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Dans le 93, les enseignants préparent leur rentrée des luttes

Malgré une mobilisation historique pour un « plan d’urgence » dans le 93, la dissolution de l’Assemblée Nationale a privé les grévistes d’interlocuteur et mis un coup de massue à la lutte. En ce début d’année scolaire, à la faveur d’une grève nationale dans l’éducation le 10 septembre, ils et elles ne renoncent pas. Une assemblée générale était organisée ce 5 septembre à Bobigny.

« On se revoit avec des réponses« . C’est ce qu’avait promis la ministre de l’Education nationale, Nicole Belloubet, aux enseignants du 93 (Seine-Saint-Denis) en fin d’année scolaire. Après un mouvement social de plusieurs mois, parfois suivi par plus de 5000 travailleurs et travailleuses de l’éducation (1/6e de l’effectif total du département) et soutenu par de nombreux parents et élèves, rendez-vous était pris le 11 juin.

Malheureusement, la dissolution inattendue de l’Assemblée Nationale, le 9 juin, a remis en cause ce calendrier et a freiné la dynamique de lutte. « On nous dit que les ministres démissionnaires peuvent seulement gérer les affaires courantes. Mais la rentrée dans le 93, ce n’est pas une affaire courante ? Pour continuer la casse du service public, on remarque que personne n’est démissionnaire« , ironise une syndicaliste.

En cette rentrée, les cartes sont donc rebattues. Malgré une victoire de la gauche aux législatives, la nomination de Michel Barnier, issu de la droite conservatrice, au poste de Premier ministre laisse peu d’espoir aux syndicalistes. Déjà, ils se préparent à retourner gagner des moyens pour leur département par la lutte « notre détermination reste intacte », actent-ils dans un communiqué rédigé à l’issue de leur assemblée générale.

Repartir à la bataille ?

Réunie pour une conférence de presse ce 5 septembre, suivie d’une assemblée générale, l’intersyndicale des enseignants du 93 (CGT, FSU, SUD et CNT) entend bien poursuivre le mouvement lancé l’année précédente, et non repartir de zéro. A l’hiver 2023, des questionnaires diffusés par les syndicalistes avaient circulé dans tous les établissements scolaires publics du département pour établir un bilan chiffré des besoins à hauteur de 358 millions d’euros. Ils avaient aussi permis de prendre la température auprès des collègues et de préparer une grande mobilisation en février 2024.

En cette rentrée, de nouveaux questionnaires ont été diffusés dans les 1100 établissements du 93. Ce 5 septembre, l’intersyndicale en fournit une première analyse à la Bourse du travail de Bobigny. Dans la foulée se tient une assemblée générale de rentrée. Elle est liée à la grève nationale de l’éducation du 10 septembre dans le premier degré contre la généralisation des évaluations nationales. « L’occasion de demander aux collègues ce dont ils ont envie« , confie-t-on.

La mobilisation de l’année scolaire précédente dans le 93 compte aussi quelques victoires, comme celle, menée en interne, contre la mise en place du « choc des savoirs« . Un des slogans des grévistes du 93 était « contre le choc des savoirs, pour le choc des moyens« , rappelle Tony Tremblay du SNES-FSU 93. Voulu par Gabriel Attal et publié au journal officiel le 17 mars, l’arrêté dit « du choc des savoirs » détaillait la mise en place de groupes de niveau au collège. Or, selon le questionnaire réalisé par l’intersyndicale, seuls 8% des établissements disent avoir appliqué un trie des élèves. « Une lutte a été menée en interne pour imposer une organisation pédagogique contraire. Un rapport de force a été construit avec les conseils d’administration et les directions. Même si on n’a pas gagné dans la rue, on a mis en échec le tri des élèves« , continue-t-il.

Toujours un manque criant de moyens

Les retours de questionnaires, qui concernent 1100 établissements dans le 93, continuent de démontrer le manque de moyen dans le département en matière d’éducation.

Dans le 1er degré, 1050 postes d’enseignants sur 2290 n’ont pas été pourvus aux concours. « Ce qui est un acquis du mouvement« , estime une syndicaliste, même si l’intersyndicale demande le recrutement de fonctionnaires et non un « écran de fumée« , permettant une rentrée avec un adulte devant chaque classe. « En cette rentrée, il y a bien un adulte devant chaque classe, mais un grand nombre ne sont pas formés« , comment-t-on. Pour ce qui est de la politique d’inclusion scolaire, le 93 accuse toujours des manques : 56 postes non pourvus en ULIS (Unités localisées pour l’inclusion scolaire) et 23 postes d’ERSEH (enseignants référents pour la scolarisation des élèves en situation de handicap) restent vacants.

Dans le second degré, 600 néo contractuels ont été recrutés dans le secondaire (académie de Créteil), contre à peine 30 lors de la rentrée précédente. Insuffisant malgré tout : il manque au moins un enseignant dans 65% des collèges et 71% des lycées, indiquent les résultats du questionnaire. Pour les syndicalistes, le recrutement de 5000 enseignants dans le 93 est nécessaire.

Pour ce qui est du personnel non enseignant, il manque toujours un/une infirmière dans 60% écoles, 25% des collèges et 29% des lycées. L’intersyndicale estime qu’il faudrait en outre 175 CPE, 650 assistants d’éducation, 320 assistants pédagogiques et 2200 AESH supplémentaires. Le chiffre de 358 millions d’euros pour un « plan d’urgence » dans l’éducation en Seine-Saint-Denis est toujours à l’orde du jour. »On estime qu’un élève du 93 se fait voler 15 mois de scolarité du fait du manque de moyen« , dénonce Louise Paternoster de la CGT Educ’action 93.

Article mis à jour le 06/09 à 9h10, après publication du communiqué de l’intersyndicale.