Vies brisées, carrières cassées, souffrance des familles, conséquences psychologiques, la liste des reproches des anciens salariés de GM&S à l’encontre des deux clients de leur usine est longue. Mi-octobre, ils ont obtenu l’invalidation du plan social ayant conduit à la liquidation de l’équipementier automobile et sa reprise en septembre 2017 par l’entreprise LSI. Cette semaine, ils sollicitent des compensations financières.
« Nous demandons réparation ! » annonce dans un communiqué les anciens salariés de l’usine de La Souterraine dans la Creuse. Ils sont 85 à réclamer avec leur avocat 7,4 millions d’euros à Renault et PSA qu’ils accusent d’être responsables de la faillite de l’ancien équipementier GM&S. Pour obtenir gain de cause, ils ont déposé une plainte au tribunal de grande instance (TGI) de Guéret pour « abus de position dominante » et « responsabilité pour faute ».
« Nous demandons 80 000 euros pour chacun des 85 licenciés et 20 000 euros pour chacun des personnels repris par LSI », précisent-ils. Mais la facture pourrait enfler, d’autres salariés ayant exprimé leur intention de se joindre à la procédure. En réalité, l’entreprise LSI n’a repris que 120 des 277 salariés de l’entreprise GM&S, laissant 157 personnes sur le carreau dans un département où l’emploi est sinistré. Une compensation de 80 000 euros serait probablement la bienvenue pour ceux ne s’étant pas encore joints aux 85 plaignants.
PSA et Renault responsable
Les salariés de La Souterraine reprochent aujourd’hui aux constructeurs automobiles d’avoir orchestré la chute de GM&S en le plaçant en situation de dépendance économique. Depuis la liquidation de leur entreprise, ils n’ont eu de cesse de dénoncer une baisse de charge pour la production de l’usine. Une accusation dont la direction de PSA se défend en argumentant qu’elle est en mesure de prouver qu’elle a honoré ses engagements : les volumes de commande.
Cette question des volumes est au cœur du dossier de liquidation judiciaire de GM&S, intervenue en juin 2017, puis de sa reprise en septembre de la même année. À ce moment-là déjà, les salariés de la Creuse bloquent plusieurs sites de production de PSA pour faire pression sur les constructeurs et le gouvernement. Ils exigent des garanties de niveau de commande de la part de Peugeot supérieur au montant de 22 millions d’euros promis par le groupe automobile. Au second blocage du site de Poissy, les GM&S sont délogés par les forces de l’ordre.
« Renault et PSA ont le pouvoir de vie et de mort sur l’ensemble des sous-traitants et fournisseurs automobiles. Les deux constructeurs ont réduit petit à petit les commandes jusqu’à ce que l’usine ne soit plus rentable », indique Jean-Pierre Mercier, le délégué syndical central CGT de PSA. Pour lui, « ils ont planifié cette fermeture en faisant mourir à petit feu l’entreprise GM&S ». En 2017, les salariés n’ont pas gagné leur combat et 157 salariés se sont retrouvés sans emploi, malgré le conseil de l’époque d’Emmanuel Macron : « certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux d’aller regarder s’ils ne peuvent pas avoir des postes là-bas ». Il faisait référence à une entreprise de fonderie dans le département qui disait avoir des difficultés de recrutement.
Pourtant à ce jour, seulement 31 anciens salariés de La Souterraine ont retrouvé un CDI, selon la CGT. Mais une nouvelle manche s’ouvre avec cette plainte. Les ex-GM&S n’ont pas fini de « foutre le bordel ! »
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