[Tribune] Issus du mouvement social, les initiateurs de cet appel ont appris à travailler ensemble lors de la catastrophe de Lubrizol à Rouen. Citoyens indignés, syndicalistes, associatifs, médecins, chercheurs, mobilisés face au Covid-19 dans leurs différents secteurs, ils ont ressenti partout l’exigence de mesures radicales et d’un choc de solidarité contre le Covid-19 et la politique du gouvernement. Ils lancent un appel urgent.
Si nous continuons comme cela, nous allons perdre la bataille contre le Covid-19. Pénurie de masques, de tests, entreprises non indispensables poussées à produire, mais personnels indispensables à la vie non protégée, confinement trop léger, cela suffit. Il faut arrêter. Et Vite.
Nous exigeons du gouvernement et des employeurs publics et privés, l’arrêt immédiat et sans attente de toutes les entreprises non essentielles au fonctionnement solidaire de notre société. La priorité absolue doit être la lutte contre le Covid-19, et pas la recherche du profit. La priorité des priorités est le confinement de tous ceux et celles qui ne sont pas indispensables à cet impératif. Et donc l’arrêt de toutes les activités économiques non indispensables ! Moins le confinement sera strictement appliqué, plus les réanimations seront saturées, et le nombre de morts important !
Nous exigeons du gouvernement des moyens immédiats et massifs pour la santé.
Nous exigeons du gouvernement des moyens immédiats et massifs pour la santé. Les fermetures de lits au nom de l’austérité, les Ehpad abandonnés, l’impréparation gouvernementale face au Covid-19, les mensonges d’État sur l’inutilité des masques et des tests, mettent en danger l’hôpital public et la santé de tous et toutes. Les personnels en sous-effectif et sans masques ne pourront pas tenir le coup face au virus. Nous demandons des dizaines de milliards d’euros pour l’hôpital public, les Ehpad, l’aide à domicile… pour des embauches statutaires massives, pour rouvrir les lits fermés. Une partie de l’appareil productif doit être réorienté d’urgence pour fournir massivement les moyens en masques, tests, appareils respirateurs, lits, gel hydroalcooliques.
Il faut généraliser le port du masque. Il faut généraliser la pratique des tests pour isoler sérieusement les malades, et les traiter dès que les scientifiques auront validé un traitement. Demain, contre une deuxième vague épidémique, nous aurons besoin de vaccins, pas des profits et des brevets de l’industrie pharmaceutique, qui doit être nationalisée sous le contrôle des citoyens, des travailleur.euse.s et des scientifiques. Nous avons aussi besoin de solidarité et d’un transfert massif de moyens vers les peuples du Sud, si nous ne voulons pas qu’une deuxième vague épidémique parte de ces rivages privés de systèmes de santé.
Nous soutenons les salarié.es
Nous soutenons les salarié.es, qui par le droit de retrait ou la grève, exigent d’arrêter les productions non indispensables, ou d’avoir les moyens de protéger leur santé, quand leur travail est utile à la société. C’est sur la base du volontariat, en mettant en sécurité ceux qui sont déjà malades ou qui sont les plus fragiles face au Covid-19, en fournissant massivement masques, gants, gel hydroalcoolique, en formant aux distances de sécurité, aux gestes barrières, en réorganisant la production de manière à limiter au maximum les risques de transmission, que les salarié.es de la grande distribution, de l’Éducation nationale, de l’aide aux personnes âgées, de La Poste, d’EDF… que les petits commerçants, les routiers, les ubérisés pourront être solidaires et protégé.es.
Nous dénonçons sanctions et pressions patronales contre ceux qui exigent des moyens pour ne pas être contaminé.es. Nous soutenons les syndicalistes qui refusent l’Union nationale avec le Medef.
Soignant.es, salarié.es, précaires, nous sommes en première ligne pour combattre le virus, mais c’est pour nous que le confinement est le plus difficile, pour nos enfants que la fracture numérique sera la plus lourde à payer. Nous sommes révolté.es par ces images des premiers de cordée, qui ont pu fuir dans leur maison de campagne, au risque de diffuser le virus. Et comment se confiner quand on est sans domicile fixe, se protéger quand on est entassé.e dans un squat, une prison, un centre de rétention, privé.e de soin, de suivi et de droit ?
Avec les associations humanitaires, dont les bénévoles sont souvent fragiles, nous demandons pour les SDF, les sans-papiers, les mineur.es isolé.es à la rue, l’ouverture immédiate et massive de lieux d’hébergements adaptés, pour un confinement avec suivi médical.
Avec l’observatoire international des prisons, le syndicat des avocats de France, nous demandons qu’un maximum de personnes sorte des prisons françaises surpeuplées, mais aussi la fermeture des centres de rétention.
Avec les associations du droit au logement, nous demandons la réquisition des logements vides.
Avec les associations féministes, nous demandons l’ouverture de moyens d’accueil pour les femmes victimes de violences conjugales, la garantie du droit d’accès à l’IVG.
Avec les personnels de la santé mentale, nous refusons toute discrimination à l’égard des personnes recevant des soins psychiques et la poursuite de ces soins sous les formes les plus appropriées.
Face au Covid-19, mais aussi face à la crise économique qui s’annonce, nous avons besoin de salaires et de revenus à 100 %, d’une revalorisation salariale immédiate pour les soignants et tous les professionnels dont le travail est indispensable, de l’annulation des remboursements de crédit pour les petites entreprises contraintes à la fermeture, pas de revenu inférieur au SMIC. Nous avons besoin d’interdiction des licenciements, de blocage des loyers, de moratoire des dettes, de services publics, de gratuité de la santé, d’abandon définitif de toutes les contre-réformes libérales (retraites, chômage…), des mêmes droits pour tous ! Partage des richesses contre le Covid-19 !
Nous refusons que nos libertés, nos colères soient confinées
Nous voulons être confiné.es, mais nous refusons que nos libertés, nos colères soient confinées. Car c’est par elles que nous exigeons masques, tests et moyens pour la santé. C’est par elles que nous exigeons que la priorité ne soit plus aux profits, mais à la santé, la solidarité, le partage des richesses, la reconversion de la production au service de la lutte contre le Covid-19. C’est pourquoi nous refusons « le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie » qui permet au gouvernement de légiférer par ordonnances, de remettre en cause durablement les droits des salariés, notamment en matière de congés payés, de temps de travail, de repos hebdomadaire ou de liberté de réunion.
Le temps du Covid-19 ne doit pas être un temps de peur, d’exclusion et d’État fort. Mais au contraire un temps de solidarité, d’organisation de la société elle-même, pour imposer et mettre en place nos propres solidarités. Nous ne pouvons pas faire confiance aux gouvernements libéraux qui nous ont plongés dans la crise, celle du Covid-19 ou du dérèglement climatique, qui ont fermé 100 000 lits d’hôpitaux en France, réduit le nombre de médecins, supprimé les CHSCT. Partout, dans nos quartiers, dans les lieux de soins ou les secteurs indispensables, sur le Net, soyons porteur.euses de solidarités concrètes avec nos voisins, nos anciens, les plus fragiles, les malades. Soyons porteur.euses d’exigences, d’initiatives de contrôle et de réorganisation de la société, pour l’urgence sanitaire et sociale.
Nous devons être aujourd’hui à l’image de la société que nous voulons demain. Mobilisé.es contre le Covid-19 ou confiné.es ! Mais debout, solidaires et exigeants. Hier, des milliards d’euros ont été dépensés pour sauver les banques. Aujourd’hui, c’est tout le fonctionnement de notre société qui doit être bouleversé pour sauver la société. Nos libertés, nos espoirs, et surtout nos initiatives vont en décider !
Premiers signataires
Faisons face ensemble !
Si les 5000 personnes qui nous lisent chaque semaine (400 000/an) faisaient un don ne serait-ce que de 1€, 2€ ou 3€/mois (0,34€, 0,68€ ou 1,02€ après déduction d’impôts), la rédaction de Rapports de force pourrait compter 4 journalistes à temps complets (au lieu de trois à tiers temps) pour fabriquer le journal. Et ainsi faire beaucoup plus et bien mieux.