grève Stérin

Aix-en-Provence : une première grève « contre Stérin et son monde »

Ce 6 octobre au matin, des salarié·es en charge de l’installation de la « Provence pour le Bien Commun » à Aix-en-Provence, se sont mis en grève. Cet événement, lancé par le milliardaire Pierre-Édouard Stérin, vise à recueillir des fonds pour mener une bataille culturelle d’extrême droite.

« Nous sommes 8 salarié·es de l’équipe “road“, les petites mains qui montons les installations, à s’être mis en grève ce matin », explique Nono*, syndiqué au Stucs (syndicat de la culture et du spectacle de la CNT-SO). Devant le 6mique, salle de concert municipale d’Aix-en-Provence, un piquet a été monté ce 6 octobre 2025. Une banderole « intermittent·es en grève » est déployée et les premiers fumigènes s’allument. Les grévistes projettent de tenir le piquet toute la journée. Sur les coups de 18 heures, une manifestation d’opposant à la « Provence pour le Bien Commun », déclinaison locale des « Nuit du Bien Commun », viendra les soutenir.

Les grévistes sont embauchés par l’entreprise Mimo. Spécialisée dans l’organisation de concerts et d’événements, elle est le prestataire privilégiée de la Fondation La Nuit du Bien Commun pour la tournée. Ce fonds de dotation, lancé par le milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin, organise des soirées de levée de fonds pour financer une bataille culturelle qui promeut les thèmes de l’extrême droite. Si le milliardaire s’est retiré de l’organisation des « Nuits », ces dernières ne se sont pas arrêtées pour autant. Une nouvelle tournée à été lancée le 1er octobre 2025. La première date, à Angers, a déjà donné lieu à une première manifestation d’opposant·es.

« On ne sait pas si on va pouvoir empêcher la Nuit du Bien Commun de se tenir. Car une partie de l’équipe continue à travailler », continue Nono*. Sur la vingtaine de salarié·es mobilisé·es pour monter les installations, une douzaine font partie de l’équipe fixe de Mimo alors que les grévistes sont des locaux embauchés à la journée. « On essaie de les convaincre de nous rejoindre mais c’est plus compliqué pour eux car ils sont engagés sur le reste de la tournée », poursuit le gréviste.

Sur place, un inspecteur du travail vérifie que de nouveaux salarié·es ne viennent pas remplacer les grévistes, ce qui est illégal. Ces derniers se sont rangés derrière le préavis de grève national déposé par la CGT-Spectacle, syndicat majoritaire du secteur. Leurs revendications : l’arrêt immédiat des coupes budgétaires, l’augmentation des salaires, l’amélioration de l’assurance chômage et la continuité de revenu pour les artistes auteurs. Dans leur communiqué du jour, les grévistes et leurs syndicats (CGT-Spectacle, Sud Culture et CNT-SO) dénoncent aussi « les incursions de l’extrême droite dans le secteur culturel ».

« Le 6mique est en régie municipale, avec une mission de service publique. Mais les coupes budgétaires obligent cette salle à aller chercher des financements ailleurs et à privatiser le lieu. C’est comme cela qu’on ouvre la porte à l’extrême droite, qui a les moyens de payer, et qu’on se retrouve à accueillir les nuits du bien commun de Stérin », explique Maxime Séchaud, secrétaire général adjoint de la CGT-spectacle.

La maire d’Aix-en-Provence, Sophie Joissains (UDI), refuse par ailleurs d’annuler l’événement. Dans un réponse à ICI Provence, elle explique : « La ville est là pour accompagner, sécuriser, sûrement pas pour censurer. Je m’y refuse absolument, comme je me refuse à priver les dix associations bénéficiaires de la levée de fonds d’un soutien financier essentiel. »

La grève du jour vient appuyer une campagne intersyndicale intitulée « contre Stérin et son monde, bloquons les nuits du bien commun ». Elle rappelle le rôle de Pierre-Édouard Stérin dans la bataille culturelle : « sa volonté d’investir le champ culturel a pu se démontrer cet été à Moulins (03) lors des “Murmures de la cité“, un mini Puy du fou abreuvé de subventions publiques pour réécrire l’histoire sous forme de roman nationaliste. » Et souligne que les travailleurs ont les moyens de s’opposer à l’extrême droite : 

« Nous devons prendre la mesure de ce qui se joue et construire, à travers un front uni, une réponse claire à la mise au pas de la production culturelle au service de l’extrême-droite. Partout, nous appelons la profession à continuer de se mobiliser contre les politiques d’austérité qui nous précipitent dans les bras de l’extrême-droite. Les lieux culturels ne sont et ne seront pas une porte d’entrée aux idéologies d’extrême-droite. C’est pourquoi nous demandons à nos camarades, travailleur·euses de la culture et du spectacle, et à tou·tes les salarié·es concerné·es par ces évènements, de rejoindre les grèves en cours dans la mesure du possible ou de se rapprocher des organisations syndicales locales pour préparer la riposte. »

Via son projet Périclès (pour Patriotes enracinés résistants identitaires chrétiens libéraux européens souverainistes), Pierre-Édouard Stérin a décidé d’injecter 150 millions d’euros pour financer des établissements privés hors contrat, des associations catholiques radicales, identitaires, ou encore aux partis politiques et médias de droite.