Deliveroo

Deliveroo : nouvelle mobilisation nationale des livreurs le 1er septembre


 

Comme à son accoutumée, la plateforme de livraison de repas a changé la rémunération de ses livreurs pendant l’été. Depuis, ces travailleurs auxquels le statut de salarié n’est pas reconnu, ont lancé des manifestations et des blocages de restaurants dans une douzaine de villes. Nous avons posé trois questions à Jérôme Pimot, un des cofondateurs du Collectif des livreurs autonomes parisiens (CLAP), sur la prochaine date de mobilisation.

 

 

Pourquoi les livreurs de la plateforme Deliveroo se mobilisent-ils depuis la fin du mois de juillet ?

Fin juillet, Deliveroo a décidé de changer sa tarification. Les livreurs ont reçu un mail où il était annoncé qu’une nouvelle tarification allait se mettre en place pour favoriser l’acceptation des longues courses. Celles-ci vont être rémunérées davantage. Par contre, les petites courses vont baisser par un jeu de vases communicants. Maintenant, ce n’est plus la distance, mais la durée qui est comptabilisée. Ils ont découpé les courses en trois catégories. Celles de moins de 10 minutes, celles de 10 à 30 minutes et celles de plus de 30 minutes. Ainsi, une course de six ou sept kilomètres augmente de quelques dizaines de centimes. Par contre, les courtes diminuent de moitié. Dans Paris, où il n’y a que des livraisons courtes ou moyennes, nous sommes passés de 5 € à 2,70 €. Les livreurs se sont rendu compte qu’ils perdaient la moitié de leurs revenus.

Deliveroo avait déjà changé ses rémunérations en 2016, au moment de la faillite de Take Eat Easy. Ils étaient passés d’une tarification horaire à une tarification à la course pour les nouveaux entrants. L’été 2017, ils ont imposé aux anciens de basculer sur ces contrats. C’est à ce moment-là que le CLAP a fait des manifestations. En 2018, ils ont encore changé leur tarification, passant d’un paiement à la course – 5,75 € à Paris et 5 € en province – à un paiement à la distance, parce que Deliveroo allait chercher des courses de plus en plus loin. Nous avons vu les distances s’allonger pour livrer les clients, et de plus en plus de livreurs sont passés au scooter.

La tarification se découpait en trois parties : deux euros pour la prise en charge de la livraison, un euro lorsqu’elle est donnée au client, et entre les deux, un tarif variable à la distance. Cela augmentait de quelques dizaines de centimes la rémunération pour inciter les livreurs à accepter le changement de leurs contrats. Évidemment, les gens ont signé l’avenant. Quelques mois plus tard, cette part variable a diminué et les courses sont passées en dessous des 5,75 € à Paris, atteignant un minimum autour de 4,80 €.

 

Comment est-ce que les manifestations ont commencé ?

Nous nous attendions à ce qu’il y ait des réactions. Le soir même de l’instauration des nouveaux tarifs, Toulouse et Nice se sont mises en grève, suivies le lendemain par Tours et Besançon, puis par Bordeaux et Paris. Nous avons été contactés par des livreurs d’autres villes : Limoges, Strasbourg, Mulhouse, Montpellier, cela a craqué partout. Des conversations WhatsApp entre livreurs ont débouché sur un mouvement, avec des blocages de restaurants pour interpeller les restaurateurs et les clients qui ne sont pas livrés. Les personnes qui animent le mouvement aujourd’hui, nous ne les connaissions pas il y a deux mois.

Ensuite il y a eu des actions dans plusieurs villes un premier samedi, puis un second. Les clients ont été invités à boycotter ponctuellement la plateforme, ce qui a plutôt bien fonctionné d’après nos informations. Nous avons également bloqué les cuisines de Deliveroo qui débitent 200 commandes à l’heure à Saint-Ouen et Courbevoie. La grève a été suivie par 10 % des livreurs dans les petites villes ou les villes moyennes. À Mulhouse et Strasbourg, il m’a été rapporté que près de la moitié des livreurs étaient en grève. Deliveroo ne communique pas. Ils font le mort et attendent que cela se tasse. Ils se disent que les gens vont revenir de vacances en ayant besoin de travailler. Ils minimisent au maximum le mouvement pour rassurer les acteurs de leur modèle, que ce soit les investisseurs ou les commerçants.

 

Que va-t-il se passer le 1er septembre ?

Pour l’instant, nous avons une date de rassemblement place de la République. Le but est de repartir sur les cuisines de Deliveroo. Ils ont créé une usine, même s’ils les louent à des restaurateurs, alors nous bloquons l’usine. Nous perturbons 10 à 15 restaurants en bloquant une seule porte. Cela marche super bien et les livreurs sur les piquets de grève sont soudés. Le 1er septembre est un rebond de ce qui s’est passé au mois d’août. Nous avions décidé de laisser une dizaine de jours fin août pour nous reposer et restructurer le mouvement. Mais aussi pour que les gens aillent travailler un peu et gagnent de l’argent. Cela leur permettait en plus de voir ce que donnaient les tarifs, si cela augmentait ou baissait.

Nous avions convenu que nous frapperions de nouveau à la rentrée parce que ce serait plus impactant par rapport à Deliveroo. Nous allons remettre un coup probablement le dimanche soir pour toucher les particuliers, et le lundi midi pour impacter les entreprises. Pour la suite, je ne fais pas de projections, parce que les livreurs sont des gens volatiles. Nous ne savons pas, mais les gens qui vont rentrer au début du mois de septembre devraient s’apercevoir qu’il y a un problème. Même si, depuis début août, le prix planché de Deliveroo sur les livraisons courtes est passé de 2,60 € à 3,10 €. Cela qui veut dire que nos actions ont déjà eu un petit impact.