Victorieux en mai 2014, contre le groupe Unilever, au bout de quatre ans de lutte, les ex-Fralib ont conservé leur usine à Gémenos et crée Scop-TI, leur coopérative. Un autre combat a commencé : celui de la pérennisation de la Scop.
« On s’en sort tous ensemble, ou on perd tous ensemble ». La formule est plus qu’un slogan pour les ex-Fralib, c’est une ligne de conduite. Ils ont gagné contre le groupe Unilever au terme d’une lutte collective de 1336 jours. Pour la Scop, même tarif. Le succès ou l’échec sera celui de tous.
Fort de ce principe, tous les ex-Fralib encore présents à la fin de la lutte et souhaitant participer à l’aventure, ont été embauchés. Ils sont aujourd’hui 42 à y être salariés et passeront bientôt à 46. « Nous avons procédé différemment des entreprises capitalistes en intégrant les salariés en fin de droit, avant la montée en puissance de la coopérative » revendique Olivier Leberquier délégué CGT et directeur général délégué de Scop-TI. Un choix périlleux pour l’équilibre de la société, dont la montée en charge a été contrariée avant même sa création.
Lors de son passage à l’usine en 2012, « Arnaud Montebourg a pris l’engagement d’imposer à Unilever la réquisition de la marque Éléphant », se souvient le syndicaliste. Une promesse vite oubliée. Pire, l’ancien candidat à la primaire socialiste de 2012, devenu ministre du Redressement productif, n’a même pas agité cette menace pendant les négociations en 2013. Une faute impardonnable pour Olivier Leberquier. Avec l’abandon de ce moyen de pression, Unilever a attendu encore un an avant de plier. La signature de l’accord de fin de conflit a eu lieu en mai 2014. Les conséquences ont été lourdes.
Ce temps perdu a contraint les ex-Fralib à créer leur coopérative dans un contexte défavorable. Celui du basculement à droite de la communauté de commune, alors propriétaire pour un euro symbolique des machines. Il leur a fallu guerroyer pour qu’elle les rétrocède aux mêmes conditions et pour obtenir toutes les autorisations. Finalement, la production redémarre en août 2015. Mais, de nombreux ex-Fralib arrivent en fin de droit, rendant leur embauche urgente. De plus, la perte de la marque Éléphant représente plus de 500 tonnes de débouchés en moins.
« Nous nous sommes tout de suite dirigés vers les marques distributeurs. C’était le seul moyen d’avoir rapidement des volumes pour payer les 42 salariés », explique Gérard Cazorla, le président de Scop-TI. Ils fabriquent donc du thé et des infusions pour Système U, Leclers et Intermarché pour un total de 230 tonnes, contre 6000 en rendement maximum à l’époque d’Unilever. Aux commandes d’un outil de production surdimensionné, les Scop-TI font face à un problème de distribution. Ils se sont tournés vers la grande distribution à regret.
En parallèle, ils ajoutent quelques dizaines de tonnes supplémentaires en créant leur propre produit : 1336. « Il faut du temps pour implanter une marque nationale sur tout le territoire ». C’est pourtant sur cette dernière que les coopérateurs ont des marges intéressantes. En 2016, les Scop-TI annoncent un chiffre d’affaires de 1,8 million d’euros, et des difficultés de trésorerie.
« Nous avons fait la démonstration que nous sommes capables de redémarrer et faire tourner une entreprise . Notre objectif est d’atteindre l’équilibre financier au premier trimestre 2018 » rappelle Olivier Leberquier. Pour cela, ils doivent produire 500 tonnes et résoudre un nouveau problème : l’augmentation exponentielle de leur loyer, payé à la communauté de commune. Il est fixé à 300 000 € pour l’année 2017.
Faisons face ensemble !
Si les 5000 personnes qui nous lisent chaque semaine (400 000/an) faisaient un don ne serait-ce que de 1€, 2€ ou 3€/mois (0,34€, 0,68€ ou 1,02€ après déduction d’impôts), la rédaction de Rapports de force pourrait compter 4 journalistes à temps complets (au lieu de trois à tiers temps) pour fabriquer le journal. Et ainsi faire beaucoup plus et bien mieux.