Les négociations entre le syndicat des machinistes de Boeing et la direction du groupe doivent reprendre ce mardi 17 septembre, sous l’égide d’une commission de conciliation fédérale. Depuis vendredi dernier, 30 000 ouvriers du constructeur aéronautique et aérospatial sont en grève dans la région de Seattle.
Après l’industrie automobile l’an dernier, où 46 000 travailleuses et travailleurs ont participé à une grève tournante contre les géants du secteur, c’est désormais au tour de l’aéronautique d’être secoué par un mouvement social d’ampleur aux États-Unis. Vendredi 13 septembre, plus de 95 % des 33 000 salariés syndiqués de Boeing se sont massivement mis en grève. Ce mouvement fait suite au rejet, la veille, par les syndiqués (94,6 % des voix), d’un accord d’entreprise négocié entre l’IAM (International Association of Machinists and Aerospace Workers) et la direction du géant de l’aéronautique. Un second vote à 96 % des voix a lui entériné l’entrée en grève sans délai. Elle est effective depuis jeudi dernier à minuit.
Le texte d’accord, initialement présenté par Jon Holden, le président du syndicat IAM, comme « le meilleur contrat que nous ayons négocié dans notre histoire », n’a pas convaincu la base. Celui-ci, dévoilé le dimanche 8 septembre après des semaines de négociation, prévoyait une augmentation de salaires de 25 % sur quatre ans, dont 11 % la première année. Une sorte de point médian entre la première proposition de la direction de Boeing au mois de juillet de 12 % sur quatre ans – selon une source anonyme de l’agence Reuters – et l’exigence initiale du syndicat d’une augmentation de 40 % sur cette même période. L’accord était toutefois largement amoindri par la suppression d’une prime annuelle avoisinant 4 % du salaire.
Enfin, l’immixtion dans le scrutin de Robert Kelly Ortberg, PDG de Boeing, par une lettre ouverte aux employés a eu l’effet inverse de celui escompté. Dans celle-ci, il mettait en garde les travailleurs contre un rejet de l’accord, affirmant que cela les mènerait sur une voie « où personne ne gagne ».
Les revendications salariales au cœur du conflit
Les employés des usines de montage de Renton et d’Everett, dans le nord-ouest des États-Unis, dénoncent un quasi-gel des rémunérations ces dernières années, alors qu’ils ont été confrontés à une inflation galopante, aggravée par une flambée des prix du logement dans cette région historiquement industrielle. Une réalité confirmée par la société d’études Melius Research qui évalue que la rémunération médiane des employés des entreprises de l’aérospatiale et de la défense a augmenté de 12 % entre 2018 et 2023, tandis qu’elle a chuté de 6 % chez Boeing.
D’où leur exigence de 40 % d’augmentation, après plus d’une décennie de pressions de la direction de Boeing sur leurs salaires. Ils réclament également de vraies pensions de retraite, alors qu’un précédent accord en 2016 avait rogné sur leurs assurances médicales et mis fin à leurs retraites à prestations définies, en échange du maintien de la production par Boeing dans la région de Seattle. Alors que les salariés se serraient la ceinture depuis des années, le nouveau patron de Boeing a fait l’acquisition d’une maison à 5 millions de dollar dans la région de Seattle comme le rapporte la presse américaine. L’information n’a pu qu’alimenter la colère des machinistes, tout comme son salaire annuel de 22 millions de dollars.
Les chaînes de montage des avions phares du constructeur, les 737 MAX et 767, sont donc paralysées depuis cinq jours. C’est la première fois depuis 16 ans. Le précédent conflit avait duré 57 jours. Cette fois-ci, alors que la campagne électorale pour la présidence des États-Unis bat son plein, une commission de conciliation a été dépêchée en urgence. Les négociations entre le syndicat des machinistes et la direction de l’avionneur reprennent ce mardi.
Cependant, les salariés de Boeing se préparent à un long conflit. Leur syndicat versera 250 dollars à chaque gréviste à compter de la troisième semaine de grève. En attendant, des travailleurs – notamment chez les nouveaux embauchés – s’organisent pour tenir. Certains mettent fin au bail de leur logement pour retourner vivre chez leur parents, pendant que d’autres prennent un autre travail temporaire ici ou là, explique le média syndical Labor Notes.
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