à la grève pour 24 h. Une première mobilisation à la veille de la publication par le gouvernement de décrets de la loi LOM qui organisent les modalités de transfert des personnels de la RATP vers des structures privées. Lire notre article.
Arrêt de travail de 48 h à la raffinerie de Grandpuits
Les salariés de la raffinerie ont voté pour une grève de 48 h avec arrêt des expéditions de carburant mercredi 28 octobre. La grève a commencé jeudi matin à 6 h et prendra fin samedi à la même heure. Total compte mettre fin à ses activités de raffinage sur le site en 2023, remplacées par la production de biocarburants et de bioplastique. Les effectifs de Grandpuits et de son dépôt passeraient de 400 à 250 selon la direction. Une affirmation contestée par les syndicats qui évoquent 700 emplois directs et indirects menacés. Prochaine assemblée générale des salariés le 3 novembre pour décider des suites données à leur mouvement.
Occupation d’un magasin Biocoop
Régulièrement en grève depuis le mois de juillet pour réclamer l’annulation du projet d’ouverture le dimanche de leur direction, des salariés du Biocoop Le Retour à la Terre à Paris ont occupé leur magasin samedi 24 octobre. Les grévistes veulent également des augmentations de salaire et que les demandes de rupture conventionnelle proposées par les salariés soient acceptées.
International
La Constitution Pinochet enterrée
Les Chiliens devaient se prononcer dimanche 25 octobre sur l’abandon de la Constitution adoptée sous la dictature d’Augusto Pinochet en 1980 et sur le mode d’écriture du nouveau texte. Le résultat est sans appel : 78 % des votants ont validé le fait que le Chili se dote d’une nouvelle Constitution et 79 % ont entériné la création d’une Convention constituante, spécialement élue pour cette tâche, plutôt qu’une Convention mixte composée pour moitié de parlementaires. Un signe de défiance persistante vis-à-vis de la classe politique, après le puissant mouvement social de l’an dernier.
Manifestations en séries pour la défense de l’IVG en Pologne
Un petit air de révolution. Les manifestations sont devenues quotidiennes depuis l’interdiction par le Tribunal constitutionnel des avortements en cas de malformation du fœtus. Des défilés doublés d’une grève nationale des femmes très suivie mercredi 28 octobre, après le blocage des villes lundi. Ce vendredi, une nouvelle manifestation est prévue. Cette fois, elle sera nationale à Varsovie avec des femmes venues de tout le pays. Selon un sondage cité par France24, 92 % de la population se déclare opposée à la décision du Tribunal constitutionnel.
Biélorussie : une nouvelle grève générale
L’ultimatum fixé au 25 octobre par l’opposante, exilée en Lituanie, Svetlana Tikhanovskaïa, pour le départ de Loukachenko, n’a pas entraîné la démission du président biélorusse. Malgré une énorme manifestation à Minsk dimanche où plus de 100 000 personnes se sont rassemblées. Le lendemain, pour la première journée de grève générale, la police a procédé à plus de 500 arrestations.
Et aussi
Report des élections TPE
Déjà repoussées une première fois à cause du Covid-19 au mois de janvier 2021, les élections syndicales pour les très petites entreprises (moins de 11 salariés) et les employés à domicile seront encore décalées. Cette fois, le scrutin est prévu entre le 22 mars et le 4 avril a annoncé le ministère du Travail mardi 27 octobre.
Faisons face ensemble !
Si les 5000 personnes qui nous lisent chaque semaine (400 000/an) faisaient un don ne serait-ce que de 1€, 2€ ou 3€/mois (0,34€, 0,68€ ou 1,02€ après déduction d’impôts), la rédaction de Rapports de force pourrait compter 4 journalistes à temps complets (au lieu de trois à tiers temps) pour fabriquer le journal. Et ainsi faire beaucoup plus et bien mieux.