Cette semaine s’est démarquée par son actualité policière. Outre Atlantique : procès du meurtrier de George Floyd. En France : annonces sécuritaires de Macron, procès de Viry-Châtillon, de la Bac Nord et pour finir, meurtre d’une policière dans les Yvelines. Une actualité de nature à faire oublier les mobilisations sociales naissantes, comme celle du 23 avril contre la réforme de l’assurance chômage, ou en préparation, comme la journée de grève nationale annoncée à La Poste pour mai. Heureusement, on vous rappelle tout ça dans ce récap hebdo.
Grèves et manifestations
Premiers cortèges massifs contre la réforme de l’assurance chômage
Les lieux de spectacles en luttes, les syndicats et les collectifs de précaires voulaient une première date forte pour marquer le renouveau de la lutte contre la réforme de l’assurance chômage, le pari a été tenu. Vendredi 23 avril, des cortèges interprofessionnels constitués de milliers de manifestants pour les plus grandes villes, ont défilé dans les rues. Symboliquement, ils sont souvent passés devant les lieux de culture occupés, qui sont aujourd’hui près de 120 en France. La mobilisation marque le début d’une séquence de lutte contre la réforme de l’assurance chômage, qui devrait atteindre son point d’orgue le 1er mai.
La Poste : vers une journée de grève nationale en mai
C’est une première depuis au moins 10 ans : six syndicats de La Poste appellent ensemble à l’action. Une intersyndicale nationale (CGT, CFDT, SUD, FO, UNSA, CFTC) propose, outre la présence massive des postiers dans les manifestations du 1er mai, une semaine d’action et une journée de convergence des luttes mi-mai. Les dates tiennent la corde : le 18 ou le 20 mai. Une nouvelle réunion de l’intersyndicale doit trancher à la fin du mois.
Timide appel à mobilisation nationale pour les territoriaux
Un « soutien aux luttes en cours » contre le passage aux 1607 heures (lire notre article) et un appel à « renforcer ces mobilisations ». C’est le sens du communiqué de presse signé cette semaine par quatre fédérations syndicales (CGT, FSU, FO, SUD) présentes dans la fonction publique territoriale. Au-delà, alors que le passage aux 1607 heures sera validé en juillet par un grand nombre d’exécutifs locaux, elles proposent que « des débats se mènent partout en vue de construire tous.tes ensemble une mobilisation nationale ». Prochaine réunion de l’intersyndicale à la fin du mois. Et peut-être une date en mai ou juin.
En grève contre le PSE du groupe Flauraud
112 emplois menacés sur 467 et six magasins promis à fermeture dans le PSE du groupe Flauraud (réparation automobile et pièces détachées). À Clermont-Ferrand, où 50 emplois sont dans la balance, les salariés se sont mis en grève mercredi 21 avril. Sans obtenir aucune avancée sur le PSE au cours d’une des dernières réunions avant sa conclusion le 3 mai. Du coup, à l’appel de la CGT, la CFDT et la CFE-CGC, la grève a été reconduite le jeudi. Les magasins de Millau et de Lyon étaient également en grève la veille.
Saint-Claude : territoire déserté mais mobilisé
Près d’un millier de personnes ont défilé dans la petite ville de Saint-Claude (9000 habitants, en Bourgogne-Franche Comté) samedi 17 avril. Ils s’opposent à la désindustrialisation de leur bassin d’emploi. En effet, l’entreprise MBF Aluminium, qui compte 280 salariés, est menacée de fermeture, mettant à mal toute l’activité économique du secteur. Cette mobilisation rappelle les récentes manifestations qui ont eu lieu en Aveyron autour des usines de Bosch et de la SAM (notre article).
Police, justice
Macron : barre sur le sécuritaire toute
Une offensive sur le terrain de la sécurité à un an de la présidentielle. C’est l’exercice auquel s’est livré Emmanuel Macron cette semaine. Après une longue interview sur ce thème dimanche dans les colonnes du Figaro, le chef de l’État s’est déplacé lundi à Montpellier. Au programme, une visite au commissariat central, avec le renouvellement de l’annonce de la création de 10 000 postes de policiers et 15 000 places de prison d’ici la fin du quinquennat. Et en sus, la généralisation des caméras-piéton et la création d’une « école de guerre » pour la formation des policiers. Autre axe du déplacement présidentiel, la lutte contre la drogue. Une « mère des batailles » pour Emmanuel Macron. Des propos et annonces ouvrant une surenchère à droite, toujours en vue des élections présidentielles.
Le meurtrier de George Floyd condamné
Mardi 20 avril, à l’issue d’un long procès (lire notre article), les jurés ont rendu leur verdict dans l’affaire George Floyd, cet Afro-Américain mort lors d’une intervention policière. Derek Chauvin, le policier responsable de sa mort a été jugé coupable de « violences volontaires ayant entraîné la mort », « homicide involontaire » et « meurtre ». La peine ne sera prononcée par le juge que dans huit semaines.
Viry-Châtillon, procès hautement politique
Plusieurs centaines de policiers se sont rassemblés mardi devant les tribunaux de différentes villes à l’appel de leurs syndicats. Ils s’indignent du verdict du procès en appel rendu par la cour d’assises de Paris le weekend du 17 octobre concernant l’affaire de l’attaque de leurs collègues à Viry-Châtillon.
En 2016, des policiers avaient été attaqués et brûlés dans cette commune de l’Essonne. L’un d’eux avait été plongé plusieurs semaines dans le coma. En appel, cinq personnes ont été condamnées à des peines allant de six à dix-huit ans de réclusion criminelle. Des sanctions moins lourdes qu’en première instance. De son côté, Mediapart a révélé qu’en garde à vue, des policiers ont tronqué des pans entiers des propos de prévenus et ainsi fait condamner des innocents.
Les policiers de la Bac Nord largement relaxés
Cette semaine, la justice a également relaxé des policiers. Neuf ans après le début de l’affaire dite « de la Bac Nord » (ndlr : comprendre des quartiers Nords de Marseille), brigade entièrement dissoute par Manuel Valls en 2012, la justice a relaxé sept des dix-huit policiers mis en cause. Selon le tribunal, même si des « dysfonctionnements » ont eu lieu, de nombreux faits reprochés n’étaient pas « suffisamment caractérisés ». La peine la plus lourde ne dépasse pas un an de sursis, les autres vont de deux à dix mois de sursis. Le parquet dispose de dix jours pour faire appel du jugement rendu ce jeudi.
Meurtre d’une policière à Rambouillet
Une fonctionnaire de police a été tuée par un homme armé d’un couteau, dans l’entrée du commissariat de Rambouillet (Yvelines), ce vendredi 23 avril. L’assaillant a ensuite été tué par balles par la police. Le parquet national antiterroriste a annoncé se saisir de l’enquête.
Licenciement et chômage
Baisse de la prise en charge de l’activité partielle à partir de juin
Jeudi, à l’occasion d’une rencontre avec les organisations professionnelles, la ministre du Travail Élisabeth Borne a annoncé une baisse progressive de la prise en charge par l’État de l’activité partielle. Selon un participant, les salariés pourraient voir leur rémunération passer de 84 % de leur salaire net à 72 % au tournant de l’été. Le reste à charge des entreprises baissera également.
Intermittents : Bachelot joue la montre
La ministre de la Culture Roselyne Bachelot a annoncé qu’une concertation avec les syndicats de la culture sera lancée avant la fin du mois concernant la prolongation des droits au chômage des intermittents au-delà du mois d’août. Pour la CGT-Spectacle, l’attitude de la ministre cache mal une intention de jouer la montre pendant que la mobilisation grandit et une volonté de faire des annonces décevantes pour la profession une fois l’été venu.
Du côté des boîtes
Plainte des syndicats de Suez contre l’OPA sur Véolia
Plusieurs syndicats du groupe Suez ont déposé plainte jeudi auprès du parquet national financier contre le secrétaire général de l’Élysée et des responsables de Veolia, Engie et Meridiam, pour « trafic d’influence » autour de la fusion entre Veolia et Suez. Ils dénoncent l’intervention de l’Élysée bien en amont de l’annonce publique du projet de fusion entre les deux fleurons de l’eau et des déchets, puis les « pressions régulières et répétées pour faire aboutir » le rapprochement.
Carrefour se débarrasse de 3500 salariés
Carrefour a confirmé cette semaine sa volonté de basculer en location-gérance 47 de ses magasins (soit près de 3500) salariés. Cette manœuvre, qui revient à sous-traiter une part considérée comme non rentable de son activité, induit logiquement une dégradation des conditions de travail pour les employés déplacés. Les salariés qui s’opposent à cette décision avaient perturbé le fonctionnement d’une centaine de magasins dès le week-end de Pâques et annoncent que leur mouvement est voué à s’amplifier.
Du côté du gouvernement
Le gouvernement offre plus de jours de congés imposés au patronat
Autre dossier sur la table du ministère du Travail : le nombre de jours de repos qu’un employeur pourra imposer à son salarié dans le cadre d’un accord d’entreprise. Ils passeront temporairement de 6 à 8, a annoncé la ministre ce lundi. Le délai de prévenance avait déjà été modifié par ordonnance en décembre : un jour au lieu d’un mois. Une mesure valable jusqu’au 30 juin.
Fin de l’état d’urgence sanitaire, mais pas vraiment
Le dernier texte de loi prolongeant l’état d’urgence sanitaire a fixé le 1er juin comme date de fin de ses mesures d’exception. Le 28 avril, un texte dit de sortie de l’état d’urgence sanitaire sera examiné en conseil des ministres. Mais selon plusieurs rédactions, qui ont pu en prendre connaissance, celui-ci donnera à l’exécutif sensiblement les mêmes pouvoirs que l’état d’urgence. Et ce, jusqu’au 31 octobre.
Et aussi
Un déconfinement précoce
Réouverture des écoles le 26 avril, puis des collèges et lycées le 3 mai, fin de la limitation de déplacement le 3 mai, sont les annonces fermes de Jean Castex, lors de la conférence de presse du jeudi soir sur la situation sanitaire et les mesures gouvernementales. Et la confirmation d’une volonté de rouvrir à la mi-mai les terrasses, les lieux culturels et les commerces. Mais encore conditionnée à ce jour à l’évolution de l’épidémie (lire notre article).
Marseille : recours contre la limitation du droit de grève
La CGT et la FSU ont déposé mercredi un recours en justice contre l’accord limitant le droit de grève des agents territoriaux de la ville de Marseille. Le 8 février, la municipalité a présenté en conseil municipal, pour validation, l’accord sur des restrictions du droit de grève signé avec FO, l’UNSA, la CGC et la CFTC (lire notre article).
Séparatisme des clubs de football les plus riches
Annonce choc dans le monde du football dans la nuit du dimanche 18 au lundi 19 avril : 12 des plus grands clubs européens ont fait part de leur volonté de créer un championnat indépendant : la « super ligue ». Un pied de nez au reste du monde du football professionnel ayant pour but de permettre à ces clubs d’augmenter leurs revenus notamment télévisuels. Pourtant, une levée de boucliers venue de l’ensemble du monde du football (clubs, FIFA, UEFA, supporters…) mais aussi des politiciens, aura eu raison du projet dès le 21 avril. Une indignation à moindres frais permettant à qui le souhaite de se placer en grand défenseur du football populaire… et de faire oublier le système déjà totalement financiarisé du football actuel.
Une pandémie qui nuit à la liberté de la presse
L’exercice du journalisme est « totalement ou partiellement bloqué » dans plus de 130 pays, alerte Reporters sans frontières (RSF). « L’Europe reste la région la plus sûre mais les agressions et interpellations abusives s’y sont multipliées, notamment en France (34e du classement) lors des manifestations contre le projet de loi « sécurité globale » », note le rapport. Loin derrière l’Allemagne (13e).
Faisons face ensemble !
Si les 5000 personnes qui nous lisent chaque semaine (400 000/an) faisaient un don ne serait-ce que de 1€, 2€ ou 3€/mois (0,34€, 0,68€ ou 1,02€ après déduction d’impôts), la rédaction de Rapports de force pourrait compter 4 journalistes à temps complets (au lieu de trois à tiers temps) pour fabriquer le journal. Et ainsi faire beaucoup plus et bien mieux.