Luttes

Luttes et Covid : le feu qui couve !


 

Trois économistes du FMI pronostiquent des troubles sociaux à la sortie de la pandémie mondiale de la Covid-19. Mais pour le moment, les mobilisations restent assez faibles, à l’image de la journée de grève interprofessionnelle du 4 février. Des luttes existent pourtant, à bas bruit, notamment dans des entreprises qui licencient. Mais sans que la question de l’emploi s’impose à la une, ou comme le sujet politique central. En tout cas pour le moment.

 

Grèves, manifs, actions

 

Quand le FMI craint les troubles sociaux

Les pandémies sont sources d’importants conflits sociaux expliquent trois économistes du FMI qui sont allés chercher dans l’histoire, des éléments de comparaison sur les répercussions passées des épidémies. Premier constat : elles aggravent les failles préexistantes dans les sociétés. Mais elles sont aussi souvent à la source de contrecoup de diverses natures : ethniques, religieux ou de classe. Pour autant, les auteurs constatent que les troubles ne sont pas toujours immédiats. Pour eux, le risque de pics de troubles sociaux apparaît sur un long terme, qu’ils se risquent d’évaluer à deux années.

 

Un petit 4 février

20 000 manifestants à Paris selon les chiffres de la CGT, 100 000 sur l’ensemble du territoire selon notre estimation. La journée de grève interprofessionnelle de jeudi pour défendre l’emploi et les services publics n’a pas fait le plein (lire notre article). Même si elle eut pour vertu de déconfiner des syndicalistes parfois très enfermés dans leurs réalités d’entreprise, en cette période de rétrécissement social généralisé liée à la crise sanitaire.

 

Partout en France contre Sanofi

Les salariés de Sanofi, visés par des suppressions de postes (voir notre article), ont multiplié les actions de protestation cette semaine. A Montpellier, certains se sont joints au cortège interprofessionnel du 4 février. A Sisteron, la CGT a appelé à une grève reconductible de plusieurs heures le matin jusqu’au 9 février. A Paris encore, la CGT et le député François Ruffin ont organisé le procès fictif de la multinationale devant son siège. Hasard du calendrier ou véritable pied de nez patronal, le géant pharmaceutique français a annoncé vendredi 5 février qu’il augmenterait ses versements de dividendes. L’entreprise reversera désormais 4 milliards d’euros à ses actionnaires (en savoir plus).

 

L’opposition à la loi sur la sécurité globale ne désarme pas

Continuer à occuper l’espace. Samedi dernier, la Coordination Stop loi sécurité globale appelait à une énième journée de manifestation depuis le mois de novembre. Partout en France, des milliers de personnes ont défilé dans une soixantaine de villes, en attendant un retour de la proposition de loi sur le devant de la scène médiatique, à l’occasion de son passage au Sénat au mois de mars. Au moment où nous écrivons, aucune nouvelle date nationale de manifestation n’a encore été avancée.

 

Pas de bébés à la consigne

C’était le mot d’ordre des professionnels de la petite enfance, réunis dans un collectif du même nom, en grève mardi 2 février contre la réforme des modes d’accueil contenue dans la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP). Ils protestaient notamment contre l’abaissement du nombre de professionnels auprès des enfants dans les crèches : un pour six enfants, contre un sur cinq précédemment. Une mesure visant à créer une rentabilité pour le secteur privé lucratif selon eux. Un millier de personnes ont manifesté à Paris, plusieurs centaines dans une trentaine de villes de province, sans être entendues par leur ministère. D’autres mobilisations sont à attendre.

 

Cinq semaines de grève à Grandpuits

Déjà un mois de grève pour les raffineurs de Total Grandpuits et la reconduite de leur mouvement jusqu’au 11 février. Cette semaine, ils ont reçu le soutien de salariés d’autres raffineries du groupe sur un appel à la grève de la CGT Total les 3 et 4 février. Selon Adrien Cornet (CGT à Grandpuits) le pourcentage de grévistes dans les équipes d’exploitation s’élève à 50 % au raffinage et 40 % à la pétrochimie dans la raffinerie de Normandie, 100 % à Flandres, 40 % à La Mede et 100 % au raffinage, 60 % à la pétrochimie et 70 % aux expéditions à Feyzin. Les grévistes de Grandpuits appellent à une journée de solidarité dimanche sur le piquet de grève, et une action mardi matin à La Défense.

 

Autoréduction

Un soixantaine de militants ont réquisitionné une soixantaine de produits de première nécessité dans un magasin Carrefour du XIIIe arrondissement de Paris samedi 30 janvier. Après des négociations, le magasin les a laissés repartir avec des caddies remplis de produits alimentaires et hygiéniques, devant des policiers qui ont procédé à des contrôles d’identité. « Carrefour étudie les suites à donner en matière judiciaire », a indiqué une porte-parole de l’enseigne.

 

Une victoire pour les femmes de chambre du Campanile

Entre janvier et février, le groupe Louvre Hôtels, qui détient les hôtels Campanile du Bourget et de Levallois, a accepté l’internalisation d’une dizaine de femmes de chambre qui travaillaient jusqu’alors dans ces hôtels mais pour des sous-traitants, après des négociations avec la CGT-HPE. Les employés n’auront donc pas eu besoin de recourir à la grève. En définitive, le syndicat aura été plus efficace que l’ex-ministre Marlène Schiappa pour améliorer la condition des femmes de chambre (notre enquête).

 

L’Équipe prête à la contre-attaque ?

Après 14 jours de grève au mois de janvier contre un PSE, les syndicats du journal se disent prêts à une nouvelle grève en cas de non respect par leur direction du « zéro départ contraint ». À l’occasion de la réunion du comité social et économique ce mercredi, ils ont dénoncé le manque d’information sur les conditions du PSE (lire notre article).

 

PSE, Chômage, emploi

 

American Airlines toujours au bord du gouffre

La compagnie américaine a annoncé qu’elle pourrait licencier 13 000 salariés si les aides gouvernementales mises en œuvre jusqu’alors n’étaient pas prolongées au-delà de mars. Les syndicats du secteur poussent désormais le gouvernement fédéral américain à déployer un nouveau plan d’aide de 15 milliards de dollars pour protéger les emplois jusqu’à l’été.

 

Coup dur pour Flunch

La chaîne de restauration a confirmé mardi matin lors d’un CSE sa volonté de fermer 57 restaurants, sur les 161 existants, et de supprimer 1 244 postes sur 5 000. Flunch a été placé vendredi dernier en procédure de sauvegarde par le tribunal de commerce de Lille.

 

Chômage des jeunes

Sale temps pour les jeunes. Jeudi, l’institut des études et statistiques du ministère du Travail (Dares) indiquait dans son baromètre bimensuel, que le nombre d’embauches en CDI ou CDD de plus de trois mois des moins de 26 ans, était en recul de 14,2 % en 2020. Trois jours plus tôt, c’est Eurostat qui annonçait une augmentation du chômage des jeunes (+ 353 000) en Europe. Des chiffres qui confirment l’échec partiel du plan gouvernemental « Un jeune, une solution », malgré l’argent public versé aux entreprises pour embaucher. Là où le Premier ministre promettait au mois de juillet 450 000 embauches en 6 mois, la ministre du Travail ne confirmait que 220 000 aides versées aux entreprises en janvier 2021.

 

Chômage des autres

La situation des plus de 26 ans n’est guère meilleure. Selon l’Insee, 360 500 emplois salariés ont été détruits au cours de l’année 2020. Soit un recul de celui-ci de 1,8 % sur l’ensemble de l’année. Dans le détail, 39 600 destructions au dernier trimestre, contre 633 000 au premier semestre, après un rebond de 312 400 créations au troisième trimestre. Pour 2021, les différentes projections des institutions ne sont pas plus optimistes pour les six premiers mois de l’année.

 

L’argent de l’État booste l’apprentissage

495 000 contrats d’apprentissage ont été signés en 2020, au lieu d’environ 350 000 l’année précédente, soit une augmentation de 40 %. Un effet d’aubaine après la décision gouvernementale de prendre presque totalement à sa charge la rémunération des apprentis la première année. En juin 2020, le gouvernement avait annoncé verser une prime aux entreprises de 5000 € pour les mineurs et 8000 € pour les majeurs pour toute embauche d’un apprenti à partir du 1er juillet.

 

Du côté du gouvernement

 

La CNCDH critique la loi sur le « séparatisme »

Alors que le projet de loi « confortant les principes républicains » est toujours en débat à l’Assemblée nationale, la commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) rend public son avis sur le texte. Il est particulièrement critique et dénonce l’aspect uniquement répressif du texte. Selon elle, les libertés fondamentales d’association, d’expression, d’enseignement et de culte sont particulièrement visées par des contraintes et obligations qui risquent d’aboutir à la déstabilisation du tissu associatif.

 

Toujours plus de télétravail pour les agents de l’État

Pour lutter contre l’épidémie, Amélie de Montchalin souhaite autoriser les réunions en présentiel des fonctionnaires seulement pour « motif impérieux » et avec moins de six personnes. La semaine dernière 42% des agents de l’État ont télétravaillé au moins un jour.

 

Report de la trêve hivernale

La fin de la trêve hivernale, habituellement actée pour le 1er avril, est finalement reportée au 1er juin en raison de la crise sanitaire, a annoncé lundi 1er février 2021 la ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon.

 

Écologie

 

Affaire du siècle

Ce 3 février, le tribunal administratif de Paris a reconnu l’État français coupable d’« inaction climatique », suite à la plainte déposée par quatre ONG. Si c’est une première, les associations plaignantes souhaitent également voir l’État condamné à réparer le préjudice écologique. Or pour l’heure, cette décision est remise à plus tard.

 

Montagne d’or : État contre patronat

Le 3 février était définitivement un jour important pour l’écologie. Ce jour-là, l’État français a déposé un recours contre le tribunal administratif qui l’avait obligé en décembre à prolonger les concessions minières du consortium Nordgold-Columbus Gold dans le projet dit « de la montagne-d’or ». Pour l’heure, l’Etat est opposé à la mouture actuelle du plus grand projet d’extraction d’or primaire jamais proposé en Guyane et porté par un consortium russo-canadien.

 

1000 contre Amazon

Un millier de personnes se sont réunies samedi 30 janvier à Fournès (Gard) pour s’opposer à l’implantation d’un nouvel entrepôt Amazon dans la commune. Parmi les associations et partis politiques mobilisés : Europe Écologie-Les Verts, Attac France, Les Amis de la Terre France ou encore Solidaires et la CGT du Gard.

 

International

 

L’armée de retour en Birmanie

Un coup d’arrêt. Le lent processus de démocratisation de la Birmanie, engagé au début des années 2010, a pris fin lundi. L’armée qui avait tenu le pays pendant 50 ans depuis son indépendance est revenue au pouvoir en procédant à un coup d’État. Elle a instauré l’état d’urgence pour une année et fait la promesse d’élections libres ensuite. Pour s’en justifier, la junte a invoqué des fraudes lors des élections qui ont donné une majorité écrasante au parti de Aung San Suu Kyi. Les protestations d’une partie de la population se poursuivaient encore en cette fin de semaine, malgré la multiplication des arrestations.

 

Joe Biden veut un doublement du SMIC

C’est une des mesures du plan de relance XXL américain de 1900 milliards de dollars : doubler le montant du salaire minimum. Inchangé depuis 12 ans, celui-ci s’élève aujourd’hui à 6 € de l’heure (7,25 $). Une misère. Le rattrapage le ferait passer à 12,45 € (15 $). La nouvelle administration américaine parie sur une augmentation de la consommation induite par cette hausse, pour passer au-dessus des résistances de plusieurs secteurs économiques, parmi lesquels la restauration.

 

Les paysans toujours mobilisés en Inde

Plus de 70 jours que les paysans indiens réclament l’abrogation de trois décrets gouvernementaux libéralisant le secteur agricole. Après la plus grande grève de l’histoire au mois de décembre grâce à une alliance avec les syndicats de travailleurs indiens, ils avaient obtenu la suspension des décrets. Les paysans poursuivent leurs manifestations et « l’encerclement » de la capitale New Dehli, malgré une sévère répression. Le conflit a connu un rebond inattendu cette semaine : des tweets de la chanteuse Rihanna et de la militante écologiste Greta Thunberg ont mis le feu aux poudres en fragilisant un peu plus le pouvoir ultranationaliste et autoritaire de Narendra Modi. Une nouvelle manifestation aura lieu ce samedi pour bloquer toutes les voies d’accès à la capitale.

 

Et aussi

 

Une nouvelle grève de la faim pour le droit de vivre ici

Après un boulanger à Besançon, c’est au tour d’un enseignant du Puy-en-Velay de démarrer une grève de la faim pour que Madama, un jeune malien arrivé mineur en France qui vit au sein de sa famille depuis deux ans, ne soit pas expulsé (lire notre article).

 

Le sénat s’oppose à la PMA pour toutes

Au terme de deux jours de débat, le Sénat à majorité de droite a adopté, dans la nuit de mercredi 3 à jeudi 4 février, un projet de loi de bioéthique amputé de sa mesure emblématique : l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Les anti-PMA qui avaient manifesté partout en France pendant le week-end et parfois agressé des contre-manifestants (en savoir plus) se sont largement réjouis de la nouvelle.

 

Amazon is watching you

L’entreprise américaine a commencé à installer des caméras connectées dans ses véhicules de livraison. Officiellement pour améliorer « la sécurité des chauffeurs et des communautés qu’ils desservent ». En effet, les véhicules seront équipés de quatre objectifs filmant la route et le conducteur. Pour autant, la firme avoue que le but recherché est de modifier le comportement des chauffeurs pour faire baisser le nombre de collisions.

 

François Asselineau mis en examen

Le président de l’UPR, François Asselineau, a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire ce vendredi pour harcèlement moral et agressions sexuelles. Mercredi, il avait été placé en garde à vue pour ces faits qui font l’objet d’une enquête depuis le 15 mai 2020. Deux plaintes avaient été déposées contre lui par deux anciens salariés de son parti, l’UPR.