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Loi sécurité globale : la restriction des libertés publiques suspendue au Conseil constitutionnel

 

Entre 133 000 et 500 000 manifestants fin novembre contre la proposition de loi sur la sécurité globale, au lendemain de l’agression par des policiers d’un producteur de musique à Paris. Puis des manifestations pendant des mois, surtout en province. Mais finalement le vote par le parlement, ce jeudi 15 avril, d’un texte avec peu de modifications sur le fond. Les défenseurs des libertés publiques se tournent maintenant vers le Conseil constitutionnel.

 

La rue n’a pas gagné, place au Conseil constitutionnel. Les parlementaires ont définitivement adopté ce jeudi la proposition de loi sur la sécurité globale par 75 voix pour et 33 contre, malgré de nombreuses contestations depuis l’automne. Avant sa promulgation, le Conseil Constitutionnel devra rendre son avis sur de nombreuses saisines.

À ce stade, l’article 24, criminalisant la diffusion d’images qui permettraient l’identification de policiers et gendarmes dans la cadre de leurs opérations, a été réécrit. Mais sans changer grand-chose sur le fond. Par ailleurs, l’usage des drones est légalisé dans un champ extrêmement large de situations. Les caméras-piéton et l’usage de la vidéosurveillance sont étendus, sans que des garanties aient été apportées en matière d’utilisation de dispositifs de reconnaissance faciale à partir des images captées. Enfin, les pouvoirs et attributions des polices municipales et des sociétés privées de surveillance sont élargis, pendant que les policiers pourront conserver leur arme de services en dehors de leurs heures de travail.

Rare concession faite aux défenseurs des libertés publiques et aux manifestants mobilisés ces derniers mois : la reconnaissance faciale ne pourra pas être utilisée lors de la captation d’image par drone. De même, les images captées par la police ne pourront pas être diffusées dans les médias ou sur les réseaux sociaux. Mais c’est tout, malgré une énorme mobilisation au lendemain de l’agression violente d’un producteur de musique fin novembre à Paris : entre 133 000 et 500 000 personnes, selon les chiffres de la préfecture ou des organisateurs. Et depuis : des manifestations moindres en taille, mais tout de même significatives, qui se sont poursuivies pendant des mois.

 

Saisines partout, libertés publiques nulle part

 

Avec le vote de la loi, les regards se tournent désormais en direction du Conseil constitutionnel. Les députés d’opposition de gauche saisiront l’institution en début de semaine prochaine, comme ils l’avaient annoncé il y a plusieurs mois. De son côté, le Premier ministre avait indiqué en fin d’année dernière qu’il demanderait son éclairage à propos de l’article 24. Ce, afin de désamorcer les critiques. Mais le Conseil constitutionnel devrait crouler sous les saisines. En plus de ces deux-là, la Coordination nationale contre la loi sécurité globale, qui peine à fixer des rendez-vous nationaux depuis le début d’année, a annoncé ce midi quelle saisirait-elle aussi l’institution. Deux saisines séparées pourraient être déposées. L’une par les syndicats de journalistes, l’autre par d’autres organisations membres de la coordination, tels le Syndicat de la magistrature, le SAF, la LDH, La Quadrature du Net et le DAL.

Enfin, plusieurs collectifs de province se sont entendus pour procéder à des « saisines citoyennes ». Une dizaine d’écrits sont en cours de rédaction pour la fin de la semaine prochaine à Montpellier, Lille, Rennes, Saint-Étienne, ou encore Le Creusot, Perpignan et Nîmes. Une liste qui pourrait encore s’allonger d’une demi-douzaine de villes dans les jours à venir. La réponse du Conseil constitutionnel ne sera pas connue avant le mois de mai, le temps d’étudier l’ensemble des saisines sur un sujet aussi sensible politiquement. Selon sa réponse, la promulgation de la loi interviendra avant l’été.