600 000 personnes ont défilé dans près de 250 manifestations pour la journée du grève du 2 octobre, selon l’intersyndicale. Des chiffres en baisse par rapport au 18 septembre. Depuis la précédente journée de mobilisation, deux semaines plus tôt, le pays n’a toujours pas de gouvernement et les éléments du prochain budget ne filtrent qu’au compte goutte.
« On reprend notre souffle », sourit Julien Troccaz, membre du secrétariat fédéral de SUD-Rail. Une boutade pour admettre que la mobilisation de ce 2 octobre est en baisse par rapport à celle du 18 septembre, mais qu’elle pourrait rebondir. « Je n’ai jamais vu une société qui attend aussi impatiemment un budget », assure-t-il. Le cheminot soutient que nombre de ses collègues l’attendent avant de se mobiliser de nouveau. Depuis la démission du Premier ministre François Bayrou, le pays n’a ni gouvernement, ni projet de budget.
Moins de grévistes
Dans ce contexte, les chiffres de grèves sont en recul comparativement à la journée de mobilisation du 18 septembre. Dans les collèges et les lycées, le taux de grévistes passe de 45 % à 27%, selon le SNES-FSU (premier syndicat enseignant). Dans les écoles, la baisse est plus nette : de 30 % à 10 % selon le syndicat majoritaire du premier degré, le Snuipp-FSU. De son côté, le ministère annonce 6,42 % de grévistes dans l’Éducation nationale, même si sa méthode de comptage est contestée.
« La journée est moins forte que le 18 septembre. Ce n’est pas une surprise parce que le 18 était inédit et très fort au regard de la proximité de la rentrée scolaire. Et c’est normal que les taux baissent avec déjà une journée de grève faite par beaucoup d’agents. De plus, le Premier ministre tarde à nommer un gouvernement et les personnels ne voient pas comment les choses se dessinent. Toutefois les remontées du terrain montrent qu’il n’y a pas de décrue de l’adhésion aux revendications », soutient Caroline Chevé, secrétaire générale de la FSU.
Dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale, les ministères annoncent respectivement 3,7 % et 2,35 % de grévistes, contre 7,5 % deux semaines plus tôt.
A la SNCF, l’érosion du nombre de grévistes par rapport au 18 septembre est plus mesurée. « Entre 15 % et 20 % ce 2 octobre pour les agents soumis à l’obligation de se déclarer grévistes 48h en amont (20 % à 25 % pour les roulants), selon Julien Troccaz de SUD-Rail. Ce sera probablement un peu moins de 15% tous personnels confondus, cadres compris. »
A titre de comparaison, le 18 septembre, la direction comptabilisait un total de plus de 20 % de grévistes. Et autour de 15 % le 10 septembre, lors de la journée « Bloquons tout », où seuls la CGT et SUD avaient déposé un préavis de grève.
A la RATP, seul le RER B, également administré par la SNCF, a été perturbé. « Les syndicats représentatifs ont sorti leur communiqué d’appel à manifester le 29 septembre au soir. Les gens l’ont lu le 30… c’était tardif sachant qu’il faut se déclarer gréviste deux jours avant. Cela n’a pas aidé à mobiliser. Tant qu’il n’y aura pas revendication sectorielles sur les salaires et les retraites RATP, il sera difficile de faire sortir les collègues », assure François-Xavier Arouls, co-secrétaire de Solidaires RATP, syndicat non représentatif. Pour rappel, le taux de gréviste avoisinait les 95% chez les conducteurs à la RATP le 18 septembre. Enfin, la mobilisation continue chez les énergéticiens de la CGT sont toujours en lutte pour leurs augmentations de salaire et maintiennent la pression sans que des chiffre nationaux de grève ne soient communiqués.
Des manifestations moins fournies mais conséquentes
Les cortèges ont aussi été moins imposants que lors du 18 septembre. A Paris, la préfecture annonce 24 000 manifestants contre 140 000 pour la CGT. A Marseille, plus de 10 000 personnes étaient présentes dans la manifestation selon nos sources, alors que la préfecture annonce 4000 manifestants et la CGT des Bouches-du-Rhône 120 000.
La mobilisation était aussi en baisse à Lyon, où les syndicats annoncent 12 000 manifestants contre 20 000 le 18 septembre. Même tendance à Rennes où les organisateurs évoquent le chiffre de 10 000, à Caen 8000, ou encore 7500 à Nantes selon Ouest France. Même tendance dans les communes de taille plus réduite. A Brest ils étaient plus de 5000 selon les syndicats, 2500 à Tarbes, 1200 à Laval ou encore un millier à Niort.
Les blocages étaient également en reflux. Seul une cinquantaine de lycées ont été perturbés ou bloqués selon le ministère de l’Intérieur, deux fois moins que lors de « Bloquons tout », selon la même source. Peu d’axes routiers ont été visés ce 2 octobre, contrairement au 10 septembre où les forces de police avaient procédé par le force à de nombreux déblocages. Elément notable : après l’arrestation des membres de la Global Sumud Flotilla par l’armée israélienne, de nombreuses manifestations de soutien sont organisées ce soir dans les grandes villes, notamment par des syndicats. La journée de mobilisation n’est donc pas finie.
Et après la grève du 2 octobre ?
L’intersyndicale ne devrait se réunir qu’après le discours de politique générale de Lecornu, la semaine prochaine. Une nouvelle date, sans budget, sans gouvernement et sans un mouvement qui grossit n’étant pas envisageable. Mais le mouvement connaîtra probablement un rebond dans les semaines à venir, une fois connues les mesures du budget. D’ici-là, « on doit labourer le terrain, ne pas se faire happer par séquence parlementaire. On doit être acteur et non spectateur » explique Julien Troccaz de SUD-Rail.
Stéphane Ortega et Guillaume Bernard
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