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La grève faiblit à Disney mais « la colère est toujours là »


C’est un mouvement historique. Ce lundi 19 juin, les salariés de Disney ont effectué leur sixième journée de grève en moins d’un mois. Pourtant le mouvement faiblit et ses organisateurs en tirent déjà le bilan. Pour mieux repartir plus tard…

 

Des parades, on en a vu à Disneyland Paris. Mais elles ressemblaient rarement à celles que le parc a pu connaître en ces mois de mai et juin. Plutôt que des costumes de Mickey : des gilets syndicaux. En guise de show : des cortèges de 1000 à 2000 personnes, qui défilent pendant plus de 12 heures. Depuis le 23 mai, le parc d’attractions a connu pas moins de 6 journées de grève et de manifestations.

 

Grève spontanée et massive : que se passe-t-il à Disneyland Paris ?

 

Un mouvement historique pour le premier employeur privé d’Île-de-France (15 000 salariés) à la fois dû au contexte inflationniste, aux mauvaises conditions de travail et au mépris de la direction. Ainsi, le Mouvement Anti-Inflation (MAI), collectif à l’origine du mouvement social et organisé en dehors des syndicats, revendique une augmentation salariale de 200 euros net, le doublement de la rémunération du dimanche, une augmentation des frais kilométriques et la fin des horaires dits « choisis » (voir notre précédent article sur le sujet). Des revendications populaires que les syndicats qui ont rejoint la bataille (CGT, UNSA et CNT-SO) ont largement repris.

 

Décliner avant de rebondir

 

Mais ce lundi 19 juin, le mouvement semble néanmoins sur le déclin. « Il y a eu 300 personnes en manifestation », assure Fabien Bayer, secrétaire général de la CGT Disneyland. « Entre 100 et 200 maximum », « encore moins l’après-midi », comptent quant à eux d’autres participants au défilé du jour. Quel que soit le chiffre, le constat est sans appel : le mouvement est en reflux. C’est que cette sixième journée est aussi la première à n’être pas organisée à l’initiative du MAI. Le collectif a simplement enjoint les salariés à rejoindre la CGT et l’UNSA qui, eux, ont appelé au débrayage.

Quelques jours avant cette journée de grève du 19 juin, le Mouvement Anti-Inflation tirait déjà un premier bilan de la mobilisation, et semblait acter la fin de la séquence chaude de mai-juin. « Nous savions que le combat serait difficile (…) Il aurait fallu que nous soyons encore plus nombreux. Un petit noyau aurait dû partir en grève pour entraîner une plus grande partie des 15 000 salariés (ndlr : en grève reconductible) », écrit le collectif dans un communiqué.

Aurélien*, membre du MAI, complète : « Forcément au bout de 6 journées, le mouvement s’affaiblit. J’y vois au moins trois raisons. Les gens sont fatigués et ont perdu de l’argent, certains ont été déçus par les actions proposées par le MAI, d’autres sont déçus de la récupération syndicale ».

 

Le combat continue

 

La mobilisation n’aura donc pas permis de faire plier Disneyland. « La direction va tenir sa ligne : pas de négociation sur les salaires avant les négociations annuelles obligatoires (NAO), prévues fin août. Mais à ce moment-là, j’espère qu’elle aura en tête les milliers de personnes qui ont débrayé. Et qu’elle sera obligée de le prendre en compte », assène Aurélien*. Pour l’heure, les propositions de la direction ont été prises comme des insultes par les grévistes : une prime de 125€/an et la possibilité de racheter ses jours de congés. Pas lourd pour un groupe qui a engrangé 47 millions d’euros de bénéfices en 2022.

Face à cette fin de non recevoir, « la colère des grévistes est toujours là », estime Aurélien. Et le MAI de conclure, dans son communiqué : « Ces enseignements sont un gage pour l’avenir car nous serons mieux préparés et mieux organisés ». De leur côté, l’UNSA et la CGT se sont réunis en intersyndicale ce 20 juin mais, pour l’heure, n’ont pas annoncé de nouvelle date de mobilisation. « On reste mobilisés, la lutte continue », assure Fabien Bayer.

 

Désaccords stratégiques dans la grève chez Disney

 

Le mouvement de grève chez Disney se conclut également sur des désaccords stratégiques. Le mardi 6 juin, après deux journées de mobilisation particulièrement massives (entre 1000 et 2000 personnes sont descendues dans les rues du parc le 23 et le 30 mai), l’idée de tenter des actions plus bloquantes avait émergé. Après une assemblé générale, une action « barrage filtrant » a été menée le 12 juin. « On était une centaine. On a fait des distributions de tracts au niveau du parking visiteur et dialogué avec les clients. Ça a pas mal ralenti les entrées, c’était plutôt réussi », confie Paul, syndicaliste de la CNT-SO.

Sauf que l’UNSA et la CGT n’ont pas appelé à rejoindre l’action. Voire, l’ont dénigré. Dans un communiqué intitulé « devoir de clarification », l’UNSA a dénoncé une action « pouvant potentiellement ne pas être maîtrisée », et accusé le MAI d’être « politisé ». De son côté, la CGT s’est dit défavorable à cette action, mettant également en avant son propre caractère « apolitique » dans un communiqué.

Après quoi, les deux organisations syndicales ont décidé d’appeler à la grève du 19 juin. Le MAI se sera contenté de relayer l’appel dans son communiqué faisant office de bilan.