violences policières

Violences policières : nier, nier, il en restera toujours quelque chose


 

Le ministre de l’Intérieur a fermement condamné ce dimanche les critiques exprimées par la chanteuse Camélia Jordana sur l’action de la police dans les banlieues. Parallèlement, le très à droite syndicat policier Alliance souhaite saisir le procureur de la République. Et ainsi, comme lorsqu’il appelait à manifester devant le local parisien de la France insoumise l’an dernier, fixer ce qui peut être dit ou ne pas dit à propos de la police.

 

Encore et toujours le déni pour le premier flic de France. Réagissant aux propos de Camélia Jordana dans l’émission « On n’est pas couché », Christophe Castaner a twitté : « Non madame, « les hommes et les femmes qui vont travailler tous les matins en banlieue » ne se font pas « massacrer pour nulle autre raison que leur couleur de peau ». Ces propos mensongers et honteux alimentent la haine & la violence. Ils appellent une condamnation sans réserve ». La veille, la chanteuse dénonçait des violences policières racistes et exprimait sa peur de la police : « il y a des milliers de personnes qui ne se sentent pas en sécurité face à un flic, et j’en fais partie ».

Pourtant, en ne retenant que la période du confinement entre le 17 mars et le 11 mai, les cas documentés de violences commises par des agents des forces de l’ordre sont légion. Particulièrement dans les quartiers populaires. Certains ouvrants sur des enquêtes comme à Lille où des insultes racistes ont été enregistrées sur une vidéo prise par le témoin d’une interpellation. Mais aussi dans l’Essonne où deux plaintes différentes ont été déposées pour « violences volontaires aggravées par personne dépositaire de l’autorité publique, en réunion, avec usage ou menace d’une arme ». À Calais, ce sont cinq réfugiés érythréens qui accusent des CRS de violences et de racisme. De façon non exhaustive, d’autres plaintes pour des faits similaires ont été déposées à Aubervilliers, dans le Val d’Oise ou encore suite à une intervention policière à l’Ile-Saint-Denis.

 

« Sérial nieur »

 

Des faits que le ministre de l’Intérieur ne peut pourtant pas méconnaître. D’autant que pour les derniers, ceux de l’Ile-Saint-Denis, Christophe Castaner avait publiquement jugé l’indignation légitime. Ici, des policiers filmés avaient malmené un homme sorti de la Seine. « Un bicot comme ça, ça nage pas », « Haha ça coule, tu aurais dû lui accrocher un boulet au pied », pouvait-on entendre sur les enregistrements. Mais en déclarant à propos de cette affaire « le racisme n’a pas sa place dans la police républicaine », le ministre de l’Intérieur entendait réagir à une « exception ». Et laisser dans l’ombre des agissements bien récurrents.

D’où probablement sa charge contre Camélia Jordana qui par ses propos fait référence à une pratique qui fait système. Un système qui n’a d’ailleurs rien d’une exception française. Pourtant, aujourd’hui comme hier, Christophe Castaner ne veut ni voir ni entendre. Tout au long du mouvement des gilets jaunes, le premier flic de France n’a eu de cesse d’apporter un soutien inconditionnel aux forces de l’ordre. « Je n’accepte pas l’expression violences policières », déclarait-il encore le 16 juin 2019 dans les colonnes du Journal du dimanche. Huit mois après le début du mouvement et malgré les milliers de vidéos et reportages sur le sujet.

Rare inflexion à la doctrine du soutien à la police « quoi qu’il en coûte », depuis son arrivée place Beauvau : un appel au devoir d’exemplarité ou à l’éthique le 13 janvier 2020 lors de ses vœux à la police nationale. Là encore, des violences commises pendant les manifestations contre la réforme des retraites s’étalaient dans les journaux. N’en retenant qu’une, pas réellement la plus grave, celle d’un croche-pied sans raison à une manifestante, il faisait l’impasse sur toutes les autres. Et ainsi, depuis, en matière de violences policières, rien n’a changé.