CFDT

La CFDT condamnée en appel pour abus de pouvoir

 

La confédération syndicale, dirigée par Laurent Berger depuis novembre 2012, doit verser à son ancien syndicat du commerce (SCID) ainsi qu’à ses ex-responsables la somme de 26 000 € de frais de justices et de dommages et intérêts. La cour d’appel annule également la décision de placement sous administration provisoire du SCID par la CFDT.

 

C’est un jugement qui n’arrive pas vraiment au bon moment. Alors que la CFDT dénonce des violences, porte plainte contre les grévistes qui ont occupé temporairement ses locaux parisiens, affirme son soutien à un système de retraite par points largement rejeté par la population, la centrale de Laurent Berger vient d’être condamnée par la cour d’appel de Paris pour « abus de pouvoir ». En cause, la mise sous tutelle de son syndicat du commerce en Île-de-France en 2015.

L’affaire remonte au mois de mai 2014, quand la fédération CFDT des services place le syndicat sous administration provisoire sur demande de la confédération. Le débat sur l’extension du travail du dimanche et le travail de nuit bat alors son plein. Il aboutira le 7 août 2015 à la publication au journal officiel de la « loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », appelé également « loi Macron ». Un texte fourre, tout composé de 308 articles, qui étend les possibilités d’ouvertures dominicales, libéralise les professions réglementées comme les lignes de transport en autobus (cars Macron), ouvre les examens du Code de la route à des sociétés privées, ou encore modifie la justice prudhommale et certaines règles du licenciement collectif.

 

Non-respect des statuts

 

En conflit ouvert avec sa confédération sur l’ouverture des magasins le dimanche, le syndicat commerce inter-départemental d’Île-de-France (SCID), affilié à la CFDT, va être repris en main par la direction. D’abord via la fédération des services en 2014, puis directement par la confédération le 11 février 2015. Le bureau national confédéral vote alors à l’unanimité la mise sous administration provisoire du SCID, en invoquant l’article 26 des statuts de la CFDT et l’article 48 de son règlement intérieur. Petit problème, ces deux articles ne lui permettent pas cette décision.

C’est ce qu’à tranché la cour d’appel de Paris jeudi 16 janvier : « il ne ressort pas des statuts de la CFDT ni de son règlement intérieur dans sa version en vigueur à l’époque des faits que la confédération avait le pouvoir de mettre un syndicat confédéré sous administration provisoire ou sous tutelle ». Ainsi, l’arrêt considère que « la CFDT a outrepassé les pouvoirs » que lui conféraient ses statuts, et que le SCID « a été victime d’un abus de pouvoir et d’une atteinte à sa personnalité morale ». La cour d’appel donne raison aux ex-responsables du syndicat du commerce qui ont saisi les tribunaux.

« Pour nous neutraliser, Laurent BERGER avait en 2015 mis autoritairement et brutalement notre syndicat, le SCID “sous tutelle”. Nos locaux ont été vandalisés par la CFDT, nos documents confisqués, nos comptes bancaires accaparés notre site internet fermé » écrit le syndicat sur son nouveau site internet. En mars 2015, le patron de la CFDT réclamait à la Banque française de crédit coopératif de « récupérer tout ce qui est la propriété du SCID CFDT et, en particulier, les livres de comptes, carnets de chèques, cartes de crédit, ainsi que les codes d’accès relatifs aux comptes bancaires ».

Si la cour d’appel a annulé la mise sous tutelle et condamné la CFDT à 16 000 € de dommages et intérêts et 10 000 € pour la prise en charge des frais de justice, elle n’a pas accédé aux demandes de remboursements des cotisations pour un montant de 606 964,16 €, réclamées par SCID. Une défaite plus coûteuse politiquement que financièrement pour la CFDT. D’autant que depuis, le syndicat contestataire de ligne confédérale s’est désaffilié de la CFDT. Il est devenu le syndicat commerce indépendant et démocratique. De son côté, la CFDT a modifié ses statuts pour rendre possible une mise sous administration provisoire possible. On est jamais trop prudent.