Les professionnels de la santé et du travail social seront rassemblés devant le ministère ce jeudi 9 octobre, à l’appel de la CGT Santé Action Sociale et de la CGT services publics, de branches de Sud Santé Sociaux et de collectifs de travailleurs. Mais comment se faire entendre du ministère dans la crise politique actuelle, avec un gouvernement à recomposer ? Les militants espèrent peser avant tout sur les luttes locales, là où il reste des marges de manœuvre, tout en donnant un sentiment d’unité aux professionnels rassemblés.
Ce 9 octobre est marqué par une journée de grève dans la santé et le travail social, contre l’austérité budgétaire et pour l’amélioration des conditions de travail. Un rassemblement est prévu ce midi à Paris devant le ministère. Des professionnels et délégations syndicales sont venus de la Bretagne à l’Aquitaine en passant les départements du Nord ou encore de Meurthe-et-Moselle. La mobilisation a été appelée par la CGT suite à son congrès confédéral de juillet. Elle a ensuite été rejointe par des branches départementales de Sud santé sociaux et des collectifs de salariés.
Si certains rendez-vous locaux sont aussi donnés dans d’autres départements (Montpellier, Bayonne, Lyon, Marseille…), la CGT assure que l’un des premiers objectifs est de réunir à Paris pour rompre avec un sentiment d’isolement. « Nous sommes un secteur qui se mobilise énormément, sauf que l’on a le sentiment que chaque lutte est perçue de façon isolée et pas dans une démarche globale de mécontentement et de revendication. Ce sentiment d’isolement pèsent sur les militants », expose Jérémi Prigent, membre du bureau de la CGT santé action sociale. « On avait donc besoin de montrer à tout le monde que, quel que soit l’endroit où l’on a une lutte locale, celle-ci rentre dans un processus général. Que nos propositions et revendications sont les mêmes partout ».
Après une période d’« émulation », la période d’incertitude politique
Les revendications portent sur l’arrêt des fermetures de lits, de services et d’établissements médico-sociaux ; la revalorisation des salaires ; le rehaussement de l’ONDAM (objectif national de dépenses d’assurance maladie) de 8% ; 200 000 embauches dans les hôpitaux, idem dans les Ehpad… « Il y a un nombre affligeant de morts évitables aux urgences, ou encore en néonatalité », rappelle Jérémi Prigent.
La Haute autorité de santé a par exemple révélé en mai que 57% des événements indésirables graves associés aux soins ayant entraîné la mort de nourrissons auraient pu être évités, avec davantage de moyens organisationnels, humains ou de formation. « Les pouvoirs publics doivent assumer : soit on met les moyens, soit on ne soigne pas – auquel cas ce sont eux qui sont responsables de ça, ce n’est pas au médecin de faire le tri », souligne Jérémi Prigent.
La série de mobilisation les 10 et 18 septembre, puis le 2 octobre, ont eu un « effet d’émulation dans nos secteurs grâce aux nombreuses AG », assure le syndicaliste. Dans le travail social et la santé, « de plus en plus de salariés globalisent leurs revendications et leurs problématiques ».
Mais que signifie se rassembler devant un ministère dans lequel aucune équipe n’est en place, vu la crise politique actuelle ? « On a pas trop d’illusions en cette période. Évidemment que c’est compliqué de se faire entendre du ministère dans ces conditions. Et que la décision de Macron peut changer beaucoup de choses », reconnaît Jérémi Prigent. « Tout ce qui découle directement du budget de la sécurité sociale, le point d’indice par exemple, ça va être compliqué à obtenir incessamment sous peu. Mais nos stratégies de revendications ne se limitent pas au national ».
Redynamiser les luttes locales
Il y a en effet les revendications locales, contre les fermetures de services ou réductions de moyens. À ce niveau-là « on a plus de marge de manœuvre avec les directions d’hôpitaux, d’établissements, ou avec les ARS » qui, si elles font face à des pressions budgétaires, restent maîtresses de certains arbitrages. De plus, la CGT espère mobiliser, par cette date du 9 octobre, les associations d’usagers.
Ainsi, la date du 9 octobre redynamise certaines des luttes locales. À Marmande par exemple, l’association d’usagers « Urgences accès aux soins pour tous » donne rendez-vous ce jeudi devant l’hôpital, situé dans un désert médical. « L’hôpital est le navire amiral de tout le territoire. (…) Nous ferons tout pour le conserver et ne pas accepter une réduction des moyens. S’il faut se mettre en travers de la route, on le fera », a ainsi défendu Michel Ceruti, président de l’association, auprès du journal Sud Ouest.
Du côté du travail social, des collectifs de travailleurs sociaux sont actifs dans la mobilisation, notamment la Commission de mobilisation du travail social Île-de-France. Celle-ci appelle ce jeudi matin à se réunir, avant le rassemblement unitiaire de midi, sur un piquet de grève devant le Samusocial de Paris, où les conditions de travail sont vivement dénoncées depuis des grèves successives il y a un an. Les travailleurs sociaux ont par ailleurs un autre rendez-vous de lutte important cette semaine, avec les 13ème rencontres nationales du travail social en lutte qui s’organisent à Marseille ce 11 et 12 octobre.
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