Vertbaudet

Vertbaudet : une opération digne d’une « milice patronale » contre un syndicaliste CGT


 

Mardi 16 mai dans la soirée, Mohamed, délégué syndical CGT chez Verbaudet, en grève depuis deux mois, a été embarqué dans une voiture par plusieurs hommes. Frappé, gazé, volé puis relâché en pleine nature, il a explicitement été pris à parti pour ses activités syndicales. Une opération digne d’une « milice patronale » pour l’union locale CGT de Tourcoing.

 

« Notre piquet de grève venait d’être détruit par la police et on avait passé la journée en manifestation. En début de soirée, j’apprends par une des déléguées syndicales (DS) de Vertbaudet que Mohamed, lui aussi DS CGT chez Vertbaudet, aurait été violemment embarqué par des policiers en civil, devant ses enfants alors qu’il rentrait chez lui », raconte Samuel Meegens, secrétaire général de l’union locale (UL) CGT de Tourcoing impliqué dans la grève de cette enseigne de puériculture située à Marquette-lez-Lille (59) depuis deux mois.

 

Grève chez Vertbaudet : « votre combat est emblématique de la situation des femmes »

 

Rien d’étonnant a priori pour le cégétiste. « On est habitués à la répression policière depuis le début du mouvement, lundi 15 mai deux militants proches de la CGT avaient déjà été mis en garde à vue. Alors bien-sûr, on a pensé que c’était la police. » Le secrétaire général de l’UL publie alors un premier communiqué dénonçant l’arrestation violente de leur camarade par « des policiers en civil ».

 

« Digne d’une milice patronale »

 

Mais la CGT revient finalement sur cette première version. « Il semblerait qu’on ait plutôt affaire à une milice patronale. Mohamed a été interpelé verbalement en tant que syndicaliste, désigné par ses agresseurs par des mots tels que : “toi le gréviste, toi le délégué syndical”. Dans la voiture, il a été régulièrement aspergé de gaz lacrymogène, on lui a craché au visage, tiré les cheveux et on lui a volé son portefeuille, ne lui laissant que sa carte vitale. Finalement il a été largué dans la nature. L’agression visait clairement à l’intimider », continue Samuel Meegens.

« Forcément, sa famille et sa femme sont sous le choc, ces attaques sont d’une violence sans nom. La femme de Mohamed veut qu’il arrête tout, la grève, le syndicalisme. En revanche, il ne veut pas porter plainte pour l’instant car il a peur des représailles. Évidemment la CGT respecte son choix même si on pense que ce n’est pas forcément la bonne solution selon nous », explique Samuel Meegens.

 

Chez Vertbaudet, une répression inouïe

 

L’agression de ce syndicaliste n’est que le point d’orgue d’une répression mise en place depuis de longues semaines. Lundi 15 mai, deux militants proches de la CGT avaient d’ailleurs été placés en garde à vue pendant plus de 24h pour avoir prétendument « bloqué des marchandises » sur le piquet de Vertbaudet, rapporte Samuel Meegens. De plus, lors de la destruction du piquet de grève mardi 16 mai au matin, une gréviste violentée par les forces de police a dû faire un séjour à l’hôpital. « Elle a des contusions et on lui a posé une minerve », résume le secrétaire général de l’UL Tourcoing.

De son côté, la direction de Vertbaudet a réussi à remplacer les ouvriers grévistes par des intérimaires, sans se faire retoquer par le tribunal. Elle reçoit également des soutiens politiques, comme celui de Brigitte Liso, députée Renaissance de la quatrième circonscription du Nord. Cette dernière a déclaré, le 16 mai dans un communiqué « que la direction de Vertbaudet a eu pour seule priorité la recherche d’une sortie de crise », dénonçant des « élus d’extrême gauche (nldr, les députés insoumis François Ruffin ou encore Ugo Bernalicis sont passés sur le piquet) » qui « instrumentalisent le ressentiment des grévistes ».

 

Un conflit qui dépasse les frontières du Nord

 

« On a l’impression que ce conflit social, où des femmes payées au SMIC relèvent la tête face à un groupe qui fait de gros bénéfices, a dépassé les seules frontières du Nord », soulève Sylvie Vachoux, secrétaire fédérale de la CGT commerce.

Sophie Binet, qui doit rencontrer Elisabeth Borne aujourd’hui à 17h, a d’ailleurs déclaré ce matin sur France Inter qu’elle aborderait le sujet de la grève de Vertbaudet avec la première ministre. La secrétaire générale de la CGT compte « demander » à Elisabeth Borne « de cesser toutes les poursuites contre les grévistes » et « d’ouvrir une médiation nationale avec la direction générale du groupe ».