colère retraites

La colère est toujours là, après 12 journées nationales de mobilisation

Ce jeudi 13 avril, l’intersyndicale appelait à une nouvelle journée interprofessionnelle de grèves et manifestation, à la veille de la décision du Conseil constitutionnel sur la réforme des retraites. Même en repli, avec moins de manifestants sur l’ensemble du territoire, la mobilisation reste alimentée par une colère qui ne faiblit pas.

 

Toutes les conditions étaient réunies pour que la mobilisation soit en baisse ce jeudi. D’abord, du fait des vacances de Pâques dans un tiers des académies, et de la répétition des journées de grèves qui pèsent sur des porte-monnaie déjà amaigris par l’inflation. Ensuite, parce que l’attente de la décision du Conseil constitutionnel vendredi rend moins évidente, aux yeux de nombre de salariés, la possibilité que cette journée du 13 avril infléchisse la position d’un gouvernement inflexible jusque-là. Enfin, parce que l’extension des grèves reconductibles, à partir du 7 mars, n’est pas allée au-delà de quelques secteurs, avant de refluer début avril, avec leur suspension dans les raffineries et chez les éboueurs parisiens.

Et pourtant, cette journée est tout sauf une débandade. Avec environ un tiers de manifestants en moins dans de nombreuses villes par rapport au jeudi 6 avril, elle reste à un niveau largement honorable. À titre d’exemple, égale ou supérieur à la plus forte journée de mobilisation contre la loi travail de 2016 qui avait réuni 390 000 manifestants dans tout le pays. Et ce, malgré trois mois de conflit au compteur et douze journées de manifestation dans les pattes depuis le 19 janvier 2023. Le signe d’une colère qui ne s’altère pas et d’une forme de détermination à ne pas tourner la page d’une réforme rejetée par presque tous.

Ainsi, ce matin, 10 000 personnes ont défilé dans les rues de Nantes, selon les chiffres donnés par la préfecture (25 000 selon les syndicats), contre 15 000 la semaine précédente. Toujours dans l’Ouest, les syndicats annoncent 15 000 manifestants à Rennes et 17 000 à Brest, là où la police en compte respectivement 6500 et 7200. Dans la région Occitanie, la police a compté 9000 personnes à Toulouse et 5000 à Montpellier, quand la CGT en vue 70 000 dans la ville rose et 10 000 dans la métropole héraultaise. À Lyon, l’intersyndicale évoque une participation qu’elle évalue à 22 000 personnes contre 32 000 jeudi dernier. Par contre, dans la capitale, la CGT annonce 400 000 manifestants, soit le même chiffre que la semaine dernière. De son côté la préfecture de police de Paris compte 42 000 manifestants.

 

La police sur les dents contre le retour des blocages

 

« Une charge policière gratuite et dangereuse, qui a blessé plusieurs d’entre nous », dénonce l’union locale CGT d’Aubervilliers. Ce matin, alors que la grève était votée sur ce site de collecte des déchets, les forces de l’ordre sont intervenues violemment pour permettre la sortie d’une poignée de camions-bennes. Sept personnes ont été arrêtées, dénonce le syndicat, alors que la filière déchet entre de nouveau en grève reconductible en région parisienne à compter d’aujourd’hui. Le garage de camions-bennes de Romainville a lui aussi été débloqué par la police, alors que le blocage de l’incinérateur d’Ivry-sur-Seine, sur lequel s’est rendue ce matin la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, n’a pas subi d’intervention policière.

Toujours dans la matinée, ce sont huit manifestants qui ont été interpellés à Paris, après une action symbolique consistant à bloquer, avec des poubelles, l’accès au Conseil constitutionnel, affirme le syndicat Sud-Éducation. Dans le Rhône, la police est également intervenue pour lever deux barrages. L’un devant la raffinerie de Feyzin, l’autre sur l’autoroute A89 près de Tarare. D’autres actions de blocages ou de filtrages routiers se sont déroulées à Brest, Caen, Abbeville, Angers, Chartres ou encore Tourcoing.

 

Moins de grévistes malgré la colère

 

Le moindre nombre de manifestants aujourd’hui – trois mois après les annonces d’Élisabeth Borne du 10 janvier – connaît sa symétrie pour le nombre de personnes en grève. Dans les raffineries qui ont repris le travail ces derniers jours, après un mois de grève, et où la CGT avait appelé à un arrêt de travail de 24 h ce jeudi, 20 % des salariés postés du matin étaient en grève, selon la direction de TotalEnergie. Dans les transports, les perturbations sont moins importantes à la RATP et la SNCF, avec 4 TGV sur 5, 3 TER sur 5 et 1 intercité sur 5 en circulation.

Dans l’Éducation nationale, le ministère estime que 4,66 % des enseignants étaient en grève contre 7,97 % le 6 avril. Toujours de source ministérielle, 3,8 % des agents d’État, 2 % des agents territoriaux et 4,2 % de ceux de la fonction publique hospitalière ont cessé le travail ce 13 avril. Au lieu de respectivement : 6,5 %, 3,9 % et 5,9 % le 6 avril.

Pour autant, de nouveaux rendez-vous sont fixés demain en journée ou en soirée dans de nombreuses villes en attente de la décision du Conseil constitutionnel. L’intersyndicale se réunira dans la foulée pour déterminer les suites de la mobilisation.

 

Photo : Ricardo Parreira