Une centaine de mineurs non-accompagnés vit entre les murs de l’ancien EHPAD des Tourelles, à Toulouse, depuis février 2020. Pourront-ils y rester ? Ce mercredi 27 avril, une audience au tribunal administratif de Toulouse doit trancher.
La pression monte au sein de l’EHPAD des Tourelles, à Toulouse, où près d’une centaine de mineurs non-accompagnés est hébergée depuis deux ans. « La semaine dernière, les jeunes ont reçu la visite d’un huissier », retrace Benjamin Francos, avocat engagé avec deux consœurs (Fiona Zemihi et Fanny Sarasqueta) sur ce dossier. L’huissier leur a notifié une audience au tribunal administratif, ce mercredi, pour statuer sur leur expulsion. Celle-ci fait suite à une requête du centre communal d’action sociale (CCAS), propriétaire du bâtiment.
C’était pourtant la mairie elle-même qui avait ouvert ce lieu, à titre de projet expérimental, il y a deux ans. Son ouverture répondait aux alertes des associations quant aux nombreux mineurs isolés à la rue à Toulouse. Beaucoup se trouvaient en attente de la reconnaissance de leur minorité, donc d’une prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE).
La mairie de Toulouse avait déjà sommé les jeunes de quitter les lieux, début février 2022. Les cadres de partenariat avec les associations « ont été plusieurs fois malmenés », affirmait l’équipe municipale dans un courrier du 25 janvier exposant ses arguments. « Plusieurs événements d’une grave violence sont survenus depuis l’hiver dernier », ajoutait telle. Des jeunes ont été exclus du dispositif suite à ces incidents. Des vigiles ont été déployés les soirs et les week-ends. Mais « le climat ne s’est pas pour autant apaisé », estime l’équipe municipale. Les associations et leurs avocats eux, décrivent des faits de violences isolés, non représentatifs de la centaine de jeunes hébergés.
Des jeunes dans l’impasse du système d’hébergement
Puisque personne n’a quitté les lieux depuis février, la mairie a saisi le tribunal administratif. Une expulsion rendrait l’avenir de ces mineurs non-accompagnés incertain. D’abord, sur le volet de l’hébergement. Beaucoup de ces jeunes sont en recours auprès du juge des enfants pour faire reconnaître leur minorité, après avoir été refusés suite à une première évaluation. Or, cette situation de recours les place dans un entre-deux impossible. N’étant pas jugés mineurs, ils ne sont pas pris en charge par l’ASE. Mais n’étant pas non plus jugés majeurs, ils ne peuvent pas accéder au 115, réservé aux adultes et aux familles.
« Il y a aussi des jeunes déjà reconnus mineurs par le juge des enfants », signale Benjamin Francos. L’État a l’obligation de les protéger. Ces derniers doivent donc être orientés dans une structure de l’ASE, via le dispositif national de répartition des mineurs non-accompagnés. « Mais il y a des retards dans leurs affectations. Alors ils continuent de vivre dans le bâtiment ».
La mairie n’a pas communiqué d’alternative concrète en cas d’expulsion. « On ne sait ni où, ni comment, ni combien de jeunes seront relogés. Cela crée une pression et une angoisse extrêmement forte chez ces derniers », observe Benjamin Francos. « Bon nombre de ces jeunes ont d’importantes problématiques de santé (physique et psychique) nécessitant un suivi qui se rompra une fois exclus du dispositif », déplorait par ailleurs Maya Laporte-Vergnes, de Médecins du Monde, dans un communiqué de l’ONG paru en février. Quant aux adolescents qui ont pu être scolarisés, « cette mise à la rue va évidemment hypothéquer leurs chances de réussite scolaire », y soulignait aussi le collectif Tous-tes En Classe 31.
Crédits photo : capture d’écran Google Maps
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