Palestine

Palestine : plusieurs syndicats se mobilisent pour Gaza ce samedi

Cinq organisations syndicales appellent à une mobilisation intersyndicale en soutien aux Gazaoui·es ce 14 juin. Elles tentent aussi d’agir sur d’autres fronts, en bloquant des livraisons d’armes ou en faisant pression sur la Commission européenne.

Les organisations syndicales ne comptent pas rester de marbre face aux massacres perpétrés par l’armée israélienne à Gaza, et à la situation humanitaire toujours plus désastreuse dans l’enclave palestinienne. Plusieurs d’entre elles (CFDT, CGT, Unsa, Solidaires et FSU) appellent conjointement à un rassemblement pour la Palestine ce samedi 14 juin 2025. La manifestation s’inscrit dans le cadre d’un week-end mondial de mobilisation pour un cessez-le-feu et un accès sans entraves de l’aide humanitaire à Gaza. « On a besoin que les syndicats sensibilisent la population, en particulier les travailleur·ses », estime Boris Plazzi, secrétaire confédéral de la CGT chargé de l’international. Depuis les attaques du 7 octobre 2023, des mobilisations avaient déjà émané des syndicats. « Mais celle-ci est exceptionnelle car l’appel est intersyndical, cette unité-là est importante », estime Linda Sehili, membre de la commission internationale de Solidaires.

« Les habitants de l’enclave palestinienne subissent depuis plus de 600 jours des bombardements indiscriminés, des déplacements forcés et une famine imposée aux civils comme méthode de guerre, rappellent les organisations dans leur communiqué. Le gouvernement israélien exprime des intentions génocidaires avec le silence complice d’une partie des décideurs et sous le regard impuissant de la communauté internationale. » En plus de la situation à Gaza, elles dénoncent la « colonisation à marche forcée » d’Israël en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Face à cette atteinte au droit international, l’intersyndicale somme les dirigeant·es européen·nes d’agir immédiatement.

Cette mobilisation s’inscrit dans le prolongement d’autres actions syndicales en solidarité avec la population gazaouie. « On a toujours été mobilisés sur cette question », assure Linda Sehili, de Solidaires. « Depuis les attentats du 7 octobre, la CGT est dans toutes les mobilisations, au niveau territorial et national », renchérit Boris Plazzi.

Les deux syndicats, mais aussi la FSU ou encore la CFDT sont notamment impliqués dans le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, une coalition d’organisations qui lance régulièrement des appels à rassemblement. Plusieurs syndicats sont aussi actifs dans la campagne Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS). « Par exemple en ce moment, on travaille sur une campagne contre le fonds Amundi, une filiale du Crédit agricole, qui investit dans une entreprise israélienne qui produit des armes utilisées à Gaza », explique Linda Sehili. Les organisations participent aussi à la campagne Stop Arming Israël, composée à l’origine de syndicats palestiniens, et qui vise à mettre fin à la coopération militaire avec Israël tant que l’État ne respectera pas le droit international.

Mais c’est surtout depuis les lieux de travail que les syndicats peuvent exprimer leur engagement solidaire avec Gaza. « Lorsqu’on est implanté dans des usines ou des entreprises qui participent d’une façon ou d’une autre à la guerre à Gaza, il faut qu’on puisse interroger les dirigeants et demander des comptes, insiste Linda Sehili. Tout·e salarié·e peut refuser d’y prendre part ! » Les impacts peuvent s’avérer parfois très concrets, comme en témoigne l’action des dockers de la CGT à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) début juin.

Suite aux révélations du média Disclose sur la livraison de matériel militaire à destination d’Israël depuis le port du sud de la France, les dockers ont bloqué trois conteneurs pour éviter qu’ils n’embarquent pour l’arsenal israélien. Une action saluée par de nombreuses organisations à gauche. « Les dockers à Gênes en Italie, où devait passer le bateau, ont d’ailleurs rejoint la mobilisation », précise Boris Plazzi. Informé·es par leurs collègues français·es, les dockers italien·nes regroupé·es au sein du Collectif autonome des travailleurs portuaires ont organisé un rassemblement à l’entrée du port de Gênes.

La collaboration internationale fait partie intégrante de la lutte des syndicats. Solidaires entretient par exemple des liens réguliers avec le syndicat palestinien des postes (PPSWU), qu’il a notamment invité lors du dernier congrès de Sud-PTT, son équivalent français. La CGT, elle, travaille avec la Fédération générale des syndicats palestiniens. « Il y a quelques semaines, il y avait un rassemblement avec des syndicats du monde entier à Ramallah en Cisjordanie, indique Boris Plazzi. On y était pour exprimer une véritable solidarité internationale. »

Les syndicats israéliens opposés à la guerre ne sont pas oubliés : « On est en contact et on les soutient comme on peut », dit le représentant de la CGT. Le syndicat s’emploie aussi à récolter auprès des syndicalistes et des salarié·es des fonds pour l’UNRWA, l’Agence des Nations unies en charge des réfugiés palestiniens. Autre action qui a porté ses fruits : pendant des mois, les syndicats français se sont mobilisés aux côtés des syndicats européens, des ONG et de certains gouvernements pour faire pression sur la Commission européenne afin qu’elle réexamine l’accord d’association UE-Israël (un traité qui encadre les relations commerciales et politiques entre les deux parties), ce qu’elle a annoncé faire fin mai.

S’il est aujourd’hui difficile pour les syndicats d’agir pour Gaza de façon concrète, notamment à cause du blocus, ils tentent, depuis la France, de faire pression sur les gouvernements et les entreprises comme ils peuvent. « Nous, acteur·rices de la société civile, on ne se taira pas, on ne fermera pas les yeux devant ce génocide, assure Linda Sehili. On continuera à agir dans nos lieux de travail, et ailleurs, pour un cessez-le-feu. »

Agathe Di Lenardo (Cet article a été initialement publié sur Basta!)

Photo : Serge D’Ignazio