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Le Planning familial de Gironde perd la moitié de ses subventions par l’Agence régionale de santé


Le Planning familial de Gironde annonce un rassemblement devant l’Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine ce vendredi. Et pour cause : l’ARS vient de leur supprimer près de la moitié de leurs subventions. Une coupe sévère, synonyme d’une diminution de leur équipe salariée, de leurs interventions en milieu scolaire et de leur présence zone rurale, à l’heure où la montée des idées réactionnaires et l’ampleur des violences sexuelles exigerait, à l’inverse, un déploiement plus fort des associations féministes. 

 

La nouvelle est tombée en fin de semaine dernière, à quelques jours des résultats des législatives. L’Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine, principale source de financement du Planning familial de Gironde, vient de lui annoncer des coupes sévères de subventions. L’association féministe intervenait jusqu’ici partout dans le plus grand département de France, à partir de deux antennes d’accueil : l’une à Bordeaux et l’autre dans le sud rural de la Gironde.

Habituellement, l’équipe de salariées (7,5 équivalents temps pleins) peut compter sur une subvention annuelle de l’ARS s’élevant de 150 000 à 160 000 euros. « Pour cette année nous avions fait une demande de 176 000 euros, au vu de nos projets prévus dans les mois à venir, et des salaires à payer », retrace la co-présidente de l’association, Annie Carraretto.

Or, l’ARS a tranché la semaine dernière : ce sera 81 303 euros pour cette année. Soit une baisse de 40 % par rapport aux années précédentes. L’équipe tombe des nues. « C’est totalement incompréhensible. Et en rupture totale avec ce qu’il se passait les autres années : ça fait très longtemps que l’on travaille avec l’ARS, que l’on construit nos projets avec eux… » se désole Annie Carraretto.

 

Licenciements économiques

 

« Sans décision immédiate de notre part, l’association se trouvera en cessation de paiement dès le 1er novembre », alertent les co-présidentes du Planning dans un courrier adressé au directeur de l’ARS ce 8 juillet, et consulté par Rapports de Force. « Comme les charges de personnels représentent 68% du budget nous sommes contraintes d’envisager des licenciements de plusieurs de nos salariés », indique ce courrier.

De plus, « nous n’avons pas de fonds en réserve pour payer des licenciements économiques. Est-ce à dire que l’ARS prévoit de piocher dans les 80 000 euros alloués pour les payer ? Ce qui nous enlèvera encore plus de possibilités de financer des projets ? », alerte Annie Carraretto.

Selon la co-présidente interrogée, au minimum deux équivalents temps plein sur sept sont menacés. De quoi restreindre fortement les projets et interventions du Planning dans le département. En premier lieu les interventions dans les établissements scolaires, qui ne seront plus du tout financées par l’ARS.

« L’argument mis en avant est que nous devons mettre en place des programmes « probants », c’est-à-dire qui ont fait l’objet de recherches universitaires pour démontrer leur efficacité », explique la co-présidente du Planning familial. L’association dispose nationalement d’un programme correspondant à ce critère, le ProDAS, élaboré au Canada, et déjà mis en oeuvre dans les Bouches du Rhône. « Mais pour le décliner ici en Gironde, nous avons besoin d’un accord de l’Éducation nationale pour dégager du temps aux enseignants et co-animer avec eux. Or, il n’y a pas de moyens donnés, donc de grosses difficultés d’application. »

 

Moins d’interventions dans les établissements scolaires et en zone rurale

 

Jusqu’ici, le Planning familial de Gironde développait un programme « jeunes relais », qui s’appuie sur l’éducation par les pairs. Des jeunes volontaires, formés, menaient des ateliers tout au long de l’année face à des lycéens, en co-animation avec des membres du Planning. « Cela marchait vraiment bien, c’était l’idéal… Mais c’est désormais exclu par l’ARS », s’attriste Annie Carraretto.

Au-delà des seuls établissements scolaires, c’est toute l’activité du Planning dans les territoires ruraux, déployée à partir de sa seconde antenne dans le sud Gironde, qui risque d’être fortement restreinte. Or, « nous avons tout intérêt, au vu des dernières élections et du vote RN dans la ruralité, à être présentes dans ces territoires », défend Pauline Moszkowski-Ouargli, chargée de communication du Planning Familial.

L’équipe peut compter sur d’autres sources de financement (conseil départemental, municipalités…), y compris en territoire rural, notamment grâce à la Mutualité sociale agricole. « Cela va nous permettre de sauvegarder des parties de notre activité. Mais à l’heure où les demandes sont immenses, dans un territoire rural très grand, on devrait être dans une dynamique de déploiement, non pas de restrictions », abonde Annie Carraretto.

Contactée, l’ARS de Nouvelle-Aquitaine n’a pas répondu, pour l’heure, à nos questions sur ces coupes de subventions.

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« La société attend des réponses et un accompagnement fort sur la santé sexuelle et notamment sur la question des violences sexistes, sexuelles et conjugales, car force est de constater que les faits de violences ne baissent toujours pas en 2024 : un féminicide tous les 2,5 jours ; un enfant qui meurt tous les 5 jours de violences intra-familiales ; un viol ou tentative de viol toutes les 4 minutes… », rappelle les co-présidentes du Planning dans leur courrier au directeur de l’ARS.

Celles-ci réclament une entrevue avec la direction de l’ARS, ce vendredi 12 juillet. Un rassemblement sera organisé, ce jour-là, devant les locaux de l’agence, entre midi et 14h.

Photo : manifestation du Planning familial de Gironde en mars 2023 contre la réforme des retraites.

 

Mise à jour du 10 juillet, 18h50 : Avant le rassemblement de vendredi, l’ARS a reçu, ce mercredi 10 juillet, l’équipe de direction du Planning familial de Gironde a décidé de l’octroi d’une enveloppe supplémentaire. « Pour tenir compte des difficultés de trésorerie risquant de pénaliser son travail en Gironde, l’ARS Nouvelle-Aquitaine a décidé, à titre transitoire, d’allouer 34 000 € à l’association pour lui permettre de poursuivre ses interventions programmées en milieu scolaire (volet prévention), qui s’ajouteront aux 81 303 euros déjà accordés pour les actions menées en faveur de l’accueil, de l’orientation et d’accès à l’IVG », nous écrivent les services de l’ARS. Pour autant, même avec cette rallonge, la subvention de l’ARS reste inférieure à celle de l’an dernier.  

 


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