Ce 26 septembre, un appel à la grève est lancé par trois syndicats de la SNCF. Les cheminots s’opposent à la fois à la liquidation de la filiale Fret SNCF et aux transferts de salariés vers des filiales ou des entreprises privées. Deux faces d’une même pièce : celle de l’ouverture à la concurrence.
C’est un enjeu de taille pour les cheminots, mais aussi pour l’avenir du fret ferroviaire français. Ce mardi 26 septembre, à l’appel des fédérations CGT, SUD-Rail et CFDT, ils entreront en grève. « C’est en quelque sorte la suite du combat contre l’ouverture à la concurrence », synthétise Fabien Villedieu, délégué syndical Sud-Rail à la gare de Lyon. Deux sujets révoltent particulièrement les grévistes : la liquidation de la filiale Fret-SNCF et le transfert de salariés SNCF vers des filiales ou des entreprises privées dans le cadre de l’ouverture à la concurrence des lignes de TER, d’Intercités et de Transiliens. Ces transferts ont déjà commencé en région PACA.
Une Grève contre la liquidation de Fret SNCF
L’alerte concernant la liquidation de la filiale Fret SNCF a été donnée fin mai lorsque les cheminots ont appris que la Commission européenne ouvrait une enquête pour « aide illégale de l’État ». Il est reproché au groupe SNCF d’avoir aidé financièrement sa filiale, déficitaire pendant de nombreuses années. « Bruxelles a considéré que l’aide du groupe public SNCF mettait à mal le principe de concurrence libre et non faussée… et veut que Fret SNCF rembourse l’argent reçu. Sauf que si on fait ça, la filiale fait faillite », assure Fabien Villedieu. En effet, la note est salée : Fret SNCF pourrait rembourser 5,3 milliards d’euros de dette qu’elle a accumulée entre 2007 et 2019 et qui ont été repris par le groupe SNCF, entreprise aux capitaux publics.
Pour éviter d’en arriver là, le ministre des Transports, Clément Beaune, a fait une proposition : Fret SNCF doit s’autodissoudre et être divisée en deux nouvelles filiales. La première serait chargée de la maintenance des locomotives et la seconde de la mise en circulation des trains. Par la même occasion, ces deux nouvelles entités renonceraient à un certain nombre de contrats rentables. La Commission européenne reconnaîtrait alors une « discontinuité économique » entre l’ancienne filiale et les nouvelles, ce qui mettrait fin aux poursuites. « On perdrait le droit de faire des trains combinés pendant 10 ans. Or c’est pratiquement la seule activité qui rapporte de l’argent dans le fret. Évidemment ça pose le problème de la viabilité de l’entreprise ! Les concurrents privés, eux, ne font que du train combiné ! Comme d’habitude : on socialise les pertes et on privatise les profits », déplore Fabien Villedieu.
Le plan proposé par Clément Beaune aurait également le désavantage de faire perdre 500 emplois sur les 5000 que compte Fret SNCF et de tirer une balle dans le pied au développement du fret ferroviaire français, alors même que le gouvernement a pris des engagements pour la décarbonation du transport de marchandises. « Côté cheminot il s’agit de contraindre le gouvernement à mener un réel bras de fer avec la Commission européenne. Pour l’instant, il n’y a aucune volonté de résistance », assène le syndicaliste. D’où la grève du 26 septembre. Toutefois, mobiliser les cheminots sur ce sujet reste compliqué. « Il y a beaucoup de fatalisme chez les cheminots du fret, qui sont déjà passés de 15 000 à 5 000 en dix ans. Les gars voient ça comme une énième réduction d’effectif alors que c’est l’avenir du secteur et de sa gestion par le public qui est en jeu », conclut Fabien Villedieu.
Les transferts commencent
Autre raison de la grève du 26 septembre, les transferts de salariés de la SNCF vers ses filiales voire vers d’autres entreprises privées dans le cadre de l’ouverture à la concurrence des lignes TER, Intercités et Transiliens. Ces transferts ont déjà commencé, notamment en région PACA. Là-bas, 225 cheminots ont été désignés à la fois pour rejoindre l’entreprise privée Transdev ou la filiale de la SNCF, Sud Azur, rapporte le journal La Marseillaise. Ils entraînent des modifications des conditions de travail et de rémunération pour les cheminots. « Le statut des cheminots est encadré par 177 textes réglementaires. En changeant d’entreprise, ils auront 15 mois pour les renégocier. C’est un bond en arrière de dingue », conclut Fabien Villedieu.
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