Pendant que la bataille contre les lois sécuritaires et liberticides fait rage, on apprend que le Covid est malheureusement plus efficace que les États et leurs éternels « engagements à horizon 2050 » pour réduire les émissions de CO2… Ajoutez à ça une pincée de luttes dans les boîtes et dans la rue et vous tenez notre récap hebdo.
Mesures sécuritaires à tous les étages
Mobilisations contre la loi Sécurité globale
Les manifestations se poursuivent contre la proposition de loi votée en première lecture par l’Assemblée nationale. Le samedi 5 décembre, environ 90 villes restaient mobilisées. Le ministère de l’Intérieur comptabilisait 52 000 manifestants dans toute la France, contre 130 000 la semaine précédente, mais seulement 5000 dans le cortège parisien. Un chiffre étonnamment inférieur à celui du défilé lyonnais à en croire la police. À Paris, les affrontements entre la police et une partie des manifestants en début de parcours n’ont pas permis à la plupart des participants de rejoindre l’arrivée à République. Une des raisons qui ont conduit la coordination nationale à appeler à de nouvelles manifestations partout le 12 décembre, sauf à Paris, en attendant une grande manifestation en janvier.
Toujours plus de fichage !
C’est en catimini que le gouvernement a publié 3 décrets modifiant plusieurs fichiers de police et de gendarmerie. Ceux-ci pourront désormais enregistrer les opinions politiques, philosophiques, religieuses, ainsi que les appartenances syndicales des citoyens. Le champ d’application s’élargit également au-delà des risques terroristes (notre article).
Loi contre le séparatisme
« Une loi de liberté ». C’est un des éléments de langage du gouvernement à propos du texte présenté mercredi en conseil des ministres, et finalement intitulé : projet de loi « confortant les principes républicains ». En tout, 54 articles qui modifient les lois sur le droit d’association (1901), sur la laïcité (1905) ou sur l’enseignement (1882). Au programme : renforcement de la laïcité dans les services publics ou les associations, réorganisation des associations cultuelles ou culturelles, restriction de l’instruction à domicile, augmentation des pouvoirs des préfets, lutte contre la polygamie ou les mariages forcés, lutte contre la haine en ligne.
Un Beauvau de la Sécurité
Déminage ? Enfumage ? Pour mettre fin au mouvement des gilets jaunes, Emmanuel macron a lancé le Grand débat. Puis le Ségur de la Santé pour répondre à la colère des soignants. Ou encore la Convention citoyenne pour reprendre l’initiative sur le climat. Ce coup-ci, Emmanuel Macron a annoncé en début de semaine le lancement d’un Beauvau de la sécurité à partir du mois de janvier. L’objectif : « améliorer les conditions d’exercice des forces de l’ordre », et « consolider » le lien avec la population. Le tout dans un contexte très sécuritaire, et dans un moment de contestation du pouvoir et des pratiques de la police.
Une commission police média
Lundi, le Premier ministre a annoncé la mise en route d’une « commission indépendante sur les relations entre journalistes et forces de l’ordre ». Il a chargé Jean-Marie Delarue (l’ex-directeur des libertés publiques au ministère de l’Intérieur) de travailler à sa composition. Avec cette commission, Jean Castex souhaite initier un dialogue entre journalistes et forces de l’ordre autour de la couverture des manifestations. Mais il n’est pas certain qu’il trouve beaucoup de professionnels du monde des médias pour servir de caution au gouvernement.
Grèves et manifestations
Quand une manif en remplace une autre
La nature a horreur du vide, les manifestant.es aussi ! Puisque la coordination #StopLoiSecuriteglobale n’a pas appelé à défiler à Paris ce week-end, de nombreuses organisations plutôt classées à la gauche de la gauche ainsi que des collectifs gilets jaunes, ont pris le relais et appelé à manifester contre les lois sur le séparatisme et la sécurité globale à Chatelet ce samedi après-midi. La manifestation a été interdite par la préfecture de Paris.
Les douze grèves d’Hercule
Les journées de grève se multiplient chez EDF contre le projet Hercule (voir notre article). Après avoir cessé le travail le 26 novembre, environ un tiers des salariés était en grève ce jeudi 10 novembre partout en France. La centrale nucléaire de Paluel a été bloquée et la CGT appelle déjà à une journée le 17 décembre.
Grève à Grandpuits
Les salariés de la raffinerie Total de Grandpuits (Seine-et-Marne) ont entamé, jeudi 10 décembre, une grève de quarante-huit heures pour protester contre le projet de reconversion du site lancé par le groupe pétrolier. Il prévoit notamment la suppression de 150 emplois directs. Les organisations syndicales du site revendiquent plus de 70 % de grévistes chez les personnels postés.
Conflit social armé en Kanaky
La grande usine de nickel et de cobalt de Goro, dont dépendent environ 3 000 emplois, devrait être vendue à un consortium mené par le groupe suisse Trafigura, a-t-on appris le 9 décembre. Cette vente a embrasé le sud de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie puisque le collectif « usine du sud : usine pays » et l’Instance coutumière autochtone de négociations (ICAN) soutenus par les indépendantistes du FLNKS sont « totalement opposés » à ce projet, qui consacre selon eux « la mainmise des multinationales sur les richesses du pays ». La situation autour de l’usine est très tendue, selon les autorités locales : « Les forces de l’ordre ont dû faire usage des armes pour repousser deux pickups qui fonçaient sur les gendarmes », a indiqué le haut-commissariat de Kanaky ce jeudi.
Colère dans l’hôtellerie
Jeudi 10 décembre la CGT-HPE appelait à une manifestation contre les licenciements dans l’hôtellerie. Son cortège a été rejoint par les salariés de TUI et de Monoprix. Plus au sud, à Marseille, les femmes de chambre du Novotel Prado, organisées au sein de la CNT-SO, entraient dans leur troisième semaine de grève contre la répression anti-syndicale et le « vol d’heures”.
Général Electric : quinze jours de grève
Déjà plus de deux semaines de grève pour les salariés de General Electric de Villeurbanne et Saint-Priest (notre article).
Écologie
L’Europe pleine d’ambitions pour le climat
Vendredi matin, les pays membres de l’Union Européenne ont trouvé un accord concernant un nouvel objectif climatique pour 2030. Les émissions de CO2 devront décroître « d’au moins 55 % » d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Douée pour établir des objectifs ambitieux, la France l’est cependant moins pour les respecter. Entre 2015 et 2019, les émissions sectorielles de la France ont baissé de 3,7 %. Elles auraient dû baisser de 9 % pour respecter les budgets carbone de la France fixés en 2015. Ses piètres résultats font de la France un des plus mauvais élèves de l’UE en matière d’écologie.
L’ambition faite sommet
Les pays européens ne sont pas les seuls à proclamer leur engagement en faveur du climat. Ce 12 décembre, la France, le Royaume-Uni et les Nations unies organisent le sommet Climate Ambition Summit, en partenariat avec le Chili et l’Italie. Il s’agit de lancer la Cop 26, reportée d’un an, qui se tiendra en novembre 2021. Cinq ans plus tôt, 195 pays adoptaient l’accord de Paris sur le climat et s’engageaient à contenir le réchauffement climatique en dessous des 2 °C. Un objectif que l’on sait aujourd’hui inatteignable.
Convention citoyenne et loi Climat
La ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, a dévoilé mardi 8 décembre les premières mesures du projet de loi Climat issues des 146 propositions de la convention citoyenne pour le climat. Parmi elles : l’interdiction de certains vols domestiques, l’expérimentation de menus végétariens dans les cantines ou encore la fin de la location des passoires thermiques en 2028. La loi doit être présentée au Conseil des ministres le 27 janvier 2021.
Baisse des émissions de CO2
Ça n’était pas arrivé depuis la crise économique de 2008 : les émissions de CO2 à l’échelle mondiale ont chuté de 7%. Cette diminution est particulièrement prononcée aux États-Unis (- 12 %), dans l’UE (- 11 %) et en Inde (- 9 %) d’après les chiffres du Global carbon project, consortium international composé de 86 chercheurs.
4 millions de réfugiés climatiques
Dans son pré-rapport 2020 sur l’état du climat, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) évalue à 4 millions le nombres de déplacés supplémentaires dus au climat et à la météo cette année.
Le saviez-vous ?
Ce 8 décembre, c’était la journée mondiale du climat.
Dans les entreprises
Jours de carences
Après avoir longtemps traîné des pieds, le gouvernement bouge un peu sur la suspension du jour de carence afin d’éviter que des salariés n’aillent travailler en étant malade du Covid. Le jour de carence sera suspendu pour les fonctionnaires au mois de janvier. Et ce, jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire le 16 février (notre article) a expliqué Amélie de Montchalin, la ministre de la Transition et de la Fonction publique. Une décision étendue maintenant aux salariés du privé a annoncé Élisabeth Borne mercredi soir, sans en préciser les contours.
600 agences fermeront dans la fusion Société Générale – Crédit du Nord
« Aucun licenciement, aucun départ contraint ». C’est ce qu’affirme le directeur adjoint du groupe Société Générale Sébastien Proto. La fusion des deux réseaux bancaires entraînera 600 fermetures d’agence d’ici 2025, soit plus de 25 % d’entre elles. Une affirmation qui ne convainc pas les syndicats des deux entreprises. La CFDT du Crédit du Nord estime que 3000 à 5000 emplois pourraient être supprimés.
1150 « départs volontaires » à Aéroport de Paris
Après la présentation d’un plan comprenant trois accords indissociables (rupture conventionnelle collective, accord de performance et activité partielle longue durée) refusé par deux des trois syndicats d’Aéroport de Paris (ADP), la direction a obtenu la signature unanime d’un accord de rupture conventionnelle collective. Celui-ci prévoit le « départ volontaire » de 1150 personnes sur les 6250 salariés du groupe. Parmi eux, 700 ne seront pas remplacés. La direction d’ADP s’engage à ne procéder à aucun départ contraint pour raison économique jusqu’au 1er janvier 2022. Soit juste une année, malgré la saignée déjà prévue, dans un secteur fortement touché par la crise liée à la pandémie. De plus, la direction compte proposer des baisses de salaire début 2021.
Accord sur la santé au travail
Il y aura bien un accord national interprofessionnel (ANI) sur la santé au travail. Les organisations patronales et syndicales ont jusqu’au 8 janvier pour parapher le texte, mais déjà le Medef, la CFDT, FO et la CFE-CGC ont confirmé leur signature. Côté représentants des salariés, seule la CGT dénonce un accord qu’elle considère comme une « régression qui aura de lourdes conséquences ».
Plus d’aides d’État = moins de faillites
Le ruissellement de l’État vers les entreprises est particulièrement efficace. Malgré le couvre-feu, puis un second confinement, le nombre de défaillances d’entreprises est en forte baisse au cours des trois derniers mois. Moins 37 % comparé à la même période en 2019. Finalement, la mise sous perfusion du secteur privé avec de l’argent public diffère grandement la nécessité pour nombre d’entreprises de prouver leur viabilité dans une économie de marché. Cependant, le nombre de défaillances devrait monter en flèche l’an prochain, avec la baisse ou la disparition des aides publiques.
Et aussi
Le déconfinement ralentit
Pas d’autorisation de circulation pour le réveillon du 31 décembre, pas d’ouverture pour les cinémas et les salles de spectacle. La deuxième phase du déconfinement n’aura pas lieu comme imaginée. Certes, il n’y aura plus besoin d’attestation en journée et les déplacements entre régions seront possibles, mais un couvre-feu entre 20 h et 6 h du matin sera instauré mardi prochain jusqu’au 7 janvier. Seule exception le soir du réveillon de Noël. Des décisions prises du fait du niveau de circulation du virus qui n’a pas atteint les 5000 cas de contaminations quotidiens maximum. Au contraire, celles-ci ne baissent plus depuis une semaine pour s’établir entre 10 et 15 000 cas chaque jour, alors que le nombre de personnes en réanimation est encore de 3000 patients.
Peine de prison requise contre Nicolas Sarkozy
Un petit pas vers la prison, un grand pas pour l’institution judiciaire ? Le parquet national financier a requis 4 années de prison, dont deux ferme, pour l’ancien chef de l’État et les autres prévenus dans l’affaire des écoutes. De son côté, la défense a demandé la relaxe en dénonçant le « vide du dossier de l’accusation ». Le procès a pris fin jeudi et le délibéré sera rendu le 1er mars.
Mise en examen du commissaire responsable de la charge dans l’affaire Legay
« Complicité, par ordre ou instruction, de violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ». C’est le motif de la mise en examen par le parquet de Lyon, 20 mois après les faits à Nice, du commissaire ayant ordonné la charge de police ayant gravement blessé Geneviève Legay, une militante d’Attac âgée de 73 ans.
Faisons face ensemble !
Si les 5000 personnes qui nous lisent chaque semaine (400 000/an) faisaient un don ne serait-ce que de 1€, 2€ ou 3€/mois (0,34€, 0,68€ ou 1,02€ après déduction d’impôts), la rédaction de Rapports de force pourrait compter 4 journalistes à temps complets (au lieu de trois à tiers temps) pour fabriquer le journal. Et ainsi faire beaucoup plus et bien mieux.