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Des grèves plus nombreuses en France et en Europe en 2023

L’année 2023 a été marquée par une vague inédite de grèves et de conflits du travail à travers l’Europe, même dans des pays traditionnellement calmes sur le plan social. Ces mobilisations s’expliquent principalement par l’écart croissant entre les salaires et l’augmentation du coût de la vie liée à une forte inflation.

 

Plus 71 % de nombre de jours non travaillés en raison des grèves en France en 2023. C’est le chiffre que donne Eurofoud – une fondation communautaire de l’Union européenne qui a pour objet l’amélioration des conditions de vie et de travail – dans un document publié cet été. Dans l’hexagone les grèves contre la réforme des retraites et celles pour des augmentations de salaire se sont additionnées pour atteindre ce résultat.

La principale raison de l’intensification des conflits sociaux en 2023 à l’échelle européenne, alors que ceux-ci étaient en diminution avant la pandémie du COVID-19 : les salaires n’ont pas suivi le rythme de l’inflation. Un phénomène qui n’est pas propre à la France.

 

Tour d’Europe des grèves

 

Aux Pays-Bas, le nombre de grèves a atteint son plus haut niveau depuis 50 ans. La Fédération des syndicats néerlandais (FNV) exigeait une compensation automatique des prix. En Italie, une grève générale nationale impliquant des salariés de tous les secteurs a eu lieu en novembre 2023, en réponse à la loi budgétaire. Les syndicats réclamaient notamment des augmentations de salaire pour faire face à l’impact de l’inflation, en particulier dans les secteurs où domine le travail à temps partiel, saisonnier et l’insécurité de l’emploi. Des emplois souvent occupés par des travailleuses.

Même des pays historiquement calmes sur le front social ont été secoués par des grèves. En Autriche, une semaine de protestation a eu lieu au mois de mai, suivie d’une manifestation massive en septembre pour réclamer la limitation des prix et des hausses de salaire. Au Luxembourg, des grèves dans l’éducation et les transports ont également marqué l’année. De même en Allemagne, les cycles de négociation collective ont été marqués par une hausse importante des conflits. En Norvège, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, le secteur privé a été secoué par une grande grève menée par 23000 membres du de la Confédération des syndicats (LO) et 1300 membres de la Confédération des syndicats professionnels (YS). Son objet : la stagnation des salaires.

Chypre, un pays traditionnellement épargné par les conflits sociaux, a connu le premier arrêt général du travail de son histoire en 2023. Cette grève a été organisée par une coalition de syndicats après l’échec des négociations sur l’accord d’indemnité de vie chère. La Hongrie, quant à elle, a vu les conflits du travail se prolonger au-delà de 2023. Malgré les restrictions législatives sur le droit de grève instaurées en 2022, les enseignants ont continué de protester pour réclamer de meilleures conditions de travail et des salaires plus élevés. Leur mouvement, amorcé en 2022, n’a pas été couronné de succès. Au contraire, le gouvernement hongrois a limité davantage le droit de grève des enseignants.

De son côté, la Tchéquie a connu sa plus grande manifestation syndicale depuis 2013. En Finlande, plusieurs grèves qui ont débuté fin 2023 sous la bannière SeriousGrounds se sont poursuivies en 2024 et comptent parmi les plus grandes grèves politiques de l’histoire du pays. Elles ont perturbé les transports routiers, ferroviaires et souterrains, fermé des garderies et des ports, et paralysé une grande partie de l’industrie finlandaise. Hors de l’Union européenne, la Grande-Bretagne a aussi été marquée, dès 2022, par de nombreuses grèves, dans un contexte de forte inflation.

 

De nombreux secteurs d’activités concernés

 

Les secteurs les plus touchés par les grèves en 2023 ont été ceux liés aux services publics et aux infrastructures essentielles. Le transport a été particulièrement perturbé, avec des grèves signalées dans 20 pays européens. Des cheminots aux pilotes de lignes aériennes, en passant par les employés des compagnies de bus, tous ont protesté contre les conditions salariales et de travail. En Allemagne, les grèves à Deutsche Bahn ont provoqué d’importantes perturbations, tandis que le secteur aérien a été perturbé en Belgique et en Norvège.

Le secteur public n’a pas été en reste. La santé et l’éducation ont vu des mobilisations importantes dans respectivement 11 et 9 États membres. Par ailleurs, Eurofond décompte onze pays dans lesquels des actions syndicales importantes ont été organisées par les travailleurs du secteur manufacturier. En Slovaquie, les salariés de la banque de détail UniCredit Bank ont obtenu une augmentation de salaire de 8 % après une grève.

Face à cette vague de mécontentement social, les gouvernements européens ont dû composer avec les revendications. Si certains pays ont accordé des augmentations salariales allant jusqu’à 25 % dans des secteurs comme l’éducation en Roumanie, d’autres, comme la Hongrie, n’ont pas apporté de réponses aux protestations. Ce contexte social tendu a le plus souvent débouché sur des mesures palliatives, telles que des primes uniques pour compenser l’inflation ou des augmentations limitées des grilles salariales, sans répondre aux aspirations profondes des travailleurs.