Ce jeudi 6 mai, la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et les syndicats CGT de Renault ont appelé les salariés à la grève. En mai 2020, le constructeur automobile avait annoncé son projet de supprimer environ 15 000 emplois dans le monde (sur 48 000), dont 4600 en France. Depuis, la direction avance ses pions dans les différents sites de Renault sur fond de politique de désindustrialisation automobile.
En matière de suppression d’emploi, il y a un temps pour tout. D’abord pour les annonces, souvent floues, dont on peine à saisir toute les subtilités et les conséquences concrètes. Puis vient le temps des négociations : on comprend alors à quelle hauteur les différents sites seront impactés, quelles familles en pâtiront les premières.
Chez Renault, ce temps est venu. Charriant avec lui sont lot de grèves et de luttes. Ce jeudi 6 mai, la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et les syndicats CGT de Renault appellent les salariés à faire grève au Mans, où plus de 300 salariés sont mobilisés devant leur usine depuis 5h du matin, et à Douvrin.
Parmi les motifs de mobilisation : les nouvelles ventes de succursales du réseau commercial Renault Retail Group (RRG), la mise en vente de la Fonderie de Bretagne, la fermeture de l’historique usine de Choisy ou encore la transformation de celle de Flins.
Les salariés de Renault dos au mur
Dès le mois de mai 2020, le constructeur automobile avait annoncé son projet de supprimer environ 15 000 emplois dans le monde (sur 48 000), dont 4600 en France. En cause : un recalibrage de l’outil industriel souffrant, selon la direction, d’une « surcapacité ». La réaction provoquée par ces annonces avaient été immédiate : grèves, débrayages et manifestation rassemblant 8000 salariés de Renault à Maubeuge. C’était la première grosse manifestation post confinement.
Depuis, les négociations sites par site sont âpres. La fermeture du site de recyclage de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) est d’ores et déjà annoncée et la fin de l’assemblage de voitures à Flins (Yvelines, 2 600 salariés) laisse penser qu’une fermeture est, là aussi, possible. La direction de Renault tente également de réduire ses effectifs via des ruptures conventionnelles collectives. Sur le site de Cléon (Normandie), 875 salariés sur 3500 y sont éligibles, au Mans, ils sont 377 sur 1870.
Dos au mur, la Fonderie de Bretagne à Caudan, près de Lorient, a lancé une grève reconductible avec occupation du site le 27 avril. La direction de Renault a annoncé qu’elle se désengageait du site et qu’un repreneur devait être trouvé. Une décision inacceptable pour les 350 salariés du site qui souhaitent rester dans le giron de Renault. A l’heure actuelle, la production et la livraison sont toujours à l’arrêt. « Un médiateur a été nommé aujourd’hui, pour qu’on puisse reprendre le dialogue avec la direction de Renault. Cette fois ce sera sur la base de nos revendications : on ne veut pas de repreneur », assure Maël Le Goff , délégué syndical CGT du site.
Crise de l’emploi dans l’industrie automobile
Les suppressions de poste chez Renault ont également des répercussions sur ses entreprises sous-traitantes. A Ingrandes-sur-Vienne, la Fonderies du Poitou a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Paris, cela concerne 280 salariés. Fin septembre, ils avaient aussi lancé une grève illimité en protestation.
Même cas de figure en Aveyron, où la baisse de construction de pièces pour véhicules diesel a mis à mal tout un bassin d’emploi et déclenché des grèves dans plusieurs entreprises ainsi qu’une manifestation de plus de 2000 personnes le 19 mars. Parmi ces manifestants, de nombreux grévistes provenaient de la fonderie automobile SAM (Société aveyronnaise de métallurgie) de Viviez-Decazeville dont le principal client est Renault. En redressement judiciaire, l’entreprise cherche elle aussi un repreneur.
La situation chez Renault reflète ainsi une crise de l’emploi industriel automobile en France. Pour le cabinet Trendeo, spécialiste, en matière d’évolution de l’emploi dans l’industrie et interrogé par Le Monde : « Un véhicule sur cinq est fabriqué en France aujourd’hui, contre un sur deux au début des années 2000. Plus de la moitié des emplois industriels automobiles pourraient disparaître d’ici à 2035. » Si cette dynamique se poursuit, seuls 90 000 salariés demeureraient dans le secteur automobile d’ici 2035 contre un peu moins de 200 000 aujourd’hui.
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