manifestation féministe 25 novembre

Quels enjeux pour la manifestation féministe du 25 novembre ?


 

Violences sexistes, constitutionnalisation de l’IVG, nouveaux droits dans la sphère du travail. Le mouvement féministe a mis ces sujets au cœur de sa manifestation du 25 novembre.

 

Ce 25 novembre, pour la sixième année consécutive – sauf 2020 – des associations, collectifs et syndicats engagés dans la lutte féministe vont marcher partout en France contre les violences sexistes et sexuelles (VSS). La journée est organisée à l’appel du collectif Nous Toutes (qui organise traditionnellement la manifestation du 25 novembre) et de nombreuses autres organisations, notamment réunies sous la bannière « Grève féministe ». Chaque année, cette journée réunit entre 100 000 et 150 000 personnes dans les rues

Ce 25 novembre 2023, les organisatrices exigent que l’Etat prenne enfin leur lutte au sérieux et mette 3 milliards d’euros sur la table. « Cet argent ne servirait pas seulement à ouvrir des centres d’hébergement pour les victimes de violences. Il permettrait de subventionner les associations, de former le personnel de santé mais aussi le personnel judiciaire et policier » , explique Julie Ferrua, chargée de l’organisation du 25 mars pour Solidaires. Pour l’heure, l’Etat est encore loin du compte puisqu’il a dépensé 184,4 millions d’euros en 2023 pour lutter contre toutes les violences faites aux femmes, soit 0,04 % de son budget. A Paris, le cortège partira à 14 heures depuis la place de la Nation. La manifestation trouvera sa réplique dans plus d’une cinquantaine de villes de France.

 

Les violences sexistes ne faiblissent pas

 

Cette année 118 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-conjoint, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur. Au total, durant les six années de mandat d’Emmanuel Macron, 850 femmes ont été assassinées.

Nous Toutes détaille : 75% de ces féminicides ont été commis au sein de couples. Pour l’association, ils ont rendu plus de 1000 enfants orphelins. 220 000 femmes sont également victimes des violences de leur conjoint ou ex-conjoint chaque année. Ce chiffre ne diminue pas (213 000 par an) tout comme celui des viols ou tentatives de viol, estimé à 94 000 par an. La quasi-totalité des agresseurs sont des hommes (97,3%).

Les personnes issues de minorités de genre, les personnes non hétérosexuelles, ou encore les personnes handicapées sont encore davantage exposées à ces violences. « Une femme en situation de handicap sur 5 a été victime de viol. 50% des lesbiennes et 75% des bi ont été confrontées à des violences dans l’espace public et 85 % des personnes trans ont déjà subi un acte transphobe », rappellent les signataires de l’appel « grève féministe ».

Depuis 2021 et les révélations de #Metoo inceste [ ndlr : et du livre la Familia Grande de Camille Kouchner ] la question des violences sur les enfants est fortement visibilisées dans les cortèges. « Cent soixante mille enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année, en majorité au sein de la famille », continue le communiqué de Grève féministe.

 

Le droit a l’IVG porté dans la manifestation féministe 25 novembre 

 

Cette année, la question de la constitutionnalisation de l’IVG sera portée dans le cortège. En effet, la remise en cause de l’avortement aux Etats-Unis et la montée de l’extrême droite dans de nombreux pays (plus récemment en Argentine ou aux Pays-Bas), a poussé Emmanuel Macron à évoquer la constitutionalisation de l’avortement lors de son discours du 8 mars 2023. Faire rentrer ce droit dans la constitution pourrait le protéger des offensives réactionnaires.

En novembre 2022, des députés de gauche ont tenté, grâce à un accord avec les macronistes, de faire adopter une proposition de loi garantissant « l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ». S’ils avaient réussi à obtenir la majorité à l’Assemblée nationale, le Sénat, à majorité LR avait ensuite remplacé le mot « droit » par celui de « liberté ». Cette initiative, qui doit, après deuxième lecture, être soumise à un référendum a cependant peu de chance d’aboutir.

Dans un tweet du 29 octobre 2023, Emmanuel Macron a donc remis le couvert. Il affirme qu’un projet de loi constitutionnelle sera présenté en Conseil des ministres d’ici la fin de l’année. Et le Président de la République de conclure son tweet par cette phrase : « En 2024, la liberté des femmes de recourir à l’IVG sera irréversible », reprenant le mot liberté cher aux sénateurs.

« Ce qui est important, surtout, c’est que l’on garantisse des moyens pour l’avortement. Ce n’est pas utile de l’inscrire dans la constitution si les structures d’accueil continuent de fermer, si les déserts médicaux se répandent, si on n’a pas accès à la contraception. Sur ce point il nous semble que de parler de liberté et non pas de droit à l’avortement est beaucoup moins contraignant et nous continuerons à nous battre pour que ce soit le mot “droit” qui apparaisse dans la constitution » , détaille Julie Ferrua de Solidaires. « Le 25 novembre nous marcherons pour inscrire le droit à la contraception et à l’IVG dans notre constitution » , affirme le Planning familial dans son communiqué.

 

Des violences sexistes et sexuelles au travail

 

Enfin, nouveauté de ce 25 novembre 2023, toutes les organisations syndicales (CGT, FSU, Solidaires, Cfdt, Fo, UNSA) ont signé un communiqué commun pour combattre les violences sexistes et sexuelles au travail. Deux idées fortes, déjà mises en place dans d’autres pays européens émergents. « En Irlande, le gouvernement a approuvé début septembre 2023 une loi proposant 5 jours de congés payés aux victimes de violences domestiques. C’est quelque chose qu’on pourrait mettre en place en France aussi », explique Julie Ferrua.

Une mesure mise en place en Espagne inspire également les organisations féministes. Dans ce pays, les victimes de violences intrafamiliales ont obtenu un certain nombre de droits comme : le droit à la mobilité géographique et au changement de lieu de travail, l’accès à la retraite anticipée, à la suspension de la relation de travail avec emploi réservé ou encore à la nullité du licenciement.