Lundi matin, le tribunal de grande instance de Marseille a rejeté la demande de la société de nettoyage Elior de mettre fin à l’occupation du trottoir de l’hôtel NH Collection par les grévistes. La lutte se poursuit pour les 11 femmes de chambre, tout comme les concerts de casseroles pour dénoncer leurs conditions de travail.
C’est un moment important dans la grève des femmes de chambre débutée il y a 19 jours à l’hôtel quatre étoiles NH Collection à Marseille. Le tribunal vient de leur donner raison sur l’essentiel : leur mouvement de grève ne constitue pas une entrave à la liberté du travail. Le groupe Elior qui a récupéré la prestation pour le nettoyage de l’hôtel du boulevard des Dames, en fin d’année dernière, les avait assignées au tribunal pour se débarrasser de leur présence devant l’établissement. Ainsi, les 11 grévistes sur la quinzaine de salariées assignées au nettoyage sur ce site avaient reçu une convocation remise par huissier pour une audience le 26 avril. Celle-ci avait renvoyé sa décision au lundi 29 avril.
Ce matin à 9 h, le juge des référés n’a pas suivi la demande d’expulsion des grévistes faite par l’employeur. Dans le doute et de manière préventive, le tribunal a tout de même fixé une astreinte de 100 € jour au syndicat CNT-SO organisateur du mouvement, en cas de blocage constaté de l’entrée de l’hôtel. Par ailleurs, le syndicat s’est vu débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive. Pour autant, le moral des femmes de chambre a été regonflé par le jugement. « Ils vont être contraint de négocier avec nous », veut croire Lara, une des deux juristes salariées du syndicat. Pour elle, la société a joué sa dernière carte avec cette procédure.
Depuis bientôt trois semaines, les femmes de chambre réclament le règlement d’heures et de primes non payées, une majoration de 50 % pour les dimanches et un treizième mois. L’hôtel se défausse en renvoyant toute responsabilité vers son sous-traitant. De son côté, Elior refuse catégoriquement toute discussion avec les grévistes en argumentant que celles-ci veulent être accompagnées par la CNT-SO, le syndicat qui les soutient. Pour l’entreprise qui compte 17 000 salariés en France, hors de question de négocier avec ce syndicat non représentatif. Cela fait 19 jours que la situation est bloquée.
Jugement favorable à 9 h, contrôle d’identité à midi
Se dirige-t-on maintenant vers une ouverture de négociations entre les grévistes et le groupe Elior ? Pas certain ! L’obtention d’un treizième mois pourrait donner des idées à d’autres salariés de l’entreprise. En tout cas, immédiatement après le jugement du TGI de Marseille, les grévistes ont repris leur présence visible et bruyante devant l’hôtel NH Collection. Mais malgré le jugement favorable de la matinée, les tracasseries continuent pour les femmes de chambre. En fin de matinée, la police a relevé l’identité de la quasi-totalité des personnes présentes. Selon la juriste du syndicat, les policiers auraient fait état d’une nouvelle procédure : cette fois pour des nuisances sonores.
La CNT-SO en est à son cinquième conflit depuis l’automne dans le secteur du nettoyage à Marseille. Les quatre précédents s’étaient soldés par des victoires rapides. Ce coup-ci, l’entreprise sous-traitante est presque un géant pour ce secteur d’activité. Malgré le soutien d’autres syndicalistes marseillais, de gilets jaunes les samedis, et de voisins dans la semaine, la bataille est plus rude. Cependant, pour le moment, les grévistes restent déterminées et peuvent compter sur la solidarité d’une caisse de grève. De toute façon pour elles, « quitte à ne pas être payées, autant faire la grève », rapporte la juriste du syndicat. Pour les soutenir, en fin de journée, des syndicalistes parisiens du nettoyage ont brièvement investis l’hôtel Ibis de Paris Bastille, dans lequel la société Elior intervient.
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