Jeudi, Jean Castex et quatre ministres ont détaillé les annonces faites par Emmanuel Macron la veille. Pendant ce temps des soignants manifestaient un peu partout pour réclamer enfin des lits et des bras. Pour nous ce sont les deux informations qui, mises côte à côte, éclairent le mieux cette semaine. Entre panorama de l’actu de la semaine et infos pointues sur les mouvements sociaux : lisez notre septième récap hebdo !
Épidémie, couvre-feu et autres restrictions
Métro-boulot-dodo
C’est l’annonce de la semaine. Emmanuel Macron a dévoilé mercredi soir l’instauration d’un couvre-feu dans 8 métropoles (Lyon, Grenoble, Lille, Aix-Marseille, Montpellier, Toulouse, Saint-Étienne et Rouen), en plus de l’Île-de-France. Entré en vigueur vendredi soir à minuit et pour quatre semaines, il s’étendra dorénavant de 21 h à 6 h du matin. Ce, afin de maintenir l’activité économique. En milieu de semaine, le gouvernement avait rétabli par décret l’état d’urgence sanitaire. La prolongation de ces mesures à six semaines devra faire l’objet d’une validation par l’Assemblée nationale. Pour les lieux d’études et de travail, rien ne change. Aucune nouvelle mesure à l’exception d’une incitation fortement renouvelée au télétravail.
L’exécutif s’est fixé comme objectif que le nombre de cas d’infection redescende en dessous de 5000 par jour, avec un taux d’occupation des lits en réanimation par des malades du Covid de 10 à 15 %. Pour de plus amples détails sur les mesures : le questions-réponses des décodeurs (Le Monde).
Des vacances quand même
Avant de sauver le soldat Noël, il faut sauver le tourisme pendant la Toussaint. Pas de limitation de déplacement donc pour ces premières vacances scolaires depuis la rentrée. Au contraire. « J’incite les Français à réserver » a exhorté le secrétaire d’État chargé du Tourisme Jean-Baptiste Lemoyne, s’appuyant sur l’engagement des professionnels du secteur à rembourser en cas d’annulation.
Gestion de l’épidémie sous perquisition
Jeudi 15 octobre, les policiers de l’Office anticorruption ont procédé à des perquisitions au ministère de la Santé. Mais aussi aux domiciles d’Olivier Véran, l’actuel ministre de la Santé, Jérôme Salomon, le directeur général de la santé, Édouard Philippe, et des anciennes ministres de la Santé et porte-parole du gouvernement, Agnès Buzyn et Sibeth Ndiaye. Des investigations ont été ouvertes en juillet dernier après que neuf plaintes de particuliers, médecins et associations ont été jugées recevables sur la gestion de la crise du Covid-19.
Épuisement infirmier
L’ordre national infirmier tire la sonnette d’alarme cette semaine. S’appuyant sur des remontées de terrain, il estime que plus de la moitié d’entre eux sont « en situation d’épuisement professionnel ». Une proportion qui a quasiment doublé depuis la crise sanitaire du printemps. Avec pour conséquence qu’un tiers des infirmiers déclarent vouloir changer de métier. En cette rentrée, 34 000 postes sont vacants. Un chiffre en très nette augmentation.
Des masques empoisonnés pour les enseignants ?
Rappelez-vous : à la rentrée scolaire, l’Éducation nationale avait fourni à chaque enseignant cinq masques en tissu de la marque DIM pour lutter contre la propagation du coronavirus. Or, ces masques sont traités à la zéolithe d’argent, un biocide considéré comme toxique pour la santé humaine et l’environnement révèle le média Reporterre. Premier syndicat dans l’enseignement secondaire, le SNES-FSU a demandé qu’une expertise indépendante soit menée (notre article).
Des grèves et des manifestations quand même
Grève et manifestation nationale chez les soignants
Prévue de longue date, la grève des soignants est tombée à pic. Le 15 octobre, ils et elles étaient quelques milliers dans les grosses métropoles, plusieurs centaines dans les grandes villes à manifester pour demander embauches et ouvertures de lits. Quoi de plus normal que d’exiger une véritable politique de santé publique à l’heure où la deuxième vague contraint Emmanuel Macron à instaurer un couvre-feu ? Lire notre reportage à Toulouse.
La recherche dans la rue
De nouvelles manifestations pour réclamer plus de moyens et contre la loi de programmation de la recherche (LPPR) ont eu lieu mardi 13 octobre à Paris et dans plusieurs villes. Dans la capitale, un millier de chercheurs ont battu le pavé. Le texte sera soumis à l’examen des sénateurs les 28 et 29 octobre.
Mobilisation nationale pour les 4 de Melle
Quatre enseignants du même lycée à Melle (Deux-Sèvres), dont trois suspendus depuis le mois de mars étaient convoqués devant des conseils de discipline à Poitiers tout au long de la semaine. Lundi, une mobilisation a rassemblé près d’un millier de personnes devant le rectorat. Lire notre article.
Sous-traitants en grève
En début de semaine, 200 salariés du sous-traitant OMS Synergie à la centrale nucléaire de Gravelines étaient toujours en grève. Ils avaient débrayé une dizaine de jours plus tôt pour dénoncer un nouveau contrat d’annualisation et réclamer une prime ainsi que du personnel supplémentaire. La semaine dernière, ils ont été rejoints par des sous-traitants de Daher.
Grève illimitée à ArcelorMittal
Un mouvement de grève lancé par la CGT touche plusieurs sites français du géant mondial de la sidérurgie. Depuis le 7 octobre, les salariés de Dunkerque et Mardyck réclament une prime de 2 000 euros reconnaissant leurs efforts pendant la crise sanitaire et le maintien de l’intégralité de leur salaire en cas de placement en activité partielle. Cette semaine, ils ont été rejoints par les salariés du site de Florange qui ont mis en place une caisse de solidarité pour les grévistes.
Plans sociaux, régression sociale, etc.
« Départs volontaires » chez Airbus
« Il n’y aura pas de licenciements secs » assurait le 12 octobre le syndicat Force ouvrière, majoritaire chez l’avionneur. Sur les 5000 suppressions d’emplois annoncées par Airbus au début de l’été, 1500 seront transformées en placement en activité partielle de longue durée (APLD). Lundi, les syndicats FO, CFE-CGC et CFTC signaient deux accords en un : le PSE concernant 5000 personnes et l’APLD. En plus du placement en activité partielle de longue durée pour 1500 salariés, les départs anticipés à la retraite seront plus nombreux. Pour autant, si les départs volontaires sont « insuffisants », de nouvelles discussions s’ouvriront avec Airbus pouvant aboutir à des licenciements secs, en plus des départs « volontaires ».
Retraites à Cor et à cri
Ce sera finalement 25,4 milliards d’euros de déficit en 2020, au lieu de 29,4 milliards imaginés en juin, pour le système de retraite. Jeudi 15 octobre, le Conseil d’orientation des retraites (COR) a rendu sa note d’étape pour faire un état des lieux de la situation financière au Premier ministre. Une commande qui date de l’été et qui arrive sur la table juste avant l’ouverture de discussions à la fin du mois sur l’avenir de la protection sociale, dont les retraites. Sur ce dossier, le gouvernement ne cache pas sa tentation de remettre sa réforme de l’hiver dernier à l’ordre du jour.
Télétravailler plus pour gagner…
Les salariés en télétravail seraient plus productifs qu’en présentiel. C’est une étude américaine menée par des chercheurs de la Harvard Business School et de la New York University qui l’indique. Portant sur l’analyse d’e-mails et d’agendas partagés de plus de 3 millions de salariés US en télétravail, elle note que ceux-ci carbureraient 48,5 minutes de plus par jour. Soit 4 heures de plus par semaine. En France, des négociations entre représentants du patronat et des salariés sont en cours en vue d’un éventuel accord national interprofessionnel (ANI). Un accord que le patronat souhaite non contraignant.
Discrimination et violences
Discrimination à la Caisse d’Épargne
L’information date de la semaine précédente, mais elle reste une première : après avoir mis en demeure la Caisse d’Épargne dans une action de groupe il y a un an, la CGT a assigné en justice la banque pour discrimination à l’égard des femmes mercredi 7 octobre. Une procédure possible depuis 2016 et la loi de modernisation de la justice permettant aux syndicats de mener ce type d’action dans le cadre de discrimination au travail.
McDo harcèle ses employé.es
Après qu’une enquête de Streetpress et Mediapart a recueilli 78 témoignages de salarié.es de McDonald’s victime de sexisme, de harcèlement (dont sexuel) ou encore de grossophobie, une manifestation a eu lieu ce vendredi de McDonald’s France à Guyancourt (78).
Viols et agressions dans l’enseignement supérieur
34 % des étudiant.e.s victimes ou témoins de violences sexuelles, une étudiante sur 20 victimes de viol, une sur 10 victimes d’agression sexuelle. Ce sont quelques-uns des chiffres donnés par l’Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes dans l’Enseignement supérieur dans un rapport publié en début de semaine. Ces résultats proviennent d’un questionnaire auquel ont répondu 10 381 étudiant.e.s de 50 universités, de prépas, de grandes écoles, de BTS ou DUT. Ramenés à une population étudiante de 2,73 millions de jeunes, ces pourcentages sont considérables.
International
Conflit du Haut-Karabakh
Le cessez-le-feu qui devait commencer le week-end dernier, sous le patronage de la Russie, n’a pas tenu. Au contraire, les combats se sont poursuivis et même intensifiés cette semaine entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Un conflit qui a déjà fait 620 morts selon des décomptes partiels en milieu de semaine.
Biélorussie
L’opposante en exil en Lituanie, Svetlana Tikhanovskaïa, a lancé mardi un ultimatum au président Alexandre Loukachenko : s’il n’a pas quitté le pouvoir au 25 octobre, elle appellera à une manifestation monstre ce jour là et à une grève générale le lundi 26 octobre.
Grève de masse en Inde
Quelque 400 000 ouvrières de la cueillette du thé sont en grève depuis le vendredi 9 octobre en Inde. Un mouvement qui touche aussi le Sri Lanka voisin. Lire notre article.
Et aussi
Meurtre sanglant d’un enseignant
Un enseignant d’histoire-géo a été décapité en fin d’après-midi, vendredi 16 octobre, à Conflans-Saint-Honorine (Yvelines), et son agresseur présumé tué par balles par la police dans la ville voisine d’Eragny (Val-d’Oise), quelques minutes plus tard. Le Parquet national antiterroriste (PNAT) a annoncé être saisi. L’enquête a été ouverte pour « assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste criminelle », selon le PNAT. Quatre personnes, dont un mineur, ont été placées en garde à vue.
Commissariat de Champigny-sur-Marne
Trois jours après l’attaque du commissariat de Champigny-sur-Marne avec des mortiers d’artifice, le ministre de l’Intérieur Gérard Darmanin recevait les syndicats de policiers. Avant cette entrevue, le Premier ministre avait déjà annoncé le recrutement de 10 000 policiers avant 2022 et le renforcement de la réponse pénale. Son ministre de l’Intérieur a rajouté dans la besace du gouvernement la création d’une prime pour les 22 000 policiers travaillant la nuit. Puis, jeudi, les syndicats de policier ont été reçus à l’Élysée.
Sarko cumule
Nicolas Sarkozy a été mis en examen pour « association de malfaiteurs » dans le cadre de l’enquête sur le financement de sa campagne électorale de 2007, a annoncé vendredi 16 octobre le Parquet national financier (PNF). C’est la quatrième fois qu’il est mis en cause dans cette affaire depuis mars 2018. Les motifs précédents étant « corruption », « recel de détournements de fonds publics [libyens] » et « financement illicite de campagne électorale ». Il est toujours placé sous contrôle judiciaire.
Faisons face ensemble !
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