Journée de grève interprofessionnelle le 19 avril, 1er mai revendicatif, puis grève dans la fonction publique le 22 mai. Trois dates de mobilisation en un mois et des luttes persistantes dans le rail, les universités, la santé ou encore l’aérien. Se dirige-t-on vers un conflit de grande ampleur en ce printemps 2018 ?
La colère est perceptible et des mouvements affectent plusieurs secteurs d’activité ou entreprises en même temps. Les cheminots sont en tête pour la « mère des batailles », celle du rail. Mais à côté ou derrière la SNCF, les universités, la fonction publique, Air France, Enedis, Carrefour, les éboueurs, les Ehpad et l’hôpital connaissent aussi leurs turbulences. Même les retraités touchés par la hausse de 1,7 point de CSG décidée par le gouvernement descendent dans la rue.
Dans ce contexte, la CGT a pris l’initiative d’une journée de grève interprofessionnelle le 19 avril de façon unilatérale. La FSU et Solidaires l’ont rejointe, mais pas les autres centrales syndicales. Cette journée s’annonce plus comme une journée d’agrégation ou de convergence des secteurs mobilisés, que comme une réelle journée interprofessionnelle touchant l’ensemble du monde du travail. « Le 22 mars, la direction de La Poste a annoncé 4 % de grévistes à l’échelle nationale », explique Nicolas Galepides, secrétaire fédéral du syndicat Sud-PTT, pour illustrer la difficulté à étendre la contestation. Ce, malgré des luttes longues et dures à la distribution du courrier, comme à Rennes, en Gironde ou dans les Hauts-de-Seine. Une réalité extensible à l’énergie, où la CGT a déposé un préavis de grève pour trois mois, comme les cheminots, sans pour autant que les débrayages s’enracinent.
Conflits partout, grève générale nulle part !
Pourtant la liste des points de tension s’allonge depuis quelques semaines. La grève est très suivie à la SNCF et plutôt significative dans les universités. Dans la santé, les points de conflits sont nombreux, des urgences aux Ehpad. Autre secteur directement en opposition à la politique sociale du gouvernement, la fonction publique. Les deux journées de mobilisation des fonctionnaires des 10 octobre et 22 mars devant déboucher sur une troisième, le 22 mai. Des conflits opposant ce coup-ci des salariés à leur direction sont également en cours à Air France ou chez Carrefour. Ici pour des revendications salariales, là contre des suppressions d’emplois et réductions de primes. Mais pour l’heure, aucun nouveau secteur d’activité ne semble en mesure d’entrer vraiment dans l’arène sociale.
Ainsi, la date du 19 avril aura une portée limitée. Pourtant, la perception dans la population de l’action du gouvernement s’est modifiée dans un sens défavorable au pouvoir. Selon un sondage effectué pour BFMTV le 22 mars, 74 % des Français jugent sa politique injuste. Une opinion risquant de se renforcer avec les dossiers à venir dans les prochaines semaines. Outre le contrôle accru des chômeurs prévu dans le volet « sécurisation » de la réforme du marché du travail, la ministre de la Santé a avancé l’idée d’un deuxième jour de solidarité pris aux salariés pour financer les Ehpad. Enfin, la communication gouvernementale sur les retraites pointe le bout de son nez avec déjà l’annonce par Emmanuel Macron de la fin de tous les régimes spéciaux. Les cheminots apprécieront la volonté d’apaisement de l’exécutif.
Si pour le moment, les conflits sociaux sont loin de se généraliser, une cristallisation dans les semaines à venir n’est pas totalement exclue. Plusieurs dates balisent déjà le printemps avec un premier mai annoncé comme revendicatif et une journée de grève des fonctionnaires le 22 mai appelée par 8 fédérations de fonctionnaires, dont la CFDT ce coup-ci. Sans compter la potache « fête à Macron », une autre journée se voulant unitaire, fixée le 5 mai unilatéralement par François Ruffin, avec la France insoumise en embuscade.
Photo : Charlotte Montels
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