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Baccalauréat 2019 : Blanquer droit dans ses notes

 

Jean-Michel Blanquer assure depuis plusieurs jours que les résultats du baccalauréat seront communiqués comme prévu vendredi 5 juillet. Pourtant, avec la grève d’une partie des correcteurs, toutes les notes des candidats n’ont pas été transmises, des jurys ont refusé de statuer sur des résultats partiels ou bricolés, dont la légalité pourrait être soumise à interprétation.

 

Le ministre de l’Éducation a beau brandir la menace, peu convaincante, de prélever 10 à 15 jours de salaire, aux quelque 2000 correcteurs du baccalauréat en grève cette semaine, une partie des notes peine à remonter jusqu’aux jurys. Le bac à tout prix, à la date prévue, qui semble être la devise de Jean-Michel Blanquer, ne souffre pourtant aucunement d’une débauche de mesures, parfois un peu étonnantes. Ainsi, en l’absence de notes à certaines épreuves du baccalauréat, le contrôle continu des élèves fera l’affaire. À Dijon, la rectrice a même dit envisager le recours aux forces de l’ordre et le travail de nuit pour parvenir à ces fins.

Mais l’intransigeance gouvernementale bute sur des enseignants mobilisés depuis des mois contre une réforme du lycée et du baccalauréat, très majoritairement rejetée par les premiers acteurs du monde éducatif. « Depuis des mois, nous ne sommes pas écoutés, nous sommes méprisés. Cela augmente notre colère », constate une enseignante en grève. D’où les formes inédites que prend la mobilisation cette année. Face à un exécutif qui impose ses réformes en ignorant les oppositions, la désobéissance s’est invitée, en complément des manifestations et des journées de grève de 24 heures. Au printemps d’abord, avec des refus de notation ou des 20 sur 20 distribués à tous les élèves, puis au moment de la première épreuve du bac avec une grève de la surveillance, et enfin cette semaine par une grève induisant un blocage des notes.

Parmi l’ensemble des académies mobilisées, celle du Languedoc était l’une des premières dans laquelle les jurys de philosophie et de mathématiques devaient délibérer lundi. C’est donc là qu’une cinquantaine de professeurs ont ouvert le bal des « rétentions de notes », avant que le mouvement ne se propage à Paris, Lyon ou Toulouse, où des assemblées générales de correcteurs avaient déjà décidé d’un mouvement de grève à l’approche des résultats du baccalauréat. « Nous ne refusons pas de donner les notes, nous sommes grévistes », précise Valérie, enseignante dans l’Hérault, pour répondre aux accusations d’action illégale mises en musique par le ministère. « Nous avons corrigé nos copies et nous n’avons pas dit que nous ne les rendrions pas », confirme Marion, une autre gréviste. « Ce que nous voulons, c’est être écouté », explique-t-elle.

 

Irrégularités à tous les étages

 

Ce n’est pourtant pas l’option qu’a retenue Jean-Michel Blanquer ni les consignes qui ont été données aux rectorats. Droit dans ses bottes, le ministre entend fournir les notes d’abord, vendredi matin, et peut-être discuter ensuite. Pour atteindre ce résultat, tous les moyens semblent bons. « Des non grévistes nous informent de ce qui se passe dans les jurys », annonce Marion qui fait état de pratiques pour le moins inhabituelles. Comme l’a indiqué le ministre, des jurys utilisent le contrôle continu pour remplacer une note manquante dans une matière. Ainsi, des lycées sont contactés pour connaître les évaluations des élèves. Une rupture scandaleuse du principe d’anonymat des copies prévalant pour tous les candidats, estiment les grévistes.

Mais les pratiques irrégulières ne s’arrêtent pas là. Plusieurs témoignages rapportent que lorsque des jurys ont refusé de statuer, des présidents ou vicee-présidents ont signé seuls les procès-verbaux. Au lycée Joliot Curie de Sète, face à un refus d’écrire sur le procès-verbal la somme des « incidents », des correcteurs ont voté une motion pour faire état des conditions de délibération et d’attribution des notes de leur jury. Toujours dans l’Hérault, un témoignage évoque des notes issues du contrôle continu gonflées substantiellement. « C’est une rupture d’égalité », s’énerve une enseignante. Quant aux élèves absents au bac blanc ou pendant une partie de l’année, le contrôle continu pourrait ressembler à l’attribution de notes au doigt mouillé.

Finalement, derrière ses airs austères, le ministre de l’Éducation ne manque pas de fantaisie. Une extravagance qui semble se confirmer avec ses déclarations en tout début d’après-midi ce jeudi : « Tout va bien ». Réponse demain à 10 heures.